Ces odeurs qui vous poussent à acheter: qu'est-ce que le marketing olfactif?

Il y a quelques jours, une campagne de communication lancée par McDonald's aux Pays-Bas faisait parler d'elle: des panneaux monochromes, jaunes ou rouges, installés dans les villes d'Utrecht et Leiden, diffusent une odeur de frites à environ 200 mètres du restaurant, pour inciter les passants à venir y manger.
Un exemple représentatif de ce marketing olfactif qui se développe de plus en plus dans les lieux de consommation: hôtels, restaurant, magasins. Bientôt en France? Une déclinaison française "n'est pour le moment pas envisagée, même si rien n'est exclu," nous indique TBWA, l'agence de communication de McDonald's.
Si, dans le cas de McDonald's, l'odeur de frites est naturelle, des entreprises spécialisées dans la création de fragrances à diffuser dans les commerces poussent un petit peu partout en France. Elles sont une dizaine sur le marché.

Les odeurs influencent nos achats
Le marketing olfactif repose sur l'idée que les odeurs influencent nos achats. Selon une étude de l'institut BVA, les enseignes qui le mettent en place voient même un bond de 38% des impulsions d'achat chez les consommateurs.
C'est également ce qu'a constaté Noam Bouyakoub, directeur marketing chez King Jouet. L'enseigne a mis en place le marketing olfactif dans 60 magasins en France il y a huit mois: une odeur de fraise tagada est diffusée dans les rayons toute la journée.
"Les clients issus du programme fidélité, dont on peut voir le nombre de visites mensuelles, viennent deux fois plus dans les magasins où il y a un diffuseur que dans les magasins où il n'y en a pas," explique Noam Bouyakoub à RMC Conso.
"On a d'ailleurs constaté une hausse des ventes de bonbons à la fraise," ajoute le directeur marketing.
L'odorat est en lien direct avec une zone du cerveau qui régule notre mémoire et nos émotions. Il est le sens qui résiste le mieux au temps qui passe. C'est la raison pour laquelle certaines odeurs nous rappellent des souvenirs, au même titre que Proust et sa madeleine.
Elles ont aussi le pouvoir de nous ouvrir l'appétit, d'où la récente campagne de McDonalds ou la mise en place d'un marketing olfactif gourmand dans les lieux de restauration. Un four à pain bien placé près de l'entrée dans une boulangerie ou un système d'aération qui permet d'embaumer la rue d'une odeur de fast-food peuvent très bien remplir ce rôle.
Des entreprises spécialisées dans la création de fragrances
Mais dans les lieux où l'odeur n'est pas assez puissante, un coup de pouce artificiel est parfois le bienvenu. A l'instar de ce pizzaïolo, interrogé par Vice, qui admettait diffuser une odeur de pizza artificielle pour attirer les clients.
"Pour les restaurants, nous avons l'obligation de proposer des fragrances alimentaires, c'est une question de santé publique", explique Béatrice Attard, directrice générale d'Atmosphère diffusion, une entreprise parisienne spécialisée dans le marketing olfactif, contactée par RMC Conso.
"Mais en réalité, c'est souvent ce qu'on nous demande, car il faut une certaine cohérence entre un lieu et son odeur pour plaire aux clients."
Ce n'est toutefois pas le seul critère pris en compte par cette entreprise qui crée des parfums sur-mesure: "Avant de proposer une senteur à un client, on va chercher à le connaître. On va lui demander les parfums qu'il aime, observer la décoration de son commerce, les codes couleur utilisés, sa clientèle cible..." détaille Béatrice Attard.

Faire rester le client plus longtemps
Le tout pour offrir au client une sensation de bien-être qui l'incitera à rester plus longtemps et donc, in fine, à consommer plus.
"Cela fait partie du parcours client. C'est parfois même inconscient, mais quand on est dans un endroit qui sent bon, on a envie d'y rester. On perd la notion du temps. Et puis on se rappelle du lieu, cela permet de fidéliser le client," affirme la directrice générale d'Atmosphère diffusion.
Ainsi, une fragrance aux herbes de Provence sera proposée à un restaurant italien, une odeur de pop corn à un cinéma, une odeur de fleur de tiaré à un magasin qui vend, par exemple, des lunettes de soleil, une odeur de café à une enseigne d'électroménager qui souhaite mettre en avant son rayon torréfaction...

"Mais pour quelque chose d'un peu percutant, ou pour attiser la curiosité, on peut aussi très bien proposer une odeur à contre-courant, nuance Yohann Lavialle, gérant de Natarom, également spécialiste en marketing olfactif. Par exemple, il y a quelque temps, on avait mis une odeur de fraise tagada dans le musée des équipages du château de Vaux-le-Vicomte".
Il y a-t-il alors une forme de manipulation, derrière ce marketing olfactif? "C'est un vecteur de l'expérience client qui est très important, mais le but c'est de créer une signature olfactive pour le commerçant, pas de tromper le consommateur, estime Yohann Lavialle.
"Le marketing olfactif est parfois mal utilisé, il y en a qui utilisent de fausses odeurs de pain pour vendre davantage en boulangerie, mais ce n'est pas le but de notre métier," s'insurge-t-il.
Le marketing olfactif dans les centres de santé
Les odeurs n'ont d'ailleurs pas toujours pour but de nous faire acheter. Elles ont aussi le pouvoir de nous relaxer. "On a parmi nos clients des cabinets dentaires qui recherchent un parfum rassurant pour leur salle d'attente," indique à ce sujet Béatrice Attard. Pour cela: des senteurs douces, comme le musc, la fleur de lotus ou le thé vert.
Et parfois même une visée presque médicale, selon cette dernière: "Certains Ehpad diffusent une odeur de croissant le matin, pour inciter les résidents à venir prendre leur petit-déjeuner".