Nicolas Sarkozy laisse entendre qu'il gardera les 35 heures
par Emmanuel Jarry PARIS (Reuters) - Nicolas Sarkozy a laissé entendre jeudi qu'il n'entendait plus toucher à la semaine de 35 heures, malgré la...
par Emmanuel Jarry
PARIS (Reuters) - Nicolas Sarkozy a laissé entendre jeudi qu'il n'entendait plus toucher à la semaine de 35 heures, malgré la volonté de son parti, l'UMP, de rouvrir le dossier pour l'élection présidentielle de 2012.
Lors de ses voeux aux partenaires sociaux, en l'absence de la CGT qui a boudé cette réception traditionnelle, le chef de l'Etat s'est réjoui de ce que les "conséquences désastreuses" des 35 heures mises en place par la gauche soient aujourd'hui reconnues "au sein de toutes les familles politiques".
Mais depuis 2007, les 35 heures telles qu'instaurée par la ministre socialiste du Travail Martine Aubry à la fin des années 1990 "ont disparu", grâce notamment à la libéralisation des heures supplémentaires, a-t-il poursuivi. "Aujourd'hui, les 35 heures uniformes et obligatoires n'existent plus."
"Pour autant, je considère qu'il n'est pas de sujet tabou. et je le dis d'autant plus clairement que la crise à changé la donne", a-t-il cependant ajouté.
Il a ainsi estimé que la question du coût du travail et celle de la compétitivité des entreprises étaient "de véritables questions" et que le gouvernement serait attentif aux propositions des partenaires sociaux et des partis politiques.
Mais "avec une préoccupation", a averti le chef de l'Etat : "Ne pas toucher au pouvoir d'achat des salariés (...) et ne pas peser sur la compétitivité de nos entreprises."
Décryptage d'une source gouvernementale : si partenaires sociaux et partis veulent réfléchir, c'est leur droit, mais dans ces strictes limites. Donc pas question de toucher aux heures supplémentaires ni de nuire à la compétitivité des entreprises en remettant en causes les allègements de charges sociales.
CHÉRÈQUE JUGE SARKOZY AMBIGU
C'est également ce qu'a compris le secrétaire général de Force ouvrière. "Ma première réaction a été : 'qu'est-ce qu'il veut dire'", a déclaré Jean-Claude Mailly à Reuters. "Mais il n'y a qu'une phrase que je retiens : il ne faut pas toucher au pouvoir d'achat des salariés. Et donc ça veut dire qu'il ne faut pas toucher à la durée légale du travail."
Son homologue de la CFDT a pour sa part jugé "floue" et "ambiguë" la position de Nicolas Sarkozy.
"Le président de la République n'a pas été du tout rassurant", a dit François Chérèque. "Il n'a pas dit qu'il ne souhaitait pas toucher la durée légale du temps de travail (...) Je souhaite que dans ses prochaines interventions il lève de façon très claire le flou qu'il y a sur ce problème."
La présidente de la principale organisation patronale, le Medef, a estimé que "sortir des 35 heures" était une question trop complexe pour être réglée par des formules simplistes.
"Que cela fasse l'objet d'un débat, très bien. Mais ce n'est pas à l'agenda social", a dit Laurence Parisot. "Pour nous, la priorité est de faire baisser le chômage."
Le débat sur un démantèlement total des 35 heures a été relancé par le secrétaire général de l'UMP, Jean-François Copé, qui veut l'élargir à toute la question du travail en France et en faire un enjeu de l'élection présidentielle de 2012.
FILLON JUGE LE DÉBAT POSITIF
L'ancien patron des députés UMP dit avoir l'accord de Nicolas Sarkozy et du Premier ministre, François Fillon, avec qui il a évoqué le sujet mercredi lors d'un déjeuner à Matignon.
Le sujet divise la droite autant que la gauche, où les prises de position du député socialiste Manuel Valls en faveur d'un "déverrouillage des 35 heures" ont déclenché un tollé au PS, à l'origine de cette mesure à la fin des années 1990.
Le ministre du Travail, Xavier Bertrand, qui ne cache pas son animosité à l'égard de Jean-François Copé, a jugé inutile de revenir sur un mécanisme qu'il estime vidé de sa substance.
Le maire UMP de Nice, Christian Estrosi, a pour sa part exhorté mercredi le parti majoritaire à ne pas brandir un "chiffon rouge" face au monde du travail.
Le ministre de la Défense, Alain Juppé, propose en revanche sur son blog internet d'abandonner purement et simplement les 35 heures, "une vieille idée (...) en complet décalage avec la réalité économique d'aujourd'hui".
François Fillon a confirmé jeudi, lors d'un colloque sur la nouvelle donne économique mondiale, son accord de principe à la relance du débat sur les 35 heures, au nom de la convergence et de l'harmonisation des économies européennes.
Après la crise financière et économique de ces dernières années, ces questions "vont s'imposer en haut des priorités européennes, y compris dans des domaines longtemps ignorés pour cause de sensibilité politique", a-t-il dit.
"C'est dans cet esprit d'ailleurs que j'accueille de façon positive l'ouverture d'un débat en France sur le coût du travail et sur la question des 35 heures", a-t-il ajouté. "On ne peut pas imaginer à long terme une zone euro dans laquelle les temps de travail, l'âge de la retraite, le coût du travail soient complètement divergents."
Edité par Yves Clarisse
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