Le discours que j'avais prononcé au Parlement des Banlieues...

Plus que jamais d'actualité...
Alors je sais c'est un peu long mais ce discours répond à bon nombre d'entre vous (Fred, Emmanuelle, Sow, Denis, Djamel, Clovis, Patrick, ...) qui m'ont contacté par mail.
C'était le 26 novembre dernier (Parlement des Banlieues - "Agir pour la citoyenneté"), nous étions tous réunis autour de Karim Zéribi.
En premier lieu, je voudrais exprimer ma gratitude envers mon ami Karim pour m?avoir fait cet honneur d?être parmi vous aujourd?hui.
En effet, je vois dans cette salle cette France dans laquelle je me reconnais totalement, une France plurielle, remplie d?énergies et de talents qui, malgré de prétendus handicaps, prouve que la réussite n?est pas le domaine réservé et exclusif de quelques élites autoproclamées et de leur progéniture.
J?en profite pour saluer, au passage, cette formidable initiative ainsi que les efforts quotidiens déployés par A.C.P. pour aider les jeunes issus des quartiers populaires à trouver, eux aussi, leur place dans la société.
Il y a sans aucun doute, dans cette salle, des femmes et des hommes, jeunes ou moins jeunes, qui pensent, à juste titre, qu?ils disposent d?une vraie légitimité pour intervenir dans ce débat.
Toutefois, et précisément parce que l?un des moteurs qui nous réunit est la lutte contre l?exclusion, sous toutes ses formes, je pense, comme Karim, qu?il était intéressant de vous livrer le témoignage d?un « ancien jeune », issu des banlieues (à la frontière du 9 ? 3 et du
9 ? 4?), né « tout blanc » (dois-je m?en excuser ?...) au sein d?une famille modeste, pour ne pas dire pauvre.
Mon parcours a été exactement le vôtre, avec la même somme d?exclusions, à l?exception peut-être (je dis bien « peut-être »?) de la couleur de ma peau.
Or, je suis en mesure d?affirmer, à travers mon propre parcours comme de bien d?autres ici dans cette salle, qu?il est parfaitement possible de réussir « sa » vie, malgré ses handicaps (quels qu?ils soient?), pourvu que l?on ait la volonté de s?en sortir.
Devenu très rapidement chef d?entreprise, il y a bien longtemps, après avoir « claqué la porte » de l?Education Nationale au terme de la « pseudo révolution soixante huitarde », je suis aussi devenu très vite l?une des références incontournables de ma profession mais surtout, l?un de ces entrepreneurs qui, sans attendre l?élaboration d?une « charte de la diversité », utilise et emploie depuis bien des années des jeunes issus des quartiers, quelle que soit leur origine et leur parcours scolaire?.
L?exclusion, elle est comme la prose de Monsieur Jourdain : elle se décline au quotidien, sur tous les temps et sur tous les continents, chez l?homme comme chez l?animal.
En témoigne cette anecdote, rapportée par un grand quotidien, qui relate l?histoire de ce bébé phoque, né « tout blanc », sur la banquise, alors que ses congénères naissent généralement gris. Rejeté par ses propres parents et la communauté des phoques, il fut miraculeusement sauvé par une famille (un papa et une maman phoques?) qui, passant outre son handicap (peut être avait-elle signé la fameuse « charte de la diversité » ?), entreprit de le recueillir, de le nourrir et de l?élever jusqu?à ce qu?il finisse (Dieu est grand ! ?) par retrouver sa couleur naturelle.
Moralité : Après que certains aient prétendu que les phoques étaient homosexuels (encore une exclusion?), voilà qu?ils seraient aussi racistes?
Vous avez dit « racisme » ?... Justement, parlons-en : combien d?entre vous savent que derrière la définition première donnée à ce mot abominable, il en existe une seconde, beaucoup plus large, qui fait état d?une « attitude d?hostilité systématique à l?égard d?une catégorie déterminée de personnes » ? Le racisme envers les jeunes (ou les « vieux »?) entre dans le cadre de cette définition, tout comme la racaille : « Couche la plus basse de la société, considérée comme la plus méprisable ; populace » selon la définition première, « ensemble d?individus méprisables » selon une vision plus récente (définitions tirées du Petit Larousse 2001).
Ainsi, comme on le voit, ce n?est pas tant la couleur, l?origine, la race qui, pour une large catégorie d?individus, posent problème : ce sont nos différences, quelles qu?elles soient.
Peu instruits (on serait tentés de leur trouver quelques excuses?) ou, au contraire, très cultivés (ceux-là n?ont aucune excuse?), tous ont en commun, comme la communauté des phoques, de ne pas souffrir la moindre différence. C?est ce que j?ai appelé, dans mon dernier livre : « la république des clones ou la dictature ˝Canada Dry˝? ».
Ainsi, moi-même qui, comme chacun peut le constater, suis né « tout blanc », blond aux yeux bleus (voilà qui devrait faire plaisir à Jean-Marie le Pen?), homme libre et totalement « inclassable », je suis souvent qualifié par mes pairs d?iconoclaste et par nos « pseudo élites » de dangereux au seul motif que ni les uns ni les autres ne supportent que l?on puisse vivre, penser, rêver, respirer autrement qu?ils ne le font eux-mêmes.
Or, pour moi, c?est clair et depuis mes premier pas : les différences, nos différences, c?est précisément ce qui fait la richesse de l?humanité, à tous points de vue.
Des propositions ou réponse collectives, qui relèvent du politique
- éradiquer l?économie souterraine, notamment le trafic de stupéfiants, qui gangrène les quartiers
- "casser" les ghettos : ni bande de Gaza, ni Cisjordanie sur le territoire de la République
- introduire partout avec force la mixité sur la base de l?observation stricte des lois de la République (respect et devoirs) et de l?égalité des chances, à compétence égale
- priorité à l?accès sans condition à l?éducation, dès le plus jeune âge (crèches, école maternelle?) pour les enfants issus des quartiers populaires ou appartenant aux familles les plus modestes.
NOTA : Selon un récent rapport de la Cour des comptes, 20 000 enseignants ne seraient jamais face à des élèves. Qu?attend-on pour « réquisitionner » 10 000 d?entre eux (ce n?est jamais que la moitié?) et les affecter, prioritairement, auprès des enfants en difficulté ?
Voilà une mesure facile à mettre en ?uvre (s?il n?y avait les « sacro-saints » syndicats?) et qui ne coûterait rien à la collectivité.
- lutter à tout prix contre l?oisiveté (« la mère de tous les vices », dit le proverbe?).
- recruter en masse des travailleurs sociaux et éducateurs spécialisés, très professionnels, expérimentés et motivés
- développer le secteur associatif, à la condition expresse de contrôler efficacement, l?utilisation pertinente des moyens et de mesurer les résultats obtenus au regard investissements consentis (humains/matériels)
- donner systématiquement la parole aux jeunes
Enfin, il faut « tordre le cou » au chômage et à la désespérance : il faut « po-si-ti-ver » !... Ce qui veut dire, en clair, qu?aucune de ces mesures ne saurait donner des résultats durables dès lors qu?elles ne s?inscriraient pas dans une politique économique moderne et réformée, productrice de richesses et, par voie de conséquence, d?emplois.
4.2 Des réponses individuelles : l?école de la vie et de la responsabilité?
Ce sont, à mes yeux, les plus efficaces car elles ne coûtent pas cher et les résultats obtenus se mesurent souvent très rapidement : je veux parler ici de l?investissement personnel de chacun.
Le meilleur service que l?on puisse rendre à un jeune, c?est de l?inviter à prendre en charge son destin : « Aide-toi, le ciel t?aidera? » dit le proverbe ou, « la chance sourit aux audacieux? ». Et qu?on en finisse avec la « dictature du diplôme ». Car enfin, si l?école n?a pas réussi à se rendre suffisamment attractive pour un certain nombre de jeunes, il est absurde sinon criminel de laisser croire qu?ils ne sauraient trouver une place de choix dans la société : celui qui a raté "le train de l?école" pourra toujours prendre en marche "le train de la vie", un train qui passe chaque jour, à l?aube?
De quel côté se trouve le handicap ? Ceux qui nous gouvernent, depuis si longtemps, de droite comme de gauche, ne sont-ils pas surdiplômés ?
Comment expliquer alors que le Parlement des banlieues en soit encore, à sa sixième édition, à actionner les mêmes signaux d?alarme quand les « Restos du c?ur » fêtent (doit-on parler de fête ?...) leur vingtième anniversaire ? Au secours ! Coluche, reviens?
Sur mon C.V., négligeant de mentionner les modestes études supérieures que j?ai laborieusement effectuées, à la rubrique « formation », j?inscris toujours avec malice : « Autodidacte confirmé ». En fait, de tout ce que j?ai appris ou non appris, au collège, au lycée ou à l?université, le meilleur je l?ai appris au contact de la vraie vie : c?est ce que d?aucuns appellent la formation « sur le tas » et que je préfère, de loin, nommer « l?école de la vie ».
L?école de la vie, ce n?est pas seulement une accumulation de connaissances encyclopédiques, souvent parfaitement inutiles, c?est d?abord et surtout la connaissance et la compréhension de l?autre.
Non, il n?y a pas de fatalité de l?échec et ce quels que soient les obstacles que la vie ou le destin s?acharnent à glisser sous vos pieds : telle est mon expérience, une expérience partagée par une multitude de « célèbres anonymes », de toutes origines, qui ont accompli leurs rêves et réussi leur vie, à force de volonté et de courage, sans jamais rien attendre du « système », un système qui, curieusement, ressent comme une injure personnelle la réussite de l?autre : c?est ça l?exclusion ! ?
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