Grande distribution: le patron de "Toujust" dénonce les pressions sur les fournisseurs
Il promet d'être l’un des moins chers, si ce n’est le moins cher. Fabrice Gerber, fondateur de la nouvelle enseigne de supermarchés "Toujust", l’assure avec fermeté : les prix des produits qu’il vendra dans ses magasins seront près de 10% moins chers que ceux pratiqués chez la concurrence, et ce “dès le 1er mars avec la flambée des prix et les augmentations que l’on va avoir”. Mais comment arriver à ce résultat?
Les magasins Toujust, dont le premier établissement ouvrira ses portes le 1er mars prochain à Alès (Gard), représentent l’un des espoirs des petits porte-monnaies pour les semaines et les mois à venir, alors que de nouvelles augmentations tarifaires de produits du quotidien vont prochainement être pratiquées dans les étalages des commerçants.
Le leitmotiv de Toujust est relativement simple: "Nous retournons sur les fondamentaux de base de la distribution, c’est-à-dire que nous supprimons les intermédiaires et nous sommes en lien direct avec le fournisseur ou le producteur, sans passer par des centrales d'achat internationales, nationales ou régionales”, explique sur RMC Fabrice Gerber, ancien de chez Leclerc, système U et Aldi.
En résumé, Fabrice Gerber parle d’un système raccourci et simple pour le consommateur. “Un prix, un produit, une marge pour le magasin”, lance-t-il au micro d’Apolline de Malherbe dans le cadre de la Semaine spéciale pouvoir d’achat dans l’émission Apolline Matin. En guise d’exemple, le créateur de Toujust explique le processus pour un steak haché vendu dans ses rayons.
“Nous achetons directement au producteur, nous faisons abattre l’animal et derrière il est découpé dans l’un de nos ateliers. Nous ne passons donc pas par des intermédiaires ce qui nous permet d’avoir une viande de qualité, française, race à viande charolaise, et qui en plus est à un prix situé entre 10 et 15% moins cher aujourd’hui”, relate Fabrice Gerber.
Le retour d'un système "vertueux"?
Le fondateur de l’enseigne de supermarchés a profité d’une question d’Apolline de Malherbe pour développer un peu plus sa vision du système actuel commerçant, entre fournisseurs et distributeurs qui s’adonnent à “un jeu”. D’ailleurs, il n’y aura pas de produits issus des très grands fournisseurs, comme Danone ou Nestlé, dans les rayons des magasins Toujust.
“Nous avons un système de négociation totalement différent des autres”, assure Fabrice Gerber. Selon lui, c’est “la coopération commerciale qui crée aussi l’inflation. Ce sont des accords qui existent depuis la nuit des temps, et le jour où on voudra éradiquer les coopérations commerciales, on pourra alors agir sur l’inflation”.
Pour revenir à un système qu’il qualifie de “vertueux”, Fabrice Gerber dévoile alors l’un de ses secrets. Les fournisseurs de Toujust sont directement impliqués dans l’entreprise, puisqu’ils sont inscrits au capital du distributeur. Et aux yeux de Fabrice Gerber, c’est justement “le jour où vous partagez vos bénéfices avec vos propres fournisseurs, qu’ils feront l’effort de faire en sorte que l’on ait des prix qu’ils soient le plus juste possible”.
“Tous nos fournisseurs sont intéressés au capital. Nous partageons 25% des bénéfices avec eux, et c’est bien pour cette raison que notre modèle inquiète. Ce n’est pas la force ou le volume que l’on va générer qui inquiète tous les réseaux de distribution, ce qui les inquiète à date c’est qu’aujourd’hui ces fournisseurs pourraient dénoncer le modèle en place”, lance le fondateur de Toujust.
"Le système actuel je l’ai pratiqué pendant 25 ans au quotidien"
Selon Fabrice Gerber, ces mêmes fournisseurs acceptant de travailler avec l’enseigne Toujust subiraient d’ailleurs des “pressions” de la part de certains grands distributeurs afin de les dissuader de travailler avec ce tout nouveau distributeur qui cherche à casser les codes du système.
L’une des menaces les plus courantes, l’annulation du référencement chez un grand distributeur: "Vous travaillez avec le modèle Toujust, vous supprimez alors les coopérations commerciales, vous arrêtez l’enrichissement de la distribution, vous luttez contre l’inflation et résultat, vous êtes déréférencés de chez nous”, voilà à quoi ressemble le type de menaces envoyées aux fournisseurs de l’enseigne Toujust.
Un système que le créateur de Toujust dénonce avec facilité, puisqu’il a lui même fait partie de ce milieu pendant des dizaines d’années. “Il y a une vraie facilité aujourd’hui de le dénoncer puisque je l’ai pratiqué pendant 25 ans au quotidien. Ces pratiques, je les connais par cœur. Les contrats de coopération, la pression que l’on peut mettre sur un fournisseur, les négociations très dures…”. Il aimerait désormais obtenir une réponse des patrons de la grande distribution sur ce type de pratiques, qu’il critique vivement et n’accepte donc plus.