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Alimentation

Les saveurs de Périco: Mackam Thaï, sanctuaire des saveurs siamoises

Sua long hai, le "tigre qui pleure"

Sua long hai, le "tigre qui pleure" - Périco Légasse

Niché près des Grands boulevards, ce restaurant asiatique déploie l’inventaire des saveurs et des senteurs de la tradition thaïlandaise à prix doux. L’occasion d’initier nos papilles à des codes alimentaires parfumés et d’explorer un univers dont l’exotisme transporte.

Dans la nébuleuse des cuisines de l’Orient extrême représentées en France, celles du sud-est asiatique se caractérisent par un raffinement aromatique les distinguant des autres répertoires.

Si la chinoise, par sa diversité, son ampleur, sa richesse, constitue à elle seule un patrimoine incomparable, il est indéniable, pour un gastronome sensible aux spécificités géographiques, que la vietnamienne, la cambodgienne, la laotienne et la thaïlandaise présentent elles aussi, dans leurs nuances et leurs différences, de subtilités infinies tirées des panoplies sensorielles du monde végétal.

Si la nature du produit, dans sa chair ou dans sa pulpe, reste le socle de ces gastronomies, le rôle des parfums dans la définition de chacune est essentiel, au sens littéral du terme, puisque toutes insistent sur la sublimation des essences selon leur puissance ou leur finesse dans un souci constant d’équilibre des contrastes. 

Salle à manger du restaurant
Salle à manger du restaurant © Périco Légasse

Sanctuaire plein de charme et d'exotisme

Parmi les différentes enseignes de cuisine thaïlandaise que compte la capitale, dont l’authenticité n’est pas contestable, au contraire de certaines abusant parfois de l’ignorance d’une clientèle non initiée, Mackham Thaï, rue Montyon, près du Faubourg Montmartre, s’inscrit au registre des restaurants de quartier sortant des sentiers battus par l’originalité de la prestation.

Réplique plus discrète du Siamin, sa maison mère, rue Bayard, dans le VIIIe, ce petit sanctuaire plein de charme et d’exotisme est tenu par San, dont la prévenance et le sourire attestent de la douceur du tempérament siamois. 

Dans un décor dédié à l’art thaïlandais dont les formes apaisantes épousent la sérénité des lieux, l’instant de table consacre les émois gustatifs conformes à la tradition thaï, dont la particularité est d’associer la délicatesse des textures avec la précision des senteurs, on savoure ici des spécialités aux intitulés aussi alléchants que dépaysants parmi lesquelles le kratong tong, des petits paniers croustillants aux crevettes et aux légumes, le makheu yang, une aubergine grillée à l’huile de sésame, le thod man plat, des palets de poisson aux mille aromates, et le kai baitey, papillotes de poulet mariné dans une feuille de baitey ne sont qu’une simple initiation pour papille occidentales. 

Citronnelle, noix de coco et galanga

L’avantage de cette culture alimentaire est qu’elle autorise la profusion et la prodigalité car servie en petites portions ne saturant jamais l’appétit. Les palais les plus curieux ne peuvent faire l’impasse sur les soupes dont le tom yen kung, la célèbre soupe de crevettes à la citronnelle, le tom yam phak, soupe de légumes et vermicelle à la citronnelle, et le tom kha kai, soupe de poulet à la noix de coco et galanga, ne font rien d’autres que prédisposer les papilles à d’autres expériences.

Un coup de cœur au paragraphe des salades pour le nom tam plaa, du filet de bar cru mariné au citron vert sur son lit de papaye verte, merveilleuse association suave et vivace, pour le yam fun sen, salade de vermicelle aux fruits de mer jouant sur le contraste des textures, et pour l’incontournable salade de papaye verte et ses petits légumes dont la fraicheur croquante caresse le palais. 

Une fois les sens stimulés, il s’agit d’entrer dans le vif du sujet et de s’en remettre aux suggestions d’une carte bien ciblée, dont les "délices du Siam" confirment le strict respect par le chef de la tradition thaïlandaise, à commencer par le laab dip, exquise salade de boeuf cru, émincé au couteau à la minute, aux mille épices, ped chichi, un filet de canard à la sauce chichi, à base de poisson fermenté dans une saumure, version thaï du nuóc mân, tout à fait succulent, le sua long hai, plus connu sous l’expression "tigre qui pleure", classique du répertoire thaïlandais, une entrecôte grillée dans une marinade d’herbes et de piments séchés, dont l’excellence est ici confirmée, et le kaeng massaman pea, un mijoté d’agneau en curry à l’arachide et lait de coco absolument sublime. 

Laab dip, salade de bœuf cru
Laab dip, salade de bœuf cru © Périco Légasse

Le poisson à l'honneur

La Thaïlande étant entourée de mers, le poisson est évidemment à l’honneur, notamment avec le kung pad khapao, des crevettes sautées au basilic et au poivron, plat alerte et pointu par son assaisonnement, et le plaa nungmanao, un filet de bar cuit à la vapeur et au citron vert, à la fois caressant et subtile. À signaler également pour leur haute teneur gastronomique, deux mets fétiches du Mackham Thaï, le pea phad prikthai on, du gigot d’agneau sauté au poivre vert frais, parfaitement saisi, avec une pointe de vigueur poivrée en finale, et le nam man hop nua, exercice inspiré par l’accord terre mer, composé de dès de filet de bœuf caramélisés à la sauce d’huître, onctueux, long en bouche, simplement divin.

Même si elles sont souvent adaptées à nos paramètres alimentaires, il est toujours intéressant d’explorer les cultures culinaires de l’Asie pour apprécier leur capacité à extraire des émotions inattendues de denrées dont nous ignorons parfois les vertus ou à mettre en scène des associations de saveurs  avec un sens avéré de l’harmonie. Un phénomène auquel la cuisine thaï apporte une dimension particulière par sa richesse et sa diversité comme le démontrent les délices du Mackham Thaï.

Mackham Thaï, 11 rue Montyon, Paris IXe. Tel.: 01 47 70 40 95. Formule déjeuner à 16,50 et 19,50€. Menu découverte à 25€ et menu dégustation à 35€. Ouvert tous les jours.

Périco Légasse