Ma fille, une proie facile pour ceux qui l'ont endoctrinée

Nicole, habitante de Béthune dans le Pas-de-Calais, a raconté ce mardi sur RMC comment sa fille s'est radicalisée après avoir rencontré sur Internet un Algérien de 65 ans qui l'a endoctrinée. Si elle est aujourd'hui sortie des griffes de Daesh, elle continue toutefois de considérer ses parents comme "des mécréants".
C'est une jeune femme de la région de Béthune, dans le Pas-de-Calais, un peu désœuvrée, mal dans sa peau, et qui tombe dans les bras de Daesh un jour de 2012. C'est en naviguant sur les eaux sombres des réseaux sociaux que Sonia (son nom a été changé) fait la rencontre d’un Algérien de 65 ans et de quatre autres personnes. Sans le savoir, elle tombe dans les filets des recruteurs de l’État islamique. A l'époque, elle vient de perdre son emploi et souffre de dépression.
Sur RMC, Nicole, sa maman, raconte : "Elle a rencontré cet homme au moment de sa dérive. Il lui a dit qu'il voulait l'aider et de jour en jour, de mois en mois, il l'a radicalisée. Il lui disait : 'Je vais te soigner par la prière'. Nous, ses parents, on ne s'était aperçu de rien".
"Il lui a dit : 'Je vais te soigner par la prière'"
Pendant deux ans, Sonia va plonger dans la radicalisation, passe 10 heures par jour sur Internet, fait ses prières quotidiennes, reçoit un hijab de son mentor, qu'elle ne mettra que devant lui, lors de leurs chat par webcam. Jusqu'en octobre 2014, où elle tente de se suicider. C'est là que ses parents apprennent sa radicalisation.
Après cette tentative de suicide fin 2014, Sonia est entendue une première fois par la sécurité publique de Béthune pour "association de malfaiteurs en vue de préparer des actes terroristes". Relâchée, elle poursuit son activisme, évoque même "un départ pour la Syrie", raconte sa maman. Là, elle ne se cache plus, "commence à porter le voile, et me montre son niqab", dit sa mère, Nicole.
"C'est dur pour elle de s'en sortir du jour au lendemain"
En mars 2015, un homme va lui proposer de participer à un attentat à Marseille, contre une synagogue. Sur les conseils de ses proches, elle se rend alors au commissariat. Elle sera rapidement interpellée puis condamnée à quatre mois de prison ferme pour "apologie publique du terrorisme" via les réseaux sociaux, fin septembre. Depuis, hébergée par ses parents, elle tente de se reconstruire. "On essaie de l'aider à s'en sortir", explique Nicole chez Jean-Jacques Bourdin. Mais ce n'est pas simple.
"Elle nous considère toujours comme des mécréants. Mais après 3 ans d'endoctrinement, c'est dur pour elle de s'en sortir du jour au lendemain", relativise sa maman.
"Quand tu es fragile tu es influençable"
"Ma fille, c'était une proie facile pour ceux qui l'ont endoctrinée, regrette aujourd'hui Nicole. Quand tu es fragile tu es influençable, et comme elle avait tout perdu… C'est arrivé à elle, mais ça arrive à tant de jeunes, Français ou Européens". Jeudi dernier elle a livré une confidence à sa mère : le Belge Abdelhamid Abaaoud, l'un des organisateurs des attentats de Paris, figurait parmi ses contacts noués sur Internet avec les islamistes radicaux. "Pour moi, ils les prennent comme des boucliers humains, parce qu'ils sont incapables de faire leur mission eux-mêmes".