Yaourt Danone, Babybel, Mars: les versions hyper-protéinées de ces produits ont-elles un intérêt?

C'est un marché qui a le vent en poupe. La nutrition sportive ne connaît pas la crise: avec une croissance annuelle de 8%, son chiffre d'affaires en France avoisine le milliard d'euros en 2023, selon l'institut d'études privé Xerfi.
Portées par l'engouement autour des thématiques de santé et de bien-être, ainsi que par les Jeux olympiques de Paris, de plus en plus de marques de grande consommation sortent des versions hyper-protéinées de leurs produits.
Certaines sont à destination des sportifs et vendues en magasins spécialisés, d'autres ciblent le grand public et se retrouvent en rayons des grandes surfaces alimentaires. Mais ces produits sont-ils vraiment meilleurs pour notre santé? RMC Conso fait le point avec Laura Martinez, diététicienne-nutritionniste du sport.
Une supplémentation pas forcément utile
Popularisée par les régimes hyper-protéinés à la mode dans les années 2000, l'idée selon laquelle les protéines sont un allié minceur n'est pas tout à fait vraie.
"Les protéines ont un effet sur le rassasiement, c'est pour cela qu'elles sont souvent mises en avant dans les régimes, mais elles ne font pas maigrir," explique Laura Martinez.
Elle précise également que "dans le cadre d'une alimentation équilibrée, on consomme suffisamment de protéines et on n'a pas besoin de se supplémenter, à moins de faire beaucoup de sport intensif. Pour un footing le dimanche matin, il est inutile de manger hyper-protéiné".
Le risque, en cas de consommation excessive de protéines, est de fatiguer ses reins. Les recommandations sont de "0,8 g de protéines par kilo de poids et par jour, soit 44 grammes par jour pour une femme de 55 kilos, ce qui représente par exemple 120 grammes de viande, un yaourt et 30 grammes de fromage répartis dans la journée" selon le site du dictionnaire Vidal.
"Au-delà, le corps n'utilise tout simplement pas le surplus de protéines consommé, qui est donc filtré par les reins. Mais en réalité, je n'ai vu des complications que dans des cas de consommation vraiment très très excessive de protéines," ajoute la spécialiste de la nutrition.
Stratégie marketing et prix exorbitants
Manger des produits hyper-protéinés, lorsqu'on a un mode de vie classique, avec une pratique sportive modérée, n'est donc pas dangereux pour la santé, mais bien inutile. D'autant que ces allégations santé et nutrition mises en avant sur les étiquettes de ces produits cachent parfois des réalités décevantes.
"Dans les Babybel soi-disant plus riches en protéines, il n'y a que 0,2 grammes de protéines de plus par portion que dans un Babybel classique, ça ne représente quasiment rien. Le prix, en revanche, est trois fois plus élevé," s'insurge Laura Martinez.
Même constat dans les yaourts à la vanille Hipro de Danone, qui ne contiennent que 0,3 grammes de protéines de plus pour 100 grammes de produit que dans un yaourt à la vanille classique. Et là encore, au kilo, le tarif est deux à trois fois plus élevé.
Ces stratégies marketing autour de la nutrition, de la santé et du sport servent donc à créer des produits prétendument plus sains mais avant tout plus chers. En termes de composition, ils sont soit quasiment équivalents à leurs versions classiques (c'est le cas des Babybel) soit... bien moins bons.
"En termes de valeurs nutritionnelles, c'est vrai que les yaourts Hipro sont un peu moins gras et moins sucrés que des yaourts classiques. Le problème, c'est que la liste des ingrédients est longue et comporte des additifs," note Laura Martinez.
Additifs et édulcorants
"Quand on enlève de la matière grasse, pour conserver la même texture et la même conservation, on est obligé d'ajouter des émulsifiants et des stabilisants. On retire quelque chose de naturel pour mettre à la place quelque chose qui ne l'est pas," détaille-t-elle.
Et pour que ces desserts lactés gardent leur côté gourmand, les industriels remplacent le sucre par des édulcorants, dont l'intérêt pour la santé est largement remis en cause, certaines études ayant montré qu'ils augmentaient le risque de diabète de type 2, de maladies coronariennes, voire de certains cancers.
"Plus la liste des ingrédients est longue, plus l'aliment est transformé. Je n'ai pas compté le nombre d'ingrédients de la barre chocolatée Mars, mais il est impressionnant. Et parmi eux, de l'huile de palme et énormément d'additifs, qu'on repère par la présence d'E suivi de trois chiffres," nous informe Laura Martinez.
La barre chocolatée Mars, vendue dans des magasins spécialisés dans la nutrition sportive, contient bel et bien beaucoup plus de protéines que la barre chocolatée classique, et moins de graisses, de sucres et de calories. Mais cela reste une barre chocolatée, et pour la nutritionniste, la liste d'ingrédients à rallonge n'en fait pas un atout santé, même pour les grands sportifs.
Selon elle, on trouve d'excellentes source de protéines dans des aliments bien plus naturels. Elle recommande, par exemple, le skyr, le fromage blanc ou le petit-suisse.
"Je ne diabolise pas les produits ultra-transformés, on peut en consommer de temps en temps. Mais je ne les conseille pas au quotidien," conclut-elle.