Droite de vote aux étrangers: cette fois, c’est du sérieux

Revoilà le droit de vote des étrangers aux élections locales. Le sujet divise la classe politique et les Français. Sauf que cette fois-ci ce n’est plus une idée en l’air. C’est du sérieux. La proposition qui va être examinée au Sénat a de vraies chances d’aboutir.
On ne le souligne pas assez. Cette proposition de loi constitutionnelle a déjà été adoptée par l’Assemblée nationale. C’était le 3 mai 2000, sous le gouvernement Jospin. La droite s’y était alors opposée au Sénat. Le Sénat est à gauche depuis le mois de septembre et la proposition de loi poursuit donc, onze ans plus tard, son petit bonhomme de chemin. Elle va probablement être adoptée en commission des lois mercredi prochain et en séance le 8 décembre. Et puisqu’il s’agit d’une loi constitutionnelle, elle n’a pas besoin de repasser devant l’Assemblée. Cette proposition de loi pourrait donc être adoptée…en théorie.
Un référendum ?
Puisqu'il s'agit d'une proposition de loi constitutionnelle, issue des élus, celle-ci doit être soumise à référendum par Nicolas Sarkozy. Les débats juridiques vont bon train chez les élus et les experts en droit constitutionnel. Le chef d'État peut-il rester sourd à la position du Parlement en refusant d'organiser un référendum? En droit, en principe, le présent de l’indicatif a valeur impérative, mais en 1986, François Mitterrand avait refusé de signer les ordonnances du gouvernement de Jacques Chirac relatives aux privatisations et à la flexibilité du temps de travail.
Quelle est la vraie position de Nicolas Sarkozy ?
Nicolas Sarkozy est-il pour le droit de vote pour les étrangers aux élections municipales ? Ça dépend de quel Nicolas Sarkozy nous parlons. Celui d’aujourd’hui explique que « le droit de voter et le droit d’être élu dans nos territoires doit demeurer un droit attaché à la nationalité française. Il n’y a rien de choquant à ce que les électeurs et les élus des territoires de France soit français ». Son de cloche différent chez le Nicolas Sarkozy candidat en 2007 : « J’ai considéré que le débat sur le droit de vote aux élections municipales pour des étrangers présents depuis dix ans sur le territoire national, respectant nos lois, payant leurs impôts et ayant des papiers devaient être ouvertes. J’y suis favorable ». Et le Nicolas Sarkozy de 1998 disait encore autre chose : « Est-ce que je suis pour le droit de vote des immigrés aux élections locales ? Ma réponse est sans ambiguïté, je suis contre le droit de vote aux immigrés ».
2,4 millions de personnes potentiellement concernées
Bref parle-t-on du vrai Nicolas Sarkozy, de ses convictions intimes et personnelles ? Cet homme-là est pour. Ou du Nicolas Sarkozy qui fait de la politique qui lui est contre ? En 1981, sur le débat sur l’abolition de la peine de mort, François Mitterrand l'« homme » avait pris le dessus sur François Mitterrand « politique » qui savait que les Français étaient contre. C’est sans doute cela aussi la politique. Prendre des risques pour faire vivre ses convictions. On verra quel choix fera Nicolas Sarkozy.
L’enjeu de cette idée, il est simple. Selon les derniers chiffres du recensement, la France compte 3,7 millions d'étrangers, soit 5,8% de la population totale, parmi lesquels 1,3 million de ressortissants de l'Union européenne qui ont déjà obtenu le droit de vote et d'éligibilité aux élections municipales et européennes dès 1998. Environ 2,4 millions de personnes sont donc potentiellement concernées par la proposition de loi qui prévoit que ces nouveaux électeurs ne pourront pas exercer les fonctions de maire ou d'adjoint, ni participer à la désignation des électeurs sénatoriaux et à l'élection des sénateurs.
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