"Si la France gagne, François Hollande aura enfin un bilan"

EDITO - Ce jeudi, lors de la demi-finale de l'Euro 2016, les Bleus ont terrassé les Allemands et se sont qualifiés pour la finale. Selon Hervé Gattegno, avec cet exploit, les Français ont pu oublié, le temps d'un instant, les questions liées au terrorisme et à la crise. Il estime que l'on peut également féliciter François Hollande car il a eu le mérite de mener à bien l'organisation du championnat.
La France disputera dimanche la finale de l’Euro (contre le Portugal). Est-ce que cette qualification peut avoir des effets politiques ? Votre parti pris : si la France gagne l’euro, François Hollande aura enfin un bilan ! Vous voulez dire que ça peut lui profiter ?
En théorie, tout ce qui est bon pour la France peut faire du bien au président. La qualification des Bleus est une formidable nouvelle ; a fortiori après une victoire sur l’Allemagne – même les Européens les plus fervents doivent savourer cette revanche. Est-ce que François Hollande peut en tirer un bénéfice politique ? On peut au moins le créditer de ce que l’Euro se passe très bien ; il n’y a ni problème de sécurité ni d’organisation – en tout cas, moins qu’au sein de la majorité et du PS… On peut même dire qu’avec le foot, les Français ont un peu oublié le terrorisme et la crise. Et puis les victoires françaises font souffler sur le pays un vent d’optimisme. Ça change. Les Français avaient des bleus à l’âme ; maintenant, ils ont l’âme en bleu.
Dans quelle mesure François Hollande peut-il bénéficier des performances de l’équipe de France sans avoir l’air de tomber dans la récupération politique ?
Il est dans une situation où toute nouvelle positive est mise au service de sa future campagne. Il faut qu’il prouve aux Français que "ça va mieux". Quand l’INSEE annonce une hausse de la croissance pour 2017, il fait comme si c’était déjà effectif. Il exploite aussi les mauvaises nouvelles : il a profité de l’hommage à Michel Rocard pour défendre le 49.3 – ça manquait pour le moins d’élégance. Mais il a en tête le modèle de Chirac en 98, qui avait fait un bond dans les sondages après la coupe du monde… et qui a été réélu. Sauf qu’à l’époque, il y avait de la croissance et surtout la cohabitation. François Hollande n’est pas du tout dans cette situation. Politiquement, il va d’échec en échec. Si la France gagne l’Euro, il peut au mieux inverser la courbe du défaitisme.
En 1998, on disait de l’équipe de Deschamps et de Zidane qu’elle était à l’image d’une France Black-Blanc-Beur. Est-ce que l’équipe de 2016 ressemble aussi à la France ?
Pas tant que cela et je ne crois pas qu’il faille chercher des sens métaphoriques aux victoires sportives. La revanche sur l’Allemagne nous fait du bien au moral mais elle ne règle ni le chômage, ni la pauvreté. Peut-être qu’elle donne l’illusion à ceux qui se disent patriotes que la France est plus grande – au passage, la moitié des joueurs ne seraient pas français si on appliquait le droit du sang. En tout cas c’est une équipe qui s’est trouvée une cohésion à défaut d’une organisation, quitte à se passer de certaines individualités pour préserver l’esprit. Pour cela, il fallait un patron capable d’avoir une stratégie et de l’autorité – le contraire de François Hollande. Si la France gagne dimanche, c’est peut-être Didier Deschamps qui devrait se présenter à la primaire…
Votre opinion