Départementales : "Sarkozy a pris des points, Valls a pris un coup"

Hervé Gattegno a donné son point de vue sur les résultats du premier tour des élections départementales. Il estime que la tentative de Manuel Valls de faire barrage au parti de Marine Le Pen a échoué. En fin de compte, sa campagne a plus profité à l'UMP et au FN qu'au PS.
Vous revenez sur les résultats du 1er tour des élections départementales. C’est la droite qui est en tête, le FN confirme son implantation et le PS est en difficulté. Votre parti pris : Sarkozy a pris des points, Valls a pris un coup. Expliquez-nous pourquoi…
Manuel Valls avait choisi de faire campagne sur le danger du FN dans l’espoir de mobiliser la gauche et de susciter un vote utile en faveur du PS. Il a échoué sur les 2 tableaux. La participation a été plus forte que prévu mais elle a plus profité à l’UMP et au FN qu’au PS. Et puis la cristallisation du rapport de forces à gauche entre le PS et ses alliés – 2 blocs presque égaux – va reposer la question de la ligne politique et affaiblir Manuel Valls. Pour Nicolas Sarkozy c’est tout l’inverse: l’alliance UMP-UDI-Modem est en tête de loin. C’est la validation d’une stratégie et un succès personnel pour Nicolas Sarkozy. Le paradoxe, c’est qu’on a vu Manuel Valls avoir la défaite conquérante, et Nicolas Sarkozy le triomphe modeste – si j’ose dire ils sont à fronts renversés…
Le FN fait un très bon score – son meilleur à une élection locale – mais il n’est pas en tête au 1er tour, comme beaucoup de sondages le prédisaient. C’est un revers pour Marine Le Pen?
En tout cas ce n’est pas un motif de satisfaction. Elle va dire le contraire, bien sûr ; mais Marine Le Pen sait toujours s’attribuer des lauriers qu’elle ne mérite pas (sur ce plan-là au moins, elle ne distingue pas des autres leaders politiques). Le FN espérait être en tête, il ne l’est pas. Il pensait peser largement sur le second tour, ce ne sera pas entièrement le cas puisque le cas le plus fréquent est celui du duel UMP-FN. Cela dit, le FN gagne plus de 10 points par rapport aux cantonales de 2011 et poursuit son enracinement. Disons que c’est mieux qu’un vague succès pour Marine Le Pen… mais il n’y a pas de vague FN.
Manuel Valls a appelé dès hier soir à un rassemblement des républicains pour faire barrage au FN et il s’est félicité d’avoir contribué à limiter l’ascension du FN. Il a raison ?
Manuel Valls pourra toujours dire que s’il ne s’était pas investi autant dans ce combat, le FN aurait été plus haut et le PS encore plus faible. Il est vrai que les socialistes sauvent les meubles dans certains de leurs bastions mais ils sont éliminés dans un quart des cantons – et la configuration du second tour leur promet une lourde défaite dimanche prochain. C’est vrai aussi que le total des voix de gauche est presque égal à celui de la droite mais ce n’est pas seulement le fait d’un désaccord tactique : cette division exprime une divergence de fond, sur la politique qui est menée par le gouvernement. Donc oui, la gauche résiste. Mais elle résiste surtout à Manuel Valls…
Les dirigeants du FN appellent à la démission de Manuel Valls voire à une dissolution de l’Assemblée nationale. A votre avis, que peut faire François Hollande?
Dans l’immédiat, il va observer les chiffres et se faire assez discret – il va devoir retourner voter en Corrèze mais le département est perdu pour le PS. A part ça, François Hollande a annoncé d’avance qu’il ne changerait ni de premier ministre ni de ligne politique. Mais il va tout faire pour convaincre les Verts de revenir au gouvernement et pour rejeter sur le Front de gauche la responsabilité des divisions. De ce point de vue, la défaite qui se profile peut être utile pour lui : elle montre que sans accord dès le 1er tour, la gauche est éliminée – et c’est évidemment à 2017 qu’il pense. François Hollande va entrer dans une nouvelle phase : après l’esprit du 11 janvier, il va brandir la menace du 21 avril…
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