"Ce ne sera pas la guerre civile mais ça pourrait y ressembler": pourquoi la crise du Covid-19 peut déclencher un conflit générationnel

FACE A VOUS - Les seniors et les plus jeunes, ont l'impression que chaque catégorie d'âge ne se rend pas compte des difficultés rencontrées par chacun. Vous étiez nombreux au 32.16 pour vous exprimer sur ce sujet.
La crise du Covid-19 va-t-elle à l'origine d'une guerre des générations? Plus d'un français sur deux (56%) craint un conflit de générations dans les mois qui viennent selon un sondage Odoxa pour Le Monde publié mardi.
Cette part monte même à 60% pour les 18-34 ans. Et alors que 94 % des décès du Covid-19 concernent des personnes de 65 ans ou plus, 7 français sur 10 de cette catégorie d'âge ont le sentiment que les plus jeunes ne se rendent pas compte des difficultés qu’ils rencontrent. Et à l'inverse, près de 6 jeunes sur 10, (57% des 18-34) en pensent autant à propos des plus âgés.
"On rate plein de choses sur notre vie"
C’est notamment le cas de Lila, qui évoque des journées qui se ressemblent, sans découverte et une jeunesse moins agréable que celle de ses parents, avec un sentiment de gâchis:
"Normalement on est censé sortir. Nos parents nous racontent ce qu’ils ont fait dans leur jeunesse et nous on n’a pas vraiment la chance de faire ça, c’est un peu dommage parce qu’on rate plein de choses sur notre vie".
Une envie de fête à laquelle succombe parfois Victor. Il vit chez ses parents qui ne voient pas forcément ses sorties d'un bon œil : "Ils me mettent en garde tout le temps, et ça créé des conflits".
Certaines personnes âgées comprennent ce manque, ils sont même 80% à penser que les jeunes sont les oubliés de la crise. A 90 ans, Simone compatit: "Ils sont jeunes ils ont envie de sortir et de tout faire, ils ont raison on aurait fait pareil à leur âge".
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"Pas la guerre civile... mais ça pourrait y ressembler"
Pourtant la rupture entre les générations se creuse bel et bien d'après le sociologue Thierry Calvat, cofondateur du cercle vieillesse:
"Ce n’est pas la guerre civile mais ça pourrait y ressembler. On aura des jeunes de plus en plus agressifs parce que contraints dans l’exercice de leur liberté, et des personnes âgées qui pourraient se retrouver également plus agressives pour faire valoir leurs droits".
Selon lui, l'un des risques est aussi la perte de transmission, essentielle au lien intergénérationnel:
"Il y a un vrai risque de décrochage. Ce qui fait tout le sens de l’inter-génération c’est la transmission. Ce qui peut arriver aujourd’hui, c’est que l’avenir des jeunes est vraisemblablement moins bon que celui que les plus âgés ont eu".
"On sacrifie une génération pour en sauver une autre qui n’en a rien à faire"
Mais pour Philippe un auditeur de RMC, entre les deux générations, "on sacrifie une génération pour en sauver une autre qui n’en a rien à faire", déplore-t-il. Il assure dénonce la présence de personnes âgées faisant leurs courses aux heures de pointe et le week-end.
"Laissez la place aux gens qui travaillent, sans déconner!", clame-t-il. Mais Philippe en veut aussi aux adolescents: "Ils sont tout le temps sur les réseaux sociaux, ils sont enfermés dans leur chambre du soir au matin".
De son côté, Robert un autre auditeur balaye d’un revers de la main l’image d’une jeunesse heureuse des seniors d’aujourd’hui:
"Il faut arrêter de dire que toutes les personnes âgées ont vécu les 30 Glorieuses. J’ai commencé à travailler à 14 ans. J’ai été placé parce que c’était la sortie de la guerre, j’ai été libre à 18 ans. On nous dit de sortir de chez nous mais on n’avait pas le chômage nous à l’époque, on sortait pour bouffer, on allait piquer dans les champs pour se nourrir. Oui il y a un conflit", s’inquiète-t-il.
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