Une maire rurale s'agace du reconfinement: "Pourquoi fermer des rayons d'hypermarchés plutôt que d'ouvrir des petits magasins?"

La maire LR d'une commune de la Sarthe a pris vendredi dernier un arrêté municipal "autorisant les commerces non-alimentaires à rester ouverts jusqu’à ce que la liberté de concurrence soit rétablie". Au grand dam du préfet et du ministre de l'Économie.
Un reconfinement sous tension. Alors que l'exécutif dresse au cas par cas la liste des commerces essentiels et des commerces non-essentiels avec comme couperet une ouverture possible ou non pendant le confinement, les maires de quelques communes montent au front.
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Au Fresnay-sur-Sarthe, une commune de 3000 habitants à une quarantaine de kilomètres du Mans, la maire LR Fabienne Labrette-Ménager a pris vendredi dernier un arrêté municipal "autorisant les commerces non-alimentaires à rester ouverts jusqu’à ce que la liberté de concurrence soit rétablie".
Une initiative pas du tout au goût du gouvernement. Bruno Le Maire le ministre de l'Economie a dénoncé dimanche sur BFTMV "cette poignée de maires irresponsables" qui autorisent la réouverture de leurs commerces "Ils pensent qu'ils soutiennent les commerçants, en réalité ils mettent en danger la santé des Français".
"Mon arrêté sera caduque demain matin"
"Je ne me sens pas du tout irresponsable! On est sur le terrain tous les jours, on voit ce qui se passe, et j'ose espérer que les propos de Bruno Le Maire l'ont dépassé", a assuré ce lundi sur RMC Fabienne Labrette-Ménager la maire du Fresnay-sur-Sarthe.
"Notre position état de rester ouvert. Là, tout fermer, cela va profiter aux grands groupes comme Amazon. C'est dommage d'en être resté à fermer des rayons plutôt que d'ouvrir des petits magasins qui contribuent à la vie du village", a-t-elle regretté.
La préfecture de la Sarthe n'a pas non plus apprécié la décision. Dans un communiqué, Patrick Dallennes le préfet du département a appelé les commerces de Fresnay et de Saint-Calais, une autre commune concernée par un arrêté d'ouverture, à ne pas ouvrir, sous peine de contraventions.
Pour Fabienne Labrette-Ménager, le combat est de toute façon fini: "Je m'étais basé sur l'équité de traitement. Mon arrêté sera caduque demain matin à partir du moment où les rayons non-essentiels des grandes surfaces seront fermés".
"Gouvernance sans aucune concertation, ni préparation préalable"
Son constat reste toutefois partagé par de nombreux commerçants: cette mesure "apparaît comme une hérésie" pour le président de l'UFC-Que Choisir, qui a dénoncé la fermeture à partir de mardi des "rayons non essentiels" des grandes surfaces, décidée par le gouvernement par souci "d'équité" avec le petit commerce.
"Qui peut comprendre qu'en forçant les consommateurs à converger, transhumer vers les seules grandes surfaces, (...) on est face à une décision opportune, efficace, et donc acceptable?", a demandé Alain Bazot lundi dans un communiqué sur le site de l'association de consommateurs.
A ses yeux, "le critère de 'biens essentiels' au lieu de celui de la capacité à réguler les flux, assurer de la distanciation, etc. manque de pertinence au-delà du fait qu'il est arbitraire". "Quels rayons inaccessibles? Comment? Quels contrôles?", s'est-il interrogé. En outre, il a critiqué le fait que "le Président ait pris sa décision initiale de fermer les seuls petits commerces, sans consultation des parties prenantes, à commencer par les représentants de consommateurs".
"Cette forme de gouvernance sans aucune concertation, ni préparation préalable, n'est pas acceptable en 2020", a-t-il jugé, estimant en outre que "la seule fermeture des commerces de proximité pose un problème de saine concurrence au premier sens du terme".
Ces restrictions, décidées pour tenter d'endiguer la progression de l'épidémie de Covid-19, ouvrent "une autoroute pour les plateformes de e-commerce, à commencer par les GAFAM, particulièrement Amazon", a-t-il encore tancé, y voyant "la traduction d'une vision des modes de distribution de demain dont les consommateurs ne veulent pas, un univers régi par quelques grands opérateurs et qui tourne le dos à l'aspiration à davantage de proximité et d'humanité".
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