Coup de gueule: Nouvelle étape judiciaire dans l'affaire Mennesson
Le parquet général de la Cour de cassation s'est dit mardi favorable à l'inscription à l'état civil français des jumelles Mennesson.
Retournement de situation dans l'affaire Mennesson, emblématique de la lutte pour la légalisation des mères porteuses en France.
Ce mardi, pour la première fois et contre toute attente, le parquet général s'est dit favorable à l'inscription à l'état civil français des jumelles Mennesson, nées il y a dix ans après une gestation pour autrui réalisée aux États-Unis avec une mère porteuse californienne.
Échaudé par un long combat judiciaire pour faire reconnaître la filiation avec leurs jumelles en France, le couple Mennesson ne veut pas crier victoire avant l'heure. «C'est une étape mais nous ne voulons pas nous réjouir trop vite. Ce qui est important, c'est la décision des juges», tempère Sylvie Mennesson.
«Il n'est pas neutre pour un enfant de 10 ans de vivre en France, avec des parents français, sans avoir la nationalité française. L'avocat général est allé dans ce sens alors que nous redoutions qu'il mette en avant les intérêts supposés de la société et de l'ordre public», commente Me Bruno Potier de la Varde, avocat des Mennesson à la Cour de cassation.
En 2008, la Cour de cassation avait annulé la transcription d'état civil.
«C'est inespéré ! s'est pour sa part émue Me Nathalie Boudjerada, également avocate du couple. C'est une occasion historique pour la Cour de cassation de faire bouger les lignes pour les droits de l'enfant.
Elle pourra rappeler que la norme internationale à vocation à primer sur le droit interne.» Le prochain épisode de cette saga judiciaire aura lieu le 6 avril, date à laquelle la Cour de cassation rendra sa décision.
Reste à savoir si elle suivra l'avocat général qui a demandé d'annuler un arrêt de la cour d'appel de Paris de mars 2010. Ce dernier confirmait la filiation des fillettes avec leurs parents français mais refusait d'inscrire leurs actes de naissance à l'état civil français.
«Le droit à une vie familiale normale»
Mardi, l'avocat général a commencé par évoquer «les campus américains où les ovocytes s'échangent comme des cartes Pokémon dans les cours de récréation» et «l'Inde, où les femmes font de la gestation pour autrui comme on élève des poulets en batterie».
Et estimé dans la foulée qu'il n'était pas inconvenant que la France -où la gestation pour autrui est interdite civilement et pénalement- rappelle «son idée de civilisation et d'humanité». Mais que faire quand cette gestation pour autrui a lieu à l'étranger et que les enfants qui en sont issus vivent en France ?
«Allons-nous laisser dans la clandestinité juridique des enfants qui vivent en France depuis plus de dix ans?, a interrogé l'avocat général. Est-ce une mesure vitale pour la sauvegarde de nos principes que de les confiner dans une situation de sans-papiers?»
Évoquant l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, il a alors défendu le droit de ces enfants à mener une vie familiale normale.
Si la Cour de cassation suit le parquet, son arrêt ferait jurisprudence et sortirait de l'impasse juridique des enfants nés d'une gestation pour autrui pratiquée de manière légale à l'étranger.
Mais le brûlant débat sur les mères porteuses qui divise les philosophes comme les politiques ne sera pas clos pour autant. En outre, la Cour de cassation a examiné mardi une autre demande de filiation pour un enfant né à la suite de gestation pour autrui -cette fois réalisée sans cadre légal.
Dans ce cas, le premier avocat général s'est prononcé contre la retranscription de la filiation.
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