L'enseignement privé séduit de plus en plus: "Le public c'est terminé, je suis allé de déception en déception"

Selon des chiffres du Secrétariat général de l'enseignement catholique, qui représente 95% du privé sous contrat, le nombre d'élèves scolarisés dans le privé a augmenté de 0,6%. L'engouement pour l'enseignement privé se confirme: en 9 ans, il a gagné 93.000 élèves. Qu'est-ce qui pousse de plus en plus de parents à enlever leurs enfants du public? Elément de réponse avec Karine, maman de deux élèves du privé.
Karine a 44 ans, elle est mère de deux enfants qu'elle a placés dans des écoles privées.
"Mon mari et moi avons été en école privée toute notre vie. Donc on avait déjà une bonne idée de ce que c'était. Quand on est arrivé dans notre petit village du Lot-et-Garonne, les écoles maternelles et primaires étaient publiques. On s'est dit que pour une petite école de village, pourquoi pas y mettre nos enfants. Et puis on est allé de déception en déception.
Ça a commencé en primaire. Le plus jeune de mes fils est dysorthographique. Il n'était pas du tout adapté… Enfin c'est plutôt l'école qui n'est pas du tout adaptée à lui. Il n'a pas du tout été pris en considération pendant ses années en primaire. Mon fils aîné était dans la même école. Il a eu un enseignant en CM2 qui était délégué syndical. Le jour de la rentrée, il n'était pas là. Il n'était dans sa classe qu'une journée et demi par semaine. Ça plus les grèves, de l'école, de la cantine… On a mis les deux dans un très bon collège privé juste à côté.
"Dans la société dans laquelle on vit ça n'a pas de prix"
C'est le jour et la nuit. La problématique du plus jeune a été prise en considération. Les profs ont été très présents, il y a eu beaucoup de dialogues, de rencontres. L'enseignement y est beaucoup plus sérieux. Le choix a été facile à faire. Financièrement? Dans la société dans laquelle on vit ça n'a pas de prix. Si l'école avait été encore plus chère, on aurait payé plus cher en faisant des sacrifices sur autre chose. Pour l'école privée en demi-pensionnaire, je payais 45 euros par mois. Auxquels il fallait ajouter quatre euros par jour pour la cantine.
Ensuite, nous avons déménagé au Pays basque. Mon fils était en terminale STI2D architecture et construction. Aucune école privée ne pouvait l'accueillir. Donc a fait des demandes d'affectation dans le public. Il n'a été accepté dans un lycée que quatre jours avant la rentrée. Et pas du tout dans sa branche. En plus il n'y avait plus de place en internat. Donc pendant quelques jours on faisait 30km le matin pour aller le déposer et 30km le soir pour aller le chercher.
"Maman ce n'est pas possible, je ne peux pas rester ici"
Au bout de quelques jours, mon fils aîné m'appelle. Il me dit 'maman ce n'est pas possible, je ne peux pas rester ici. Il n'y a pas d'étude surveillée. On est dans nos chambres, si on veut travailler on travaille. Mais là, ils jouent tous aux cartes'. C'était l'année du bac, le laisser là ce n'était pas possible. J'ai rappelé son ancien lycée privé qui a fini par le prendre. Mais du coup, mon fils est à 300km de la maison et je ne le vois que tous les 15 jours. Ça me coûte beaucoup plus cher: 2500 euros l'année.
Nos amis autour de nous ont mis leurs enfants dans le privé aussi. Pour la majorité ils en sont ravis. Par contre, j'ai une amie qui a remis ses deux enfants dans le public. Ce n'était pas une question d'éducation, mais de moyens. Elle ne pouvait plus assurer le paiement pour deux.
La société est demandeuse de bons élèves. Il n'y a que par ce moyen qu'on peut réussir à les faire réussir. Effectivement, il y a certaines bonnes écoles publiques. Mais pas toujours. Et ceux qui sont obligés de laisser leurs enfants dans le public, je trouve ça très dommage. Surtout pour les enfants. Il y a un bon coup de pied à mettre dans la fourmilière de l'éducation nationale. Il faut retrouver des professeurs qui ont la vocation, des gens qui s'investissent. Ils n'ont pas la culture du résultat. Pour moi le public c'est terminé, je ne veux plus en entendre parler".
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