Le Normal One…
Encore une fois, son Real va croiser le Barça. Et encore une fois, sauf surprise, ça va mal se passer pour lui. Dix-huit mois après être arrivé à Madrid dans une posture de roi des coachs, Mourinho s’est transformé en bouffon du véritable souverain Barça. Le Special One s’est normalisé, pire banalisé…
Un éminent confrère a récemment écrit que Mourinho était le coach du XXIè siècle. En substance, il expliquait que si d’autres avant lui avaient révolutionné le foot en pensant le jeu, la tactique, lui, avait introduit une dimension mentale nouvelle. Ce qu’un autre confrère, en Italie, appelait la « force de persuasion ». Si on schématise grossièrement, ça pourrait donner un mélange de : « On est les plus forts, personne ne va nous résister, on va mourir pour vous et tout donner ». Si on ajoute à cela, une présence agressive dans les médias, la direction de clubs en situation de revanche et une dose de « nous contre le monde entier », on touche de près les ressorts de la méthode Mourinho. Sans aller aussi loin, certains coachs italiens tels Lippi ou Ancelotti ont également parlé de l’importance du travail sur « l’estime de soi ».
Derrière cette présentation sommaire, un brin ironique, je ne voudrais pas diminuer l’importance du travail de Mourinho, encore moins, passer sous silence ses succès et sa place, importante et indiscutable dans l’histoire du foot des années 2000. Je citerais deux moments clés de sa carrière, deux matches qui mettent clairement en évidence sa méthode : le quart de final retour de LDC en 2004 à Manchester, et la fameuse demie contre le Barça en 2010. Avant et après matches, à chaque fois, par ses mots, cet homme est arrivé à obtenir de ses joueurs (tous bons, c’est tout de même à signaler) une abnégation proche du sacrifice.
Aujourd’hui, pourtant, tout semble avoir changé. Ce qu’il a fait avec l’Inter en 2010 face à ce même Barça, semble impossible. (Cet Inter est-il plus fort que son Real aujourd’hui ??). Mourinho a pourtant à sa disposition 5 champions du monde (Casillas, Ramos, Alonso, Albiol et Arbeloa), deux anciens ballons d’or (Kaka et Cristiano), deux joueurs essentiels de l’une des sélections phares du moment (Khedira et Ozïl) et enfin deux des meilleurs 9 au monde (Higuain et Benzema), rien n’y fait. Mourinho a tout et peut tout avoir. Il est pourtant battu et parfois humilié. Sans parler de l’image du Real, bien trop dégradée par des comportements déplorables. Et il faut en plus que Zidane vienne en personne déclarer qu’il n’y aucune tactique pour battre le Barça !! Pourtant à côté du directeur sportif du Real, était assis un coach qui l’avait fait. En 2009, un autre, Hiddink était passé à 20 secondes de le faire, aussi. J’ai eu la chance récemment de rencontrer beaucoup de très grands coachs. Aucun ne m’a semblé admiratif du travail de Mourinho d’un point de vue du jeu. Mais tous ont souligné que son approche mentale était exceptionnelle. Cette méthode est-elle épuisée ? La question se pose tant ses joueurs semblent aujourd’hui convaincus qu’ils sont moins forts que les Catalans. Mourinho qui cultive le complexe d’infériorité, c’est le monde à l’envers !!
On notera, par ailleurs, que ses choix ultra-défensifs (l’autobus devant la surface comme on dit en Espagne) et les attitudes négatives des joueurs toujours à la limite de la crise de nerfs, ont conduit ses joueurs à ne plus oser regarder dans les yeux ceux du Barça. Doit-on évoquer, par ailleurs, les critiques qui dans son dos montent de plus en plus ? Des coachs (Del Bosque, Bianchi, Menotti, Valdano), des journalistes (Marca, As, la Gazzetta dello Sport) et désormais des supporters qui sifflent… Incapable de trouver une alternative dans le jeu. On en parle peu, mais ses choix dans le dernier match face au Barça, son coaching, ont été plus que critiquables. Plus capable de soulever, de tenir son vestiaire, de le préparer à la « guerre », Mourinho ne semble pouvoir se défendre qu’en brandissant la menace d’un départ. Comme pour se donner une consistance. Mais qui a encore peur du Normal One ?
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