"Moi, je vais continuer à faire ma vie": pourquoi l'idée d'un reconfinement des personnes fragiles ne passe pas

L'idée du Conseil scientifique serait que les personnes âgées ou celles qui sont considérées comme prioritaires pour se faire vacciner seraient confinées, en attendant de recevoir leurs doses.
Et si le prochain confinement ne concernait que les personnes fragiles et qui ne sont pas vaccinées ? C'est en tout cas l'hypothèse envisagée par le Conseil Scientifique et évoquée jeudi matin sur RMC par Odile Launay, infectiologue et membre du comité vaccin Covid-19.
L'idée du Conseil Scientifique serait d'inciter les personnes âgées et les patients atteints de pathologies graves, comme un cancer, à s'auto-confiner, s'ils ne sont pas vaccinées. Ce qui permettrait dans le même temps un certain relâchement des restrictions pour le reste de la population, comme les étudiants. Rose et Laetitia adhèrent à cette éventualité.
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“Comme ça au moins les personnes âgées sont en sécurité et nous ça nous permet d’étudier. Je pense que c’est une bonne idée”, indique Rose.
“On a besoin de continuer à vivre malgré les dangers extérieurs. Être prudent oui, mais moi je ne suis pas pour les extrêmes et là, je trouve que la situation commence à devenir extrême pour tout le monde psychologiquement et émotionnellement. C’est très lourd pour tout le monde. Donc il faut trouver un équilibre”, assure Laetitia.
Une idée qui ne convainc pas tout le monde
Mais pour la majorité des personnes fragiles rencontrées, la proposition ne passe pas du tout. Dominique et Irène ont respectivement 70 et 80 ans. “Moi personnellement, je ne le ferai pas, je vais continuer à sortir. Je vais continuer à faire mes courses normalement. Je vais continuer à faire ma vie”, assure Dominique.
“Moi, je suis pour le reconfinement complet pas seulement les personnes fragiles parce qu’on fait déjà très attention et ce n’est pas toujours nous qui infectons les autres”, appuie Irène.
Selon le Conseil Scientifique, cet auto-confinement serait une mesure transitoire et pourrait concerner jusqu'à 18 millions de personnes.
Pourquoi ça bloque... à l'Elysée?
Il y a évidemment des raisons politiques: les seniors souffrent autant que les autres du confinement, mais ils votent plus. En 2017, ils avaient largement choisi Emmanuel Macron: 26% chez les plus de 60 ans au premier tour, et 74% au second. C’est ce qu’on appelle un "réservoir de voix".
Mais, au-delà, il y a surtout un obstacle juridique: cibler les personnes fragiles, donc les plus âgées ou celles souffrant de maladies qui amoindrissent leur défense immunitaire, cela reviendrait à une forme de discrimination. Des recours seraient sans doute déposés au nom du "principe d’égalité" et le gouvernement courrait le risque d’une censure du Conseil constitutionnel ou du conseil d’Etat.
D'ailleurs, l’ancien secrétaire général du conseil constitutionnel, Jean-Eric Schoettl, explique ainsi que le ciblage des personnes à risque serait extrêmement difficile. En plus de l’âge, il faudrait par exemple fixer un taux maximal de sucre dans le sang pour les diabétiques ou un ratio taille poids pour les personnes en surpoids. Tout cela serait, selon lui, "hautement contestable".
Le constitutionnaliste Jean-Philippe Derosier abonde: il explique que l’objectif d’une telle mesure serait de limiter la propagation du virus. Or, rien ne prouve que les personnes à risque le transmettent davantage que les autres. Il s’agirait d’une rupture d’égalité. Et de finir que le seul critère utilisable pour fonder une discrimination reste le critère géographique.
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