"J’en suis à près de 20.000 litres de lait jetés": le calvaire des agriculteurs après l'incendie de l'usine Lubrizol
Quand seront levées les restrictions de vente des produits agricoles de la région rouennaise ? C'est la question que se posent tous les agriculteurs touchés par l'arrêté préfectoral publié après l'incendie de l'usine Lubrozol le 26 septembre dernier.
Cet arrêté oblige les agriculteurs à consigner ou jeter leurs productions, en attendant les résultats d'analyses réalisées par l'Anses, l'autorité de sécurité sanitaire. Des résultats dont la publication ne cesse d'être reportées. Vendredi, le ministre de l'Agriculture a annoncé une levée "rapide" des restrictions de vente du lait... Mais depuis, pas de nouvelles.
Il a beau avoir reçu une promesse d'indemnisation, Bruno Ledru a du mal à garder le moral. Depuis deux semaines, ce producteur de lait de la région rouennaise a le sentiment de travailler pour rien.
"La seule différence, c’est que je jette mon lait tous les deux jours. J’en suis à près de 20.000 litres de jeté. On passe nos journées à bien travailler et puis on vous annonce que vous mettrez votre travail à la poubelle trois jours de plus. Ce n’est pas facile à vivre", admet l’agriculteur.
Craintes pour la saison prochaine
Ras le bol et inquiétude aussi, à quelques kilomètres de là. Pascal Hénache, un maraîcher bio, vend d'ordinaire en direct à ses clients. Mais en ce moment dans sa boutique, c’est assez vide. "Plus ça va allait moins on aura de choses à vendre. Vivement, qu’on ait de bonnes nouvelles", affirme-t-il.
La situation déteint même sur sa vie personnelle.
"Ma femme et moi, on ne veut plus en parler. On ne dort pas très bien, ça rumine dans nos têtes. On ne sait pas où aller alors qu’on a besoin d’avancer. Si on doit arrêter de bosser, on arrêtera de bosser parce qu’on ne peut plus, mais on a besoin d’avoir une information", déplore-t-il.
Et même si les restrictions sont levées rapidement, Pascal Hénache s'inquiète pour l'avenir de son exploitation. "Le plus inquiétant c’est pour la saison prochaine si le sol a été infecté. Comment on peut être crédible maintenant ? Ça va prendre du temps pour faire revenir les clients", explique-t-il.
S’ils ne reviennent pas vite, ce maraîcher craint de ne pas être assez solide pour continuer son activité.