Pourquoi Perrier pourrait ne plus s'appeler "eau minérale naturelle"

Dans le cadre de la commission d'enquête contre Nestlé, les experts ont rendu un avis sanitaire défavorable pour continuer à exploiter l'eau des puits Perrier en tant qu'"eau minérale naturelle" (photo d'illustration). - Fabrice COFFRINI © 2019 AFP
L'eau Perrier pourrait-elle perdre son appellation d'"eau minérale naturelle"? Encore un nouveau rebondissement dans l'affaire des eaux minérales contaminées, qui dure maintenant depuis plus d'un an.
La commission d'enquête sur les eaux en bouteille, ouverte en décembre 2024 après les révélations de Radio France et du Monde, a poursuivi ses auditions, ce mercredi 9 avril, avec le directeur général de Nestlé, Laurent Freixe.
Un rapport de 150 pages a été remis il y a quelques jours au préfet du Gard et à l’agence régionale de santé (ARS). Dans ce rapport, les hydrogéologues ont émis un "avis sanitaire défavorable" à Nestlé Waters pour l’exploitation des puits Perrier "en tant qu’eau minérale naturelle" sur son site de Vergèze.
"Nestlé Waters est en désaccord avec certaines des conclusions de ce rapport", a immédiatement affirmé le DG de Nestlé à l'AFP.
Une eau minérale pas si naturelle?
Pour être étiquetée "eau minérale naturelle", la pureté de l’eau doit être garantie à l’émergence et celle-ci ne doit pas subir de traitement qui modifie le microbisme de l’eau. Or, selon le rapport des hydrogéologues, l'eau à la source n'est pas suffisamment pure: il met en lumière des contaminations microbiologiques, qui restent néanmoins "des événements vraiment ponctuels" selon la patronne de Nestlé Waters.
Après le scandale de l'utilisation de traitements interdits sur ses eaux, Nestlé les a remplacés par une microfiltration dans le cadre d'un plan de transformation validé par le gouvernement. Mais les seuils de filtration retenus font débat quant à leur caractère désinfectant ou non. Cette méthode reste controversée, car ses effets sur la flore microbienne sont encore débattus. Or, si cette dernière est altérée, l'eau ne peut plus être qualifiée de "minérale naturelle".
Pour autant, lors de précédentes auditions, les dirigeantes de Nestlé Waters, Muriel Lienau, et de Nestlé France, Sophie Dubois, ont assuré que "toutes les eaux" de l'entreprise étaient "pures à la source".
Le géant suisse Nestlé s'est tout de même montré ouvert à la discussion et au changement. "Nous souhaitons continuer à opérer dans la conformité, quel que soit le scénario. Les hydrogéologues donnent des perspectives ou des pistes pour améliorer la qualité de la ressource. Et nous sommes prêts à prendre toutes les mesures nécessaires", a expliqué Laurent Freixe.
La décision finale bientôt rendue
Désormais, ce sera à l’Agence régionale de santé d'Occitanie d'apporter son regard "plus scientifique sur la situation et de confirmer si oui ou non l’exploitation peut continuer", a indiqué le président de la commission d’enquête Laurent Burgoa auprès de l'AFP.
Celle-ci avait déjà demandé à Nestlé, en août 2024, de réfléchir à un changement d’usage alimentaire de son site de conditionnement de Perrier. En parallèle, Nestlé a lancé récemment la marque Maison Perrier, qui ne porte pas la mention "eau minérale" et peut donc être soumise à des traitements.
Laurent Freixe a également annoncé le lancement d’une revue interne en France. "Je souhaite réitérer mes plus sincères regrets pour cette situation du passé", a-t-il déclaré.
Le DG de Nestlé a assuré que le groupe, qui détient aussi Vittel, San Pellegrino et Hépar, ne comptait pas sortir de l'activité des eaux. "Nous croyons au potentiel de cette activité. Nous cherchons un partenaire, mais il n'est en aucune sorte question d'une vente à 100% et de sortir de l'activité."
Aurélien Rousseau, ancien ministre de la Santé, doit être auditionné fin avril. Ensuite, le rapport de la commission sera présenté au Parlement avant une dernière présentation à la presse le 19 mai.