Le billet de Sylvain Grandserre
Crise de l'Ecole ou Ecole de la crise ?
En période de crise, on aimerait que l'Ecole et ses diplômes servent de bouclier social. Or, qui se souvient qu'en 1970, les si nombreux non diplômés étaient rarement au chômage (5 %) ? Longtemps, on eut besoin de bras dans les fermes, les usines, les mines ou les ports. On pouvait donc rater l'école sans forcément louper sa vie professionnelle. Maintenant, même nos étudiants en bavent pour s'en sortir (12 % de chômage chez les diplômés du supérieur) sans parler des 45 % de jeunes sans diplôme qui pointent à Pôle Emploi !
Que s'est-il passé alors ? Les petits boulots peu qualifiés ont disparu : automatisation, robotisation, mécanisation, informatisation. Tout s'obtient sans contact humain : péage, parking, essence, hôtel, achats en ligne, production... De plus, le temps des carrières entières dans l'unique entreprise semble révolu. Enfin, nous n'étions pas dans une économie mondialisée qui met nos ouvriers en concurrence avec des esclaves du tiers monde.
Les crises d'hystérie contre l'école ne servent à rien mais en disent long sur nos peurs. Les sorties sans diplôme touchent tous les pays semblables au nôtre ! Près de 13 % en France, le même taux en Allemagne, 15 % au Luxembourg et même 17 % chez les Anglais ! L'école française doit - bien entendu ! - faire mieux. Mais cesser de s'acharner contre elle serait un bon début car elle est aussi une victime de la crise, en banlieue comme au fond des campagnes.
Sylvain Grandserre