Epilation intégrale
Tout doit disparaitre
En quelques années, la surface de notre maillot a gagné de nombreux centimètres : de classique, ce dernier est passé par le ticket de métro pour finir complètement à poil. Enquête sur une mode qui séduit de plus en plus d’adeptes.
1971. Jean Ferrat nous susurre tendrement à l’oreille qu’il nous aime « pour (nos) toisons de ronces douces qui (le) retiennent, (le) repoussent quand (ses) lèvres vont s’y noyer ». 2009. Changement de ton radical avec les paroles décomplexées de Ma Garden Party, (1) qui reflètent une réalité tout autre : celle d’un maillot parfaitement épilé parce que « quand c’est court, c’est plus classe, plus glamour devant la glace ». Force est de constater qu’en l’espace de quelques années, notre mont de Vénus s’est déplumé pour devenir presque aussi glabre qu’une peau de bébé.
Bien que fasciné par cette profonde mutation, le chercheur et auteur Jean Da Silva (2) peine à expliquer pourquoi cette tendance a pris un tel essor : « La mode a sa propre autonomie, il faut l’admettre. Comme pour la minijupe, je ne pense pas qu’il existe de raisons causales permettant d’expliciter le point de départ de ce phénomène, pas plus qu’il n’est possible de comprendre objectivement l’engouement des femmes pour ce grand débroussaillage. » Et de citer pêle-mêle quelques pistes de réflexion parmi lesquelles la « dégénitalisation de la sexualité » (qui va de pair avec le développement des pratiques buccogénitales), la fin du tabou de la masturbation féminine ou l’appropriation de la sexualité par les femmes qu’il rattache à l’utilisation des sex-toys. Beaucoup plus critique, le sexologue, médecin et auteur de best-sellers Gérard Leleu (3) voit derrière l’épilation intime la pression des hommes et l’influence croissante du porno : « Au lieu d’assumer leur côté sauvage, explique ce fervent opposant au tout-imberbe, les femmes se laissent dominer par la “mâle peur” de leur compagnon, quitte à transformer leur sexe en poulet plumé ! »
(1) Titre chanté par la chanteuse Simone Elle Est Bonne. Voir le clip sur www.magardenparty.com
(2) Chercheur au Centre d’études et de recherches en arts plastiques. Son essai, Du velu au lisse : histoire et esthétique de l’épilation intime, est paru aux Éditions Complexe en mars 2009.
(3) Son essai, L’Art de bien faire l’amour : le guide des jeunes amoureux et de ceux qui veulent rester jeunes et amoureux, est paru aux Éditions Leduc.s en avril 2010.
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