Coup de gueule: le business illégal des masseuses chinoises de Pampelonne
Recrutées par des réseaux organisés, elles proposent aux estivants des massages à un euro la minute
Elle se balade, avec une carte des points énergétiques, et ses outils de travail, rangés en vrac dans sa besace. Une fine serviette noire et un flacon d’huile à l’aspect plus que douteux. Lili*, la masseuse chinoise aux sabots en plastique rose et au chapeau de paille, n’a pas eu le temps de poser ses guiboles sur le sable de Pampelonne qu’un touriste l’interpelle déjà. Il veut connaître ses tarifs. « Vingt euros, vingt minutes, et trente euros le massage dos et pieds ».
Un euro la minute, microbes inclus. À ce prix-là, la masseuse au teint buriné n’a même pas besoin d’insister ou de s’inventer des qualités professionnelles. Sous ses mains, les clients vont défiler de façon quasi ininterrompue, jusqu’à la tombée de la nuit. Mais la concurrence est rude, et les tensions parfois vives, avec les services de sécurité des plages privées.
Entre 100 et 200 euros par jour
À Ramatuelle, elles sont une dizaine comme Lili – sans-papiers ou munies de titres de séjour italiens – à proposer leurs services relaxants aux vacanciers. Un job qui leur rapporte entre 100 et 200 euros par jour. Tout juste de quoi payer leur « dette ». Recrutées par des réseaux organisés, dans la province de Shanghai ou à l’Est de la Chine, ces femmes ont confié, avant de se faire expulser en 2009 par la PAF (Police aux frontières), avoir versé entre 10 et 15 000 euros pour quitter leur pays. à l’époque des faits, les enquêteurs marseillais n’avaient pas réussi à définir, avec précision, les contours de cette filière internationale, transitant par l’Italie.
Deux ans après leur coup de filet, le business des masseuses chinoises a repris de plus belle, sur la plage de Pampelonne.
Ces jeunes femmes sont-t-elles toujours prisonnières du même réseau ? « Les autres, je ne sais pas. Moi, j’ai payé 12 000 euros pour venir en France, mais là je suis lib’, je n’ai pas de patron. Je travaille ici deux mois, et je repars à Paris », confie Lili, dans un français très approximatif.
« Concurrence déloyale »
« De toute façon, elles ne vous diront jamais qu’elles sont exploitées par des réseaux. Ce qui est sûr, c’est qu’elles nous font de la concurrence déloyale », dénonce Carol Balligan, présidente de l’Association des exploitants de la plage de Pampelonne.
« Certains plagistes proposent des services de massages, avec des personnes agréées et nous payons cher nos concessions. Les masseuses, elles, se moquent bien de l’hygiène et elles ne déclarent rien. Mais tant qu’elles font ça sur la plage publique, ça ne nous dérange pas ».
À l’inverse, les estivants sont en revanche très sollicités par les multiples vendeurs de beignets, de colifichets, les colleurs de tattoos... et les masseuses chinoises. Un manège que les CRS de Pampelonne surveillent avec attention, dressant régulièrement des PV pour travail dissimulé.
Un délit passible d’une amende pouvant aller jusqu’à 45 000 euros et trois ans d’emprisonnement. Cette épée de Damoclès ne semble pourtant pas les faire fuir. Sur le sable chaud, certains estivants sont de plus en plus excédés par le ballet incessant de ces petites mains, trop attentionnées.
*Son prénom a été modifié.
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