Bisexualité

Sommes-nous tous bisexuels ?
Brigitte Lahaie : On ouvre tout de suite la boîte à questions, Philippe Arlin. Sommes-nous tous plus ou moins bisexuels ou alors est-ce que ce serait une homosexualité déguisée ?
Philippe Arlin : Pourquoi pas une hétérosexualité déguisée?
B.L. : C'est drôle parce qu'on va faire ce duo avec Philippe Brenot lundi et justement Philippe Brenot nous dit, on ne se pose jamais la question du choix de l'hétérosexualité mais on se pose toujours la question du choix de l'homosexualité !
P.A. : Voilà exactement. Moi je n'aime pas le mot bisexuel, je préfère le mot sexuel du coup. Je ne crois pas qu'il y ait besoin de mettre une étiquette de plus. On a déjà hétéro, on a déjà homo, on a bi, on a trans, enfin il y en a à n'en plus finir. Je pense justement que plus on s'approche de la sexualité, plus on comprend qu'elle est multiple. Il faut juste lui laisser son nom « sexualité ». Et peut-être qu'on a une sexualité, qui, si on se l'autorisait, est libre, libre de s'exprimer avec un homme, libre de s'exprimer avec une femme. Peut-être au gré de nos sentiments ou au gré de nos désirs... Je pense qu'il y a quelque chose de plus libre, de possible. Si on regarde les animaux, maintenant que nous n'avons plus le tabou soit disant scientifique qui nous racontait que l'homosexualité n'existait pas dans la nature, maintenant qu'on peut enfin regarder objectivement, on se rend compte que bien souvent la sexualité est juste opportuniste. Mâle ou femelle, après tout, s'il y a du plaisir...
B.L. : Et moi je vais me faire volontairement provocatrice, Philippe Arlin. Parce que c'est toujours un sujet qui m'intéresse beaucoup la bisexualité. Je dirais qu'on ne peut être sûr d'être hétérosexuel que si l'on a un peu testé. Personnellement, moi j'ai un peu testé les femmes. Franchement, il me manque quelque chose, donc je pense vraiment que je préfère les hommes, mais je me fais exprès provocatrice. Ce n'est évidemment pas un conseil que je donne.
P.A. : Oui, mais le fait que vous ayez pu tester prouve qu'il y a dans votre corps une possibilité…
B.L. : Mais oui, absolument !
P.A. : C'est pour cela que j'utilise le mot sexuel, on n'est pas obligé de se définir à travers les gens avec qui l'on couche. On peut être juste un être humain.
B.L. : Vous savez bien qu'on aime se définir et d'autant plus aujourd'hui, on le voit bien sur le plan...euh...par exemple on n'arrête pas de nous parler de laïcité...et en plus on se définit sans vraiment connaitre les définitions que l'on se donne. C'est là où il faudrait un peu plus de...
P.A. : et puis beaucoup rentrent en contradiction donc ce n'est pas grave voilà...
B.L. : Mais sur le plan de la sexualité, absolument, nous sommes des êtres sexués, ça c'est sûr, et...
P.A. : Et après, on a la liberté de l'orienter et d'en faire quelque chose: on l'a vu dans le témoignage de Christelle: ça se construit une sexualité et donc l'orientation sexuelle aussi.
Je suis attirée vers les personnes du même sexe que moi, que faire ?
Brigitte Lahaie : Pascal Neveu, actuellement en couple, je me rends compte que je suis attirée vers les personnes du même sexe que moi, que faire ?
Pascal Neveu : Que faire ? Passer à l’acte ! Non je plaisante. Enfin non je ne plaisante pas, c’est la question du fantasme, est-ce que ça signifie pour autant que l’on est homosexuel ? Non pas forcément, moi je l’entends chez différents couples, c’est la curiosité de découvrir également le corps de l’autre, de le fantasmer. Ça peut également révéler des choses sur notre proportion à apprivoiser notre propre corps, donc l’expérimenter avec un partenaire du même sexe. Je l’ai entendu pas plus tard qu’hier d’ailleurs en consultation, ou j’avais un patient qui est gay et qui me dit « j’ai jamais essayé avec une femme, et j’ai envie, là, en ce moment, je ne sais pas ce qu’il me prend, j’ai envie de coucher avec une femme ». Moi je n’ai pas de conseils à donner par rapport à ça, il fait ce qu’il veut mais ça révèle quelque chose. Ensuite il y a satisfaction à satisfaction, il n’y a pas forcément détournement par rapport à une orientation sexuelle. Ça vous tombe dessus à un moment donné, qu’est-ce qu’on en fait ? On ne peut pas laisser cette réflexion de manière totalement anodine, peut-être qu’il faut expérimenter et on en tire des conclusions.
B. L : Expérimenter ou pas, bien évidemment chacun fait son choix. Ce qui est sûr, c’est qu’aujourd’hui c’est un sujet beaucoup plus souvent abordé, aussi bien l’homosexualité que la bisexualité. Et ce qui est sûr quand on travaille sur la sexualité, c’est que lorsque quelque chose est abordé dans la société lorsqu’on en parle, plus facilement on va fantasmer dessus, on va avoir envie de le faire parce qu’on l’entend.
P. N : Parce que c’est dans l’air du temps, c’est fun, c’est dans l’ambiance.
B. L : Voilà, il y a 30 ans, on ne parlait que d’hétérosexualité, donc ça n’arrivait pas à l’esprit qu’on puisse faire l’amour avec quelqu’un du même sexe, aujourd’hui on en parle donc forcément ça peut venir à l’esprit de certains.
P. N : Oui et puis il ne faut pas oublier non plus que dans le développement de l’individu, il y a une période bisexuelle, notamment chez l’adolescent. Et puis ensuite il va choisir un partenaire homme ou femme, de son même sexe ou du sexe opposé, peu importe, on n’a pas de jugement à avoir par rapport à ça. Après qu’est-ce qui nous tombe dessus ? Là il faut réfléchir.
Peut-on changer d’orientation sexuelle au cours de sa vie? Et la bisexualité est-ce de l’homosexualité déguisée ?
Brigitte Lahaie : Mais tout de suite le wikisex, aujourd’hui Philippe Arlin, peut-on changer d’orientation sexuelle au cours de sa vie?
Philippe Arlin : Alors on peut tout faire au cours de sa vie : changer d’orientation sexuelle, changer de sexualité, changer de partenaire sexuel, tout est possible. Après, la question nécessite un support : pourquoi devrait-on changer d’orientation sexuelle ? Oui ça peut se produire. Si la question c’est : si les personnes qui prétendent avoir changé d’orientation sexuelle mentent, non. Effectivement on peut vivre, et ça c’est déjà produit, une vie de famille tout à fait épanouie, et à l’âge de 40-50 ans, tomber amoureux d’un homme et découvrir une homosexualité. Donc c’est un vrai changement d’orientation sexuelle. Alors après on peut débattre sur : est-ce que cette homosexualité était là avant ? Est-ce que l’on avait une bisexualité, etc. Après ce sont des mots. La réalité des faits c’est que je crois que si l’on ne s’enferme pas dans des aprioris, des présupposés, on peut tout faire. Parce que l’on est bien plus souple et bien plus libre que l’on ne se conditionne soit même par avance.
B.L : Bien sûr. Le désir de toute façon c’est quelque chose sur lequel on n’a pas tellement malheureusement de…
P.A : Pas plus que l’amour ! Amour qui peut amener quand il est très fort, à une pulsion que l’on n’aurait pas imaginée auparavant.
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