Crise des producteurs de lait: "On racle les fonds de tiroirs mais il n'y a plus rien"

Les producteurs de lait de l'Ouest manifestent cette semaine devant le siège de Lactalis à Laval. - Loïc Venance - AFP
Les agriculteurs laitiers ont décidé de faire entendre leur colère. Ils se retrouvent ce lundi à Laval au siège de Lactalis, le numéro un mondial des produits laitiers. Les producteurs de Bretagne, Normandie et Pays de la Loire vont se mobiliser plusieurs jours et se relayer devant le siège de l'industriel. A Viré-en-Champagne dans la Sarthe, Etienne et Didier comptent bien participer au rassemblement.
"On n'a plus rien à perdre. On est plus que motivés parce qu'on se lève le matin pour perdre de l'argent. Il y en a marre de bosser pour rien", déplorent-ils.
Même constat pour Alexandre, producteur de lait à Requeil dans la Sarthe. A bout, il a lui aussi l'impression de travailler pour rien.
"J'en ai marre, je suis fatigué. Je travaille juste pour rembourser mes prêts. J'ai une femme qui travaille et qui nourrit ses deux gamins et son mari. Moi j'arrive juste à me prélever 500 euros par mois. J'ai 40 ans et j'ai pris de gros risques, j'ai investi lourdement, 400.000 euros en l'espace de 10 ans", explique cet agriculteur.
Des frais supérieurs au prix de vente
Au coeur de la crise, le prix du lait. Pour les producteurs laitiers, la faute revient notamment au géant du lait Lactalis. "C'est le premier industriel laitier au monde et c'est celui qui paie le moins bien. En même temps, il n'y a pas de secret, quand vous payez le moins bien, vous avez de quoi faire de l'argent", dénonce Etienne. Il explique vendre son lait à 27,5 centimes le litre, quand en moyenne il s'achète à 76 centimes en grande surface. A ce prix, il ne rentre pas dans ses frais. De son côté, le géant Lactalis se défend de tirer les prix vers le bas et met en avant la crise laitière due à la surproduction.
"Qui est-ce qui gagne de l'argent? C'est pas nous, poursuit Etienne. Sachant qu'on a des coûts de production qui vont avoisiner les 31 ou 32 centimes sans la rémunération du travail de l'éleveur. Nous derrière ça nous met dans une merde pas possible pour vivre sur nos exploitations."
Après 35 ans de métier, comme beaucoup de ses collègues, Didier n'en peut plus. "On racle les fonds de tiroirs mais il n'y a plus rien. Comment on fait quand il n'y a plus d'argent? On va pas mettre la clé sous la porte du jour au lendemain, on ne va pas dire on vend arrête tout, ce n'est pas possible. C'est là qu'est le problème aussi, ils savent bien qu'on ne peut pas arrêter. Donc oui on a du courage mais on veut se défendre quand même", milite l'agriculteur.
La manifestation des producteurs de lait de l'Ouest à Laval doit durer au moins jusqu'à la fin de la semaine.