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"Façon bouchère": attention aux arnaques marketing quand vous achetez des steaks hachés

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À l'occasion du sommet de l'élevage, RMC Conso vous révèle les arnaques aux étiquettes sur les steaks hachés vendus en supermarché. De moins bonne qualité, ils ne sont même pas toujours intéressants pour le porte-monnaie. Explications.

Des steaks hachés aux fibres végétales, des "bons plans" qui n'en sont pas vraiment, des appellations pour faire croire à une préparation artisanale alors qu'il n'en est rien... Les arnaques marketing, au rayon boucherie des supermarchés, sont nombreuses.

Alors que s'ouvre ce mardi 1er octobre le Sommet de l'élevage à Clermont-Ferrand, et, qu'à cette occasion, la Fondation pour la Nature et l'Homme dénonce dans un rapport publié le 24 septembre un modèle à bout de souffle, RMC Conso fait le point sur les arnaques à l'étiquette sur les steaks hachés vendus dans la grande distribution.

61% de la viande bovine consommée

Peu chère et simple à cuisiner, la viande hachée est largement plébiscitée par les Français: 61% de la viande bovine consommée en France est sous forme hachée. Or deux steaks hachés sur trois sont fabriqués par un groupe industriel, selon le rapport de l'ONG.

Pour attirer les consommateurs, l'industrie agroalimentaire use de tous les stratagèmes marketing, illustrations alléchantes et appellations accrocheuses et tire sur deux ficelles: le prix et la qualité.

La gamme Happy Family de Charal, par exemple, avec son conditionnement par pack de trois, s'adresse directement aux familles, qui ont donc potentiellement moins de pouvoir d'achat qu'une personne seule ou un couple.

À 16,63 euros le kilo (prix relevé dans un supermarché de région parisienne), ces steaks hachés sont plutôt abordables. Mais ils ont beau être vendus dans le même rayon que les autres, et afficher une illustration de parfaits steaks hachés, ils n'en portent en fait pas le nom.

De "faux" steaks pas si bon marché

Si l'on regarde de plus près l'emballage, on s'aperçoit que le produit s'appelle en réalité "préparation à base de viande bovine hachée". Et si on scrute en détails l'étiquette, on découvre une composition plutôt surprenante: 80% de viande, de l'eau, des fibres de bambou et de pois, de la fécule de pomme de terre, du sel, des arômes et des conservateurs...

Ce produit ne peut en fait pas, légalement, s'appeler "steak haché" puisque la règlementation prévoit qu'un steak haché contienne 99 à 100% de viande. En revanche, pour les préparations à base de viande, la norme n'impose qu'un minimum de 51% de viande.

Si l'on compare le prix et la teneur en viande des hachés "happy family" à d'autres produits du rayon, ils ne sont en fait pas si intéressants. Ils sont certes moins chers que les steaks hachés de la même marque, mais leur prix est à peu près équivalent à celui des (vrais) steaks hachés de marque de distributeur à 5% de matière grasse, et il est même supérieur au prix des steaks hachés de marque de distributeur à 15% de matière grasse.

Ces "faux" steaks sont pourtant, selon Romain Lebœuf, artisan-boucher et Meilleur Ouvrier de France, beaucoup moins chers à produire:

"Les fibres de bambou et de pois coûtent moins cher que la viande, et permettent un meilleur rendement puisqu'elles ont l'avantage d'absorber le jus. Cela crée de la rétention d'eau et gonfle artificiellement le poids du produit. Les industriels obtiennent du volume pour moins cher," explique-t-il à RMC Conso.

"Façon bouchère" = arnaque maketing?

Lui vend ses steaks hachés, dans sa boutique du 15ème arrondissement de Paris, autour de 20 euros le kilo... Soit le même prix que les steaks hachés estampillés "bon plan", toujours de la marque Charal. Une nouvelle gamme commercialisée depuis avril dernier et censée, comme son nom l'indique, être plus abordable.

Ces steaks "bon plan" sont cette fois bien composés à 100% de viande bovine, mais contiennent tout de même 18% de matière grasse, et un taux de maximum de 15% de collagène, c'est-à-dire de nerfs. Or, évidemment, plus un steak est riche en matière grasse, moins il coûte cher (théoriquement), puisqu'il contient moins de muscle.

"Je retire de ma viande hachée un maximum de gras et de nerfs, pour arriver à un taux de matière grasse entre 1 et 3%. Donc finalement, si vous prenez en compte le taux de gras et les nerfs de ces steaks industriels, vous vous rendez compte que la viande des artisans-bouchers est moins chère," argumente Romain Lebœuf.

Autre arnaque marketing dénoncée par l'artisan-boucher: les appellations qui laissent penser que le produit est artisanal. Les mots "authentique", ou encore, "façon bouchère" ne garantissent absolument rien en termes de fabrication.

D'ailleurs, une enquête de l'association de consommateurs Foodwatch de 2020 avait démontré qu'il n'y avait presque aucune différence entre un steak haché "façon bouchère" et un steak haché classique de la même marque: mêmes ingrédients, même viande, même teneur en matière grasse... Mais un prix au kilo supérieur de deux euros pour les "façon bouchère", dont le procédé de fabrication donnait uniquement des steaks plus aérés.

Vaches laitières réformées

"Ça ne reflète rien, c'est de la tromperie, je dirais même, du foutage de gueule," s'insurge Romain Lebœuf.

Son premier conseil, au moment de choisir sa viande, est de privilégier une viande française. L'origine est obligatoirement indiquée sur l'emballage. Il va même plus loin, en recommandant de se tourner plutôt vers des races à viande comme la Limousine, ou la Charolaise, des vaches élevées spécifiquement pour leur viande.

Lorsqu'il n'est rien précisé sur l'emballage, il est très probable que la viande soit issue de vaches réformées, c'est-à-dire de vaches laitières trop vieilles pour fournir du lait et qu'on a donc envoyées à l'abattage. Elles offrent une viande de moins bonne qualité.

Cherchez également la mention "steak haché", qui garantit que le produit n'est composé que de viande, et un taux de matière grasse le plus faible possible.

Vous pouvez également vous intéresser aux labels: label rouge, bio, IGP/AOP/AOC, qui garantissent une meilleure qualité de la viande.

Charlotte Méritan