Je laisse pourrir 5 tonnes de courgettes: les grossistes ne veulent pas qu'elles soient tâchées

Cyril Rous estime a au moins 5 tonnes la quantité de courgettes qu'il va devoir laisser pourrir. - Facebook - Au Bio temps
Cyril Rous, maraîcher bio. Il cultive avec sa femme des fruits et légumes dans une exploitation du Tarn-et-Garonne, "Au bio temps". Il fait à la fois de la vente directe sur les marchés et du demi-gros, en vendant la majorité de sa production à un expéditeur qui l'envoie ensuite à des grossistes ou à des magasins bio.
"Cette année, à cause de la chaleur, on a des courgettes jaunes qui sont un petit peu tâchées de vert. C'est une réaction de la plante à la chaleur. Les grossistes ont refusé de nous les prendre parce qu'ils veulent des courgettes toutes jaunes. Ils ne veulent pas entendre parler de courgettes tâchées, alors qu'elles sont aussi bonnes que les autres. Notre expéditeur a accepté ces courgettes sans souci, mais ce sont les grossistes ensuite qui les ont refusées. Ils ont des cahiers des charges bien précis. Certainement que si on les avait traitées avec des produits chimiques on aurait évité ces tâches.
"5.000 euros de perte de chiffre d'affaires"
On se retrouve donc avec une grosse partie de notre production que l'on ne peut pas expédier. Elles nous restent sur les bras. On en a vendu un petit peu sur les marchés, mais c'est dérisoire. On en a également donné un petit peu à La Croix-Rouge, mais la majorité nous reste sur les bras. On va perdre au minimum 5 tonnes, ce qui représente 5.000 euros de perte de chiffre d'affaires, une grosse perte pour nous. Et je ne compte pas le temps passé à les ramasser et à les trier.
Alors on les a mises en tas pour faire du compost. C'est du gâchis. C'est du temps passé, un gros investissement personnel qui est anéanti parce que certaines personnes ont des exigences qui ne sont pas justifiées. Les grossistes ont peur que les consommateurs ne les achètent pas, alors qu'ils les achètent quand même. Quand on vend ces courgettes tâchées sur les marchés, il n'y a pas de souci. Nos clients comprennent quand on leur explique pourquoi il y a des tâches et ils les achètent sans problème. On a 1.000 commentaires sur notre page Facebook, habituellement suivie par une centaine de personnes, de gens qui nous disent qu'ils ne comprennent pas.
"Les grossistes viennent de la grande distribution"
C'est un problème au niveau des grossistes qui ne sont pas du milieu du bio, qui viennent du milieu conventionnel ou de la grande distribution. Si le consommateur accepte de les manger mais qu'il ne les retrouve pas dans les étals c'est qu'il y a un problème dans la chaine. On est esclave des grossistes, on n'a pas notre mot à dire. Le fait de faire du bio ne change rien à la 'beauté du légume', mais parfois il y a des accidents de parcours sur un légume qui fait qu'il ne correspond pas aux canons de beauté, mais qui sont très bons."