Marine Le Pen rediabolise le FN

Les polémiques se succèdent autour du FN et de sa présidente - invitée de RMC et de BFMTV ce jeudi. Marine Le Pen rediabolise le Front national…
On a entendu assez d'hommages à la volonté de Marine Le Pen de faire du FN un parti plus respectable, moins extrémiste pour ne pas relever aujourd'hui que les efforts qu'elle a faits en ce sens depuis deux ou trois ans sont en passe d'être réduits à néant. On dira - au choix - que si elle a sincèrement voulu cette "dédiabolisation", c'est raté ; ou que si ce n'était qu'une tactique, les masques tombent. Ce qui est sûr, c'est qu'entre sa mauvaise valse de Vienne, il y a un mois, avec les chefs des extrêmes droites les plus virulentes d'Europe, la référence de son père à Brasillach et maintenant l'agression d'Arnaud Montebourg et d'Audrey Pulvar par des fanatiques qui scandaient le nom de Le Pen, la façade de respectabilité du FN se lézarde. Marine Le Pen a de quoi se rembrunir...
Est-elle responsable de tous ces épisodes ?
Je ne dis pas ça. Arnaud Montebourg et Audrey Pulvar ont été victimes d'une agression odieuse. Ils ont bien fait de déposer une plainte. À la justice de dire qui sont les coupables. Ce dont Marine Le Pen est responsable, c'est la façon dont elle agit - et parfois dont elle réagit. C'est d'être allée danser en Autriche à l'invitation d'un mouvement qui célèbre le négationnisme. C'est de ne pas condamner l'hommage de son père à un écrivain collaborationniste fusillé à la Libération. Et c'est aussi de n'avoir trouvé que quelques mots bien mesurés, tellement plus sobres que sa rhétorique habituelle, pour dénoncer les agresseurs d'Arnaud Montebourg et de sa compagne - et de choisir d'attaquer les agressés plutôt que les agresseurs. Après tout, elle pourrait trouver au moins désagréable que quand une bande de crânes rasés lance des injures racistes et antisémites dans une rue de Paris, ils crient plus volontiers "Le Pen président" que "Morin président" ou "Joly présidente". Il faut croire que non.
En définitive, il n'y a pas de différence essentielle entre Marine Le Pen et Jean-Marie Le Pen ?
Ce serait absurde de dire cela. Ils n'ont ni la même culture ni les mêmes références. Mais ce que montrent ces épisodes, c'est qu'on aurait tort de s'arrêter à des différences de personnalités - et même de s'en tenir aux seules déclarations publiques. Il y a l'affichage politique et la réalité du FN. Et puis il y a le jeu subtil, les ambiguïtés volontaires entre ce que dit Marine Le Pen à titre personnel et les positions officielles de son parti - c'est le cas sur l'avortement, où le FN est nettement moins progressiste que sa candidate ne prétend l'être.
Ces polémiques nuisent-elles à Marine Le Pen ou peuvent-elles lui profiter ?
Ça a toujours été la stratégie de son père de provoquer des scandales quand le FN était au creux de la vague et ensuite de se poser en martyr. Lui recherchait la diabolisation du FN. Dès lors que Marine Le Pen a choisi la stratégie inverse, elle ne peut pas revenir en arrière sans en payer le prix - et les sondages actuels le montrent. Pour Marine Le Pen, ce qui est facho est fâcheux. Ça ne l'empêchera pas d'avoir ses 500 signatures - d'ailleurs, elle n'en parle plus beaucoup depuis que le Conseil constitutionnel a rejeté son recours. Mais ça ne la rend pas particulièrement légitime à invoquer les principes républicains pour défendre sa candidature. Finalement, peut-être la vraie "dédiabolisation", ce serait la "délepénisation" du FN. On comprend que sa présidente actuelle n'en fasse pas une priorité.
Ecoutez ci-dessous le Parti Pris d'Hervé Gattegno de ce jeudi 1er mars 2012 :
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