L'invité du 17/08: Odile Buisson
Odile Buisson
Odile Buisson est gynécologue obstétricienne à l’hôpital de Saint-Germain-en-Laye. En 2009 et 2010, elle a réalisé les premières échographies du clitoris et du point G.
Chercheurs et médecins s’interrogent : le point G n’existe pas ou les mauvais amants sont légion ?
“Vous vous rendez compte, monsieur, qu’il n’existe aucune formation à la sexologie à l’université ? Elle est juste une spécialisation en fin d’études, facultative, même en gynécologie. Quant aux recherches médicales sur l’anatomie du clitoris, ou le point G, elles sont toutes récentes, et ne trouvent pas de financement.”
Odile Buisson est en colère. Femme rousse de 40 ans, elle a réalisé en mai 2009 une première française : une sonographie complète en 3D d’un clitoris.
Nous sommes au congrès annuel de gynécologie à l’espace Cardin, où elle présente ses extraordinaires images. Ce jour-là, tous, médecins, psychologues, journalistes des magazines féminins, débattent passionnément.
Car selon une étude du King’s College de Londres, publiée en début d’année, le fameux point G, un des endroits essentiels de la jouissance des femmes d’après le docteur Ernest Gräfenberg qui l’a identifié en 1950, n’existerait pas.
Neuf cents paires de jumelles de 22 à 83 ans ont donné des réponses très différentes pour le localiser, et la moitié a déclaré ne pas le connaître.
Si celui-ci avait une réalité anatomique, elles auraient répondu avec netteté, en le situant au même endroit. Les chercheurs anglais ont conclu : le point G est une invention de la sexologie.
Aussitôt, une tempête de protestations s’est levée. Aux Etats-Unis, la sexologue Beverly Whipple, auteur de l’ouvrage grand public The G. Spot (Le Point G, Robert Laffont, 1982) s’est moquée.
Certaines jumelles interrogées n’auraient-elles pas des amoureux moins entreprenants que d’autres ? A-t-on distingué les femmes homosexuelles et bisexuelles, souvent plus au fait de la sensibilité du sexe féminin ?
Odile Buisson, elle, a répondu avec quatre collègues dans The Journal Medicine par un article intitulé : “Qui a peur du point G ?” Au congrès de gynécologie, elle ironise : “La question du King’s College me semble biaisée : “Pensez-vous avoir une zone sensible de la taille d’une pièce de monnaie sur la face antérieure de votre vagin ?” Franchement, on me l’aurait posée, j’aurais dit non.
Remarquez qu’une femme sur deux a quand même répondu qu’elle connaissait cette zone. Mais ce qui m’énerve le plus dans cette histoire, c’est l’ignorance complète de l’anatomie du clitoris.”
Qui a peur du point G ? : Le plaisir féminin, une angoisse masculine
(éd. Jean-Claude Gawsewitch, février 2011)
Présentation de l'éditeur
Au XXIe siècle, le plaisir féminin reste un sujet tabou. Véritable "continent noir" de la médecine, la sexualité des femmes est très peu étudiée, notamment en France. Comme si le sujet n'était pas digne d'intérêt. Comme si l'accès au septième ciel dépendait toujours de la seule qualité d'un amant. Interdits religieux et sociétaux, difficultés technologiques et financières, réticences des milieux scientifiques, les raisons qui expliquent ce manque de savoir sont multiples. Mais elles dissimulent toutes une vérité simple : les hommes, y compris les chercheurs, sont encore terrorisés par la jouissance féminine.
Réquisitoire mordant contre une " excision intellectuelle " qui pénalise les femmes, "Qui a peur du Point G ?" est aussi un plaidoyer jubilatoire en faveur d'un épanouissement sexuel égalitaire. A travers son témoignage, le docteur Odile Buisson révèle ainsi certains mystères du point G, la fabuleuse anatomie du clitoris ou encore l'incroyable complexité de l'orgasme.
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