Pénalisation des clients de prostituées: une culpabilité que les hommes ont du mal à assumer

Il y a deux ans, l'Assemblée nationale adoptait définitivement la loi de pénalisation des clients de prostituées. Qu'est-ce qui a changé avec cette loi? Reportage RMC avec l'unité de police administrative du 12ème arrondissement de Paris.
Ce fut l'une des loi très discutées du quinquennat de François Hollande. Le 6 avril 2016, les députés adoptaient définitivement la loi loi visant à "renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées". En clair: la pénalisation des clients de prostituées, mettant ainsi fin au délit de racolage.
Mais, dans les faits, qu'est-ce qui a changé? Si les réseaux de prostitution et de traite des être humains ont peu évolués depuis 2016, sur le terrain, la loi a délié les langues, et notamment celle des prostituées, comme l'a constaté RMC au bois de Vincennes, avec l'unité de police administrative du 12ème arrondissement de Paris.
"20 euros pour la pipe et l'amour"
"Bonsoir, c'est la police! Je vais demander au monsieur de bien vouloir se rhabiller et de descendre de la camionnette..." Pris en flagrant délit, ce client n'assume visiblement pas de payer les services d'une prostituée dans une camionnette. Il affirme seulement avoir voulu "dire bonjour à une amie" Stéphanie et ses collègues ont pourtant facilement obtenu l'aveu de la jeune femme. "Bien sûr que je dit la vérité à la police, explique la jeune prostituée. Il m'a donné 20 euros pour la pipe et l'amour".
Le procès-verbal du flagrant délit dressé, le magistrat décidera désormais dans les 24 heures entre une amende jusqu'à 1.500 euros ou un stage payant de sensibilisation à la traite humaine et aux dangers de la prostitution. Une culpabilité que les hommes ont souvent du mal a accepté. Ils trouvent alors des excuses plus ou moins fantaisistes, comme le confie Stéphanie, la policière:
"Il y en a un qui m'a sort la dernière fois, 'Mais je ne suis pas un alcoolique, je ne veux pas me retrouver dans une salle avec d'autres hommes...', 'Je ne suis pas malade, c'est pas grave ce que j'ai fait moi'. Le fait de voir la prostituée comme une victime, il y a encore une évolution à faire, même quand ce sont les jeunes"
"Le client entretient un réseau criminel et de traite des êtres humains"
Selon Eric Moyse, commissaire central du 12e arrondissement de Paris, où se trouve le Bois de Vincennes, "Souvent, le parquet demande des stages de sensibilisation, puisqu'au-delà de l'amende, il est important que le client comprenne qu'il entretient un réseau criminel et de traite des êtres humains". La poursuite de ce type d’infraction est un objectif du service pour 2018.
Dans l’agglomération parisienne les policiers ont constaté 970 infractions l’an dernier contre 300 en 2016. Et les effets de la loi se font clairement sentir au bois de Vincennes. Depuis deux ans, la prostitution dans les camionnettes a considérablement baissé dans le secteur: elles sont de moins de moins nombreuses dans le secteur, selon les constatations de la policière aussi bien que de la prostituée.