Loi Travail: s'il reste sourd, Valls risque de "mettre le pays à feu et à sang"

REPORTAGE - Ce samedi, ce sont les syndicats réformistes qui ont battu le pavé pour demander des aménagements de l'avant-projet de loi El Khomri. A Paris, place de la République, près d'un millier de personnes étaient rassemblées, en très grande majorité des militants syndicaux. RMC y était.
Mercredi, c'était la manifestation des syndicats qui demandent le retrait du texte El Khomri. Et ce samedi, dans la rue, c'était au tour des syndicats réformistes de défiler, pour demander des aménagements de l'avant-projet de loi Travail.
En tout, 120 rassemblements étaient organisés en France, à l'appel de la CFDT, de la CFE-CGC, de la CFTC, de l'UNSA et de la Fage. A Paris, place de la République, près d'un millier de personnes étaient rassemblées - en très grande majorité des militants syndicaux.
"Je n'ai entendu que de mauvaises mesures"
RMC s'est rendue place de la République hier avec les syndicats qui soutiennent en partie le texte. Et pour Alain, militant à la CFDT, c'est journée d'explications, paquet de tracts à la main. Un exercice d'équilibriste face aux passants.
- "On n'a pas manifesté avec nos homologues CGT et FO, qui demandent le retrait total du texte. Alors que nous, on demande des suppressions d'éléments [avec] lesquels on n'est pas d'accord", explique Alain à une curieuse.
- "Les bonnes mesures, je ne les connais pas, à vrai dire. Moi je n'en ai entendu que des mauvaises", lui répond-elle.
"Je pensais qu'il y aurait plus de monde"
Les militants des syndicats sont massés autour de la scène CFE-CGC/CTFC/CFDT/UNSA. Mais la place de la République reste désespérément vide. Leur mobilisation ne prend pas constate Geneviève:
"Je pensais qu'il y aurait plus de monde. S'il n'y a que 300 personnes, alors ça veut dire que les gens ne sont pas mobilisés…", regrette-t-elle.
Lundi après-midi, Manuel Valls a convoqué tous les partenaires sociaux qu'il a rencontrés cette semaine. Il doit leur présenter les modifications qu'il accepte de faire sur le texte. Une réunion très attendue par tous les syndicats, qu'ils soient totalement opposés à la réforme El Khomri, ou simplement réformistes.
"Que Valls nous dise: 'j'ai entendu ce que vous avez dit'"
En fonction des annonces, tous ces syndicats devront choisir entre soutenir le texte ou le rejeter définitivement. Et voici ce que Pascale Coton, la vice-présidente de la CFTC, espère entendre de la part du Premier ministre:
"Qu'il nous dise: 'voilà, j'ai entendu ce que vous avez dit, c'est légitime, on va faire des rectifications", commence-t-elle. "Faire en sorte que le CDD ne soit pas la variable d'ajustement. De faire en sorte que les jeunes puissent prendre toute leur place dans le milieu du travail. Et puis par rapport aux prud'hommes, bien évidemment, que le juge redevienne la force pour bien garantir ce sujet-là. S'il ne revient pas sur tous ces points, peut-être que la décision de lundi soir, à la confédération CFTC, sera de dire qu'on rejette totalement ce projet de loi, point final. Ce serait vraiment mettre le pays à feu et à sang. Ça serait remettre des millions de salariés dans la rue".
Les menaces de Pierre Gattaz
Et du côté des patrons, tous les moyens sont bons pour faire plier les syndicats. A l'exemple de Pierre Gattaz qui a menacé la CFE-CGC via deux SMS que le patron du Medef a envoyés à Carole Couvert, la présidente de la confédération syndicale.
"Si vous persistez dans cette attitude 'cgtiste' sur cette loi, le Medef en tirera toutes les conséquences sur nos discussions en cours ", écrit Pierre Gattaz dans un premier message, avant de se faire plus clair: "Ce que je veux dire c'est que nous (ne) vous soutiendrons plus dans votre combat pour les cadres si vous plantez la loi".
"Le chantage, ça n'est pas un signe de force"
Le moins que l'on puisse dire, c'est que Carole Couvert, la présidente de la CFE-CGC n'a pas du tout apprécié les menaces du patron des patrons:
"Quand on utilise la pression, la menace, le chantage, ça n'est pas un signe de force. C'est plutôt un signe de fragilité. Je crois que nous avons deux visions complètement différentes du dialogue social. Il est évident que nous ne sommes pas toujours d'accord, entre les entreprises et les salariés. Mais la base, c'est d'échanger, d'essayer de trouver un terrain d'entente. Et puis surtout, c'est le respect. Maintenant, il s'est peut-être trompé. Peut-être qu'il regrette les mots qu'il a proférés par SMS. Si tel est le cas, la balle est dans son camp. Qu'il fasse un geste à la destination de la CFE-CGC, et de la présidente confédérale que je suis".
Autrement dit, ce sont des excuses que Carole Couvert attend désormais de Pierre Gattaz.
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