Le guest du 04/10 : Jean-Louis Fournier
Ecrivain et cinéaste, le complice de Desproges, Jean-Louis Fournier a toujours fait rimer humour avec sincérité.
Il est l’auteur de nombreux ouvrages parmi lesquels Grammaire française et impertinente, Il a jamais tué personne, mon papa, Le CV de Dieu, Poète et paysan.
Il a reçu le prix Femina en 2008 pour Où on va, papa ?, où il évoque avec talent et émotion le handicapé de ses deux fils.
Nous le recevons à 15h pour son dernier livre tout aussi émouvant.
Veuf (éd. Stock, à paraître demain)
« Je suis veuf, Sylvie est morte le 12 novembre, c’est bien triste, cette année on n’ira pas faire les soldes ensemble. Elle est partie discrètement sur la pointe des pieds, en faisant un entrechat et le bruit que fait le bonheur en partant. Sylvie m’a quitté, mais pas pour un autre. Elle est tombée délicatement avec les feuilles. On discutait de la couleur du bec d’un oiseau qui traversait la rivière. On n’était pas d’accord, je lui ai dit tu ne peux pas le voir, tu n’as pas tes lunettes, elle ne voulait pas les mettre par coquetterie, elle m’a répondu je vois très bien de loin, et elle s’est tue, définitivement. J’ai eu beaucoup de chance de la rencontrer, elle m’a porté à bout de bras, toujours avec le sourire. C’était la rencontre entre une optimiste et un pessimiste, une altruiste et un égoïste. On était complémentaires, j’avais les défauts, elle avait les qualités. Elle m’a supporté quarante ans avec le sourire, moi que je ne souhaite à personne. Elle n’aimait pas parler d’elle, encore moins qu’on en dise du bien. Je vais en profiter, maintenant qu’elle est partie. »
Jean-Louis Fournier souhaitait mourir le premier, il a perdu. Sa femme partie, il n’a plus personne avec qui parler de lui. Alors pour se consoler, ou pour se venger, en nous parlant d’elle, il nous parle de lui.
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