Ce qu'il faut savoir sur la visite secrète mais pas très discrète de Benyamin Netanyahou en Arabie Saoudite

EXPLIQUEZ-NOUS - Tous les matins à 7h50, Nicolas Poincaré propose sur RMC une chronique pédagogique mais personnelle sur une actualité du jour. Aujourd'hui, il nous a éclairé sur la visite secrète de Benyamin Netanyahou, premier ministre israélien en Arabie Saoudite.
Le Premier ministre israélien se serait rendu dimanche en Arabie Saoudite. Il aurait participé à une rencontre à trois avec le prince héritier saoudien et le chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo.
L'Arabie Saoudite affirme qu’elle n’a pas eu lieu, et pourtant le premier ministre Israélien s’est bien rendu dimanche en Arabie Saoudite. La presse israélienne l’affirme en donnant tous les détails du voyage.
Dimanche, vers 19 heures, Benyamin Netanyahou a emprunté un jet à Tel Aviv et il a pris la direction du sud, sans déposer de plan de vol. Il a rejoint les bords de la mer rouge, survolé le territoire égyptien puis a disparu des radars en arrivant au nord de l’Arabie Saoudite. Il est resté deux heures sur place. Un voyage absolument secret, même le ministre de la Défense israélien Benny Gantz n'était pas au courant. Seul le patron du Mossad était dans l’avion. Il s’appelle Yossi Cohen, c’est le maître espion favori de Benyamin Netanyahou qui voudrait en faire son successeur. C’est surtout l’homme du rapprochement d'Israël avec les pays arabes. Et ce voyage est son succès.
Pourquoi est-ce que c’est un événement ?
Parce que l’Arabie Saoudite, c’est une des grandes puissances de la région, c’est la terre sainte qui abrite les plus grands lieux de l’Islam à commencer par la Mecque. Si ce géant devait normaliser ses relations avec Israël, ce serait au moins aussi important que lorsque l'Egypte avait fait la paix avec Israël il y a 40 ans. Et ce serait bien sûr vécu comme une trahison par les Palestiniens.
La rencontre aurait eu lieu en présence du secrétaire d'État américain. Autrement dit le ministre des affaires étrangères de Donald Trump, Mike Pompeo. Il était en Arabie Saoudite pour la réunion du G20 qui vient de s’y tenir. Il ne le dit pas, mais il sait qu’il n’est plus en poste pour très longtemps. Il cherche donc à achever la grande fierté de la politique étrangère de Donald Trump: ce rapprochement entre Israël et des pays arabes.
Ce fût donc une rencontre à trois donc, avec Pompeo, chrétien évangélique fervent, Netanyahou, petit-fils de rabbin, et le prince héritier Saoudien Mohammed Ben Salman, musulman sunnite, gardien des lieux saints de l’Islam. Ce qui unit ces trois hommes, c’est une seule chose. Leur haine et leur crainte de l’Iran, puissance ennemie, chiite et potentiellement nucléaire.
Dans cette affaire, c’est le Saoudien qui prend le plus de risque. S’il se confirme qu’il a serré la main de l'ennemi Israélien, il sera vu comme un traître dans une grande partie du monde arabe et dans son propre pays aussi. Même si personne n’osera le dire, en Arabie Saoudite par peur de se faire couper la tête.
Mohammed Ben Salman n’a que 35 ans, son père lui a confié les clefs du royaume il y a trois ans. Il s’est d’abord imposé par une grande purge. Il a fait arrêter tous les princes et les milliardaires du pays, les a enfermés à l'Hôtel Ritz de Riad jusqu'à ce qu’il fasse allégeance et qu’ils paient des milliards de dollars à l'État.
"MBS", c’est son surnom, essaye de passer pour un moderne, en autorisant l’ouverture de cinémas ou en permettant aux femmes de conduire et de diriger une entreprise. Mais dans le même temps, il emprisonne et torture les militantes féministes. Et sur la scène internationale, il tente de faire oublier l’assassinat de l’un de ses opposants Jamal Khashoggi, coupé en morceaux au consulat d’Istanbul. Voilà qui est l’homme fort de l'Arabie Saoudite que Netanyahu est allé rencontrer sur ces terres.
Une rencontre qui a eu lieu à Néom, un projet de ville du futur
Ne cherchez pas Néom sur une carte. C’est une ville qui n’existe pas encore. Tout au nord de l’Arabie Saoudite, au bord de la mer rouge. À quelques dizaines de kilomètres seulement de la Jordanie et d'Israël. Et a porté de pont de l’Egypte. C’est un projet fou de "MBS". Une ville de 26.000 km carrés, c'est-à-dire grande comme la Bretagne. Avec un million d’habitants pour commencer.
On s’y déplacerait en taxi volant. Un complexe touristique au sud nommé Amaala, serait le nouveau centre mondial de l’ultra luxe. Qui relèguerait Dubaï au rang de bourgade de province. L'alcool et les bikinis y seraient même autorisés. 500 milliards de dollars sont provisionnés pour ce projet pharaonique. Qui comprend notamment la création du plus grand musée d’art contemporain du monde à côté duquel le Louvre d’Abu Dhabi ressemblerait à une MJC de banlieue. Avec une île de rêve, pour accueillir les artistes qui pourront vivre et créer sur place.
Pour l’instant il n’y a que du sable et des Bédouins qui sont en train de se faire expulser. Cette ville devrait être inaugurée en 2030. Si le pays n’est pas ruiné d’ici là. Puisqu’on est au pays de l’or noir et que personne ne sait ce que vaudra le pétrole dans les années qui viennent.
Votre opinion