Macron veut réduire les normes environnementales dans le logement: "Ne jouons pas avec la santé des gens"

Pas à pas, Macron dévoile sa réforme du logement. Pour bâtir plus vite, le chef de l'Etat veut abaisser les "exigences des normes environnementales" en vigueur dans la construction. Aberrant aux yeux de Michel Dubromel, de France Nature Environnement. Selon lui, occulter ces normes écologiques met en péril la santé des gens. Et si urgence d'hébergement il y avait, elle ne nécessiterait pas de construire plus, mais d'occuper les bâtiments vides.
Michel Dubromel est président de la fédération environnement de l'ONG France Nature Environnement (FNE).
"Nous sommes bigrement inquiets que Macron s'en prenne ainsi aux normes écologiques. Ces normes sont justement une opportunité pour aller vers la transition écologique. Le chef de l'Etat fait l'inverse que ce qu'il déclarait la veille: il disait aller voir les conséquences de l'ouragan à Saint-Martin, et prendre des mesures en tenant compte du réchauffement climatique. Et ici, on devrait s'asseoir sur les normes qui visent à nous adapter au climat?
Cela nous paraît aberrant. Ces normes visent justement à faire des économies d'énergie. Certes, construire coûtera moins cher au promoteur, mais plus cher à celui qui consomme l'énergie.
"Va-t-on construire en zone inondable?"
Quand Macron propose de simplifier, on dit d'accord. Il y a un empilement de textes peu lisibles sur lesquels il est important que l'on fasse un toilettage. Mais seulement si on maintient le même niveau de protection sur la santé des gens. Et si la conséquence n'est pas que certains se retrouvent avec des risques plus important, ou des notes de chauffage plus salées.
Le risque de réchauffement climatique est de plus en plus élevé, et il va falloir en tenir compte. A cause de certains risques qui figurent dans les normes environnementales on ne construit pas en zone inondable. Va-t-on contourner cette norme? Avec le réchauffement climatique, nous aurons plus d'inondations. De même, d'autres normes permettent d'avoir de l'isolation dans les bâtiments. Va-t-on s'en passer? Toutes ces normes nous servent à nous améliorer. Bien sûr que cela coûte plus cher, mais ce n'est pas toujours le promoteur qui paie la facture.
"On ne négocie pas avec la santé des gens"
On va certes construire plus vite, mais le jour où il y a pépin à cause de cette inconséquence, comment fera-t-on? Nous sommes aussi inquiets pour les personnes concernées. La réforme du logement du président est pour les précaires. Mais pour eux, c'est la double peine, car en l'absence de règles environnementales, ils seront plus exposés.
Ne jouons pas avec la santé des gens. Les normes environnementales en place ont tout de même été écrites par des ministères précédents. Au nom de quoi peut-on décréter que ces heures et ces années de réflexion peuvent être mises sous le tapis?
"Des passoires thermiques"
Le chef de l'Etat parle de réflexion à long terme. Pour nous, cela veut dire de loger des gens dans des bâtiments qui ne coûtent rien en énergie. Outre-Rhin, il y a des bâtiments à énergie positive, qui produisent plus d'énergie qu'ils n'en consomment. On peut accompagner le secteur du bâtiment et de la construction pour qu'il soit dans la cadre de la transition écologique. On ne va pas tout de même pas refaire ce qu'on nomme des passoires thermiques, avec des facture de chauffage qui montent au plafond et des personnes en mauvaise santé?
La fondation Abbé Pierre recense chaque année des cas où les gens tombent malade à cause d'une mauvaise isolation. Je doute que ce soit cela qu'on souhaite.
"L'urgence n'est pas de construire de nouveaux bâtiments"
Il y a un besoin de logement. Mais l'hébergement d'urgence ne nécessite pas de construire de nouveaux bâtiments. Mettons à disposition les bâtiments qui sont vides un peu partout. Arrêtons de consommer encore du territoire. Seuls des intérêts privés et commerciaux s'en retrouvent favorisés. En revanche, les intérêts financiers des personnes qui vont occuper ces bâtiments s'en retrouvent eux mis en péril.
A qui profite la solution de construire plus vite? La démarche est aberrante. Que gagne-t-on, au 21e siècle, à demander à des promoteurs de construire des bâtiments aussi coûteux en énergie? Il faut préférer les bâtiments qui demain n'auront pas une facture de chauffage exorbitante. C'est une vision à long terme et un choix de société que le président nous avait pourtant proposé.
La décision de dépenser le moins possible nous coûtera collectivement plus cher. Cette facture énergétique, à long terme, on la payera tous."
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