"Cela traduit l'affaiblissement de l'Etat": à Saint-Ouen, les habitants concluent un "accord" avec des dealers

Sans l'aide de la police ni de leur bailleur, les habitants d'une cité de Saint-Ouen ont rétabli la paix sociale avec les dealers qui garantissent désormais la fin des nuisances nocturnes tout en continuant leurs activités.
Face à l'impuissance de la police et l'inaction de leur bailleur social, les habitants d'une cité de Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis), gangrenée par le trafic de drogue, ont choisi le dialogue avec les trafiquants, révélait dimanche Le Parisien. Résultat, les dealers continuent à dealer tout en respectant la vie des habitants de la cité Charles Schmidt.
Les trafiquants ont même collé des affiches dans les parties communes, demandant de limiter le bruit après 22h, heure à laquelle ils désertent les halls pour continuer leur activité à l'extérieur.
"Je comprends les locataires qui veulent la paix. Au bout d'un moment t'en peux plus. Si tout le monde commence à faire ça c'est énorme! La question qu'on peut se poser c'est 'qu'en pense le bailleur?'", s'interroge ce lundi Elina Dumont sur RMC. Car selon Le Parisien, cet accord serait aussi un pied de nez des habitants au bailleur, Seine-Saint-Denis Habitat. Les résidents dénoncent effectivement un abandon, évoquant l'absence de gardien et un ascenseur en panne pendant trois mois.
"Cet accord, c'est le symbole de l'affaiblissement de l'Etat", dénonce de son côté Gilles-William Goldnadel sur le plateau des "Grandes Gueules". "Les parties privées n'ont pas la naïveté de croire que c'est la police qui va assurer la tranquillité publique. Cela montre à quel point nous en sommes!".
Les deux parties gagnantes
Un accord qui n'a rien d'étonnant pour le professeur d'Economie Gilles Raveaud: "C'est un grand classique, la mafia qui assure l'ordre dans des villes entières c'est connu. Les dealers eux-aussi ont besoin de tranquillité pour faire leur business", estime-t-il avant de plaider à demi-voix pour une dépénalisation de la marijuana.
"La marijuana est d'ailleurs l'un des seuls marchés sur lesquels il y a un consensus économique pour dire que les effets toxiques sont relativement moindres et que la lutte contre les trafics coûte cher et est inefficace. Je pense que la question de la dépénalisation pourrait être posée (...) L'addiction au sucre coûte bien plus cher à l'Etat et à la Sécu que le cannabis !", conclu-t-il.
En cas de légalisation du cannabis, Terra Nova dans un rapport datant de 2014, estime que l'Etat français pourrait empocher environ 1,7 milliard d'euros de recettes fiscales, auxquelles il faudrait ajouter une économie de 500 millions d'euros en raison de la fin de la répression.
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