Les débats politiques à la télévision trop ennuyeux? "Ce sont les candidats qui font l'originalité..."

Le troisième débat de la primaire à gauche, qui a lieu ce jeudi soir, s'annonce, comme les autres, ennuyant. Pour Jean-Jacques Amsellem (grand réalisateur de télévision), ce n'est pas la réalisation qui est à mettre en cause face à ce manque de dynamisme, mais plutôt un trop grand nombre de débats dans un laps de temps restreint.
Jean-Jacques Amsellem, réalisateur:
“Objectivement, tous les débats que j'ai pu voir étaient bien fait. Il n’y avait rien à revoir sur la forme. Les pupitres, les temps de paroles de chaque candidat, les écrans... Tout était restitué. Ces codes-là étaient bien faits et toutes les chaînes l’ont bien retranscrit, donc la mise en forme était quand même présente. Tout était nickel.
Il y a eu trois débats pour la primaire de droite. Deux mois après, il y en a de nouveau trois pour la primaire à gauche. Il y a peut-être eu une petite lassitude des gens à un moment donné.
J’ai eu l’impression que, comme les candidats de la primaire de la droite ouvraient le bal, ils ont eu la primeur des duels et de la nouveauté. Il y avait un ancien président de la République, deux anciens Premier ministre. Ça donnait une intensité et une dramaturgie. Celle de gauche, avec le président de la République qui ne se représente pas…
“Le fond prend le pas sur la forme”
Les réalisateurs qui ont été choisis sont trois très bons réalisateurs. Il y a des impératifs, des codes à respecter. Lorsque j’avais réalisé le premier débat des socialistes de la primaire en 2011, il y avait quelques impératifs, quelques codes à trouver et à respecter. On a un angle de caméra, chaque candidat a son gros plan, son fond de gros plan. La valeur de plan doit être identique à tout le monde.
Nous sommes censés, en tant que réalisateurs, ne pas favoriser l’un plus que l’autre. c’est ce que j’ai ressenti. Après, c’est le fond qui prend bien évidemment le pas sur la forme.
Personnellement, je n’aurai pas mieux fait. Nous sommes surtout tributaires. Les candidats ont un peu leur mot à dire, et leurs desiderata. Ce sont eux qui font l’originalité ou la forme du débat.
En fonction du casting, des invités, on arrive à un rythme. Les journalistes donnent aussi leur tempo. C’est toute une alchimie une émission de télé, toute une espèce de rythme que les intervenants doivent donner. S’il n’y en a pas, c’est plus délicat.
“Les élections américaines sont des shows”
En comparaison, les élections américaines sont des shows qui dépendent des personnages. Ils ont des moyens très importants, c’est réalisé à une dimension américaine. Quand vous regardez les César ou les Oscar, la mise en image est différente, le casting est différent. Il y a des codes qui sont différents dès le départ. C’est difficile de comparer, comme si vous compariez la finale d’un championnat d’Europe à la finale du Super Bowl. Il y a trois cents coupures publicitaires, peut-être 70 caméras sur l’un et 30 sur l’autre.
Le côté répétitif a peut-être été une des causes d’une audience plus faible et d’un désintéressement des téléspectateurs. Pour moi, la forme n’a rien à voir avec le rythme d’une émission comme un débat, puisqu’elle est donnée par les candidats.
La réalisation est au service du produit et du contenu. Si c’est un peu mièvre, un peu langue de bois et que rien n’en sort, on reste sur cette impression-là."
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