Un litre d'eau sur cinq gaspillé à cause des canalisations: à qui la faute?

Le grand gaspillage de l'eau se poursuit. Un litre d'eau sur cinq distribués se volatilise à cause des fuites du réseau de canalisation en France. Alors même que plusieurs zones géographiques (Oise, Pyrénées-Orientales, Eure-et-Loir, Indre, Loiret, Vienne, Côte d'Or et Vendée) sont en situation de crise sécheresse, le niveau d'alerte le plus élevé...
L'association de consommateurs UFC-Que Choisir lance ce mardi une opération baptisée #LaFuiteEnAvant, avec 70 associations locales. L'idée est de faire disparaître symboliquement les "-o", "-au", "-eau" des noms des communes sur les panneaux à l'entrée des villes pour dénoncer l'ampleur des fuites d'eau.
En 2019, les Assises de l'Eau avaient fixé l'objectif de renouveler 1% du réseau national par an. En réalité, en moyenne, seul 0.67 % est renouvelé chaque année. Et à ce rythme, il faudrait 150 ans pour renouveler le parc. Certaines villes sont très mauvaises élèves comme Arles, Nîmes, Amiens, Sens, Aix-les-Bains et Evreux.
"D'autant plus scandaleux dans ce contexte de sécheresse"
Un milliard de m3 d'eau par an, c'est l'équivalent de la consommation des villes de Paris, Lyon, Marseille, Lille, Toulouse, Bordeaux et Nice qui est gaspillée. "C'est le fruit d'un manque d'entretien", résume Marie-Amandine Stévenin, présidente de l'UFC-Que Choisir, qui souligne que localement, le gaspillage peut jusqu'à un litre d'eau sur trois dans certaines villes. "C'est d'autant plus scandaleux dans ce contexte de sécheresse, comme on a pu le connaître l'été dernier", poursuit-elle.
Beaucoup sont de canalisations sont donc vétustes - "certaines ont plus de 60 ans" - et plus de la moitié sont réalisées à partir de matériaux fragiles comme la fonte grise, le PVC collé...
Une décentralisation à la hâte?
La faute notamment à la décentralisation de l'Etat, selon Marie-Amandine Stévenin, qui a fait que l'entretien a été subitement transféré dans les mains des communes qui n'avaient pas forcément les ressources ou compétences.
"Les services déconcentrés de l'Etat jusque dans les années 2000 assuraient l'entretien. Dans un objectif de réduction des dépenses publiques, c'est devenu une compétence des communes. Ce qui fait que les plus petites communes n'ont pas été en mesure de faire ce travail", regrette-t-elle, estimant qu'il y a un manque de moyens humains et financiers.
L'Etat doit réagir rapidement avec un "aide technique" à ces petites collectivités territoriales selon Olivier Andrault, chargé de mission agriculture/alimentation à l'UFC-Que Choisir. Il vise aussi la consommation d'eau de l'agriculture.
"C'est un problème de budget, encore faut-il que tous les acteurs qui participent au financement des agences de l'eau payent à la hauteur de ce qu'ils prélèvent dans le milieu naturel. Et, notamment, l'agriculture doit payer beaucoup plus", juge-t-il.
Dans le cadre du "plan eau", Emmanuel Macron avait annoncé en mars le déblocage de 180 millions d'euros pour aider les petites communes. Mais les experts estiment qu'il faudrait près de 3 milliards d'euros par an pour commencer à régler ce problème correctement.