En Auvergne-Rhône Alpes, plus de 160.000 personnes boivent une eau contaminée aux polluants éternels

166.000 habitants de la région Auvergne-Rhône-Alpes consomment des eaux polluées. - Fred Tanneau - AFP
Des résultats inquiétants. Près de 166.000 Français consomment des eaux polluées en Auvergne-Rhône-Alpes, d'après les conclusions d'une enquête de l'Agence régionale de santé (ARS), publiées ce lundi. Le taux de "polluants éternels" détecté est supérieur au seuil de référence européen, selon les résultats.
Ces composés poly et perfluoroalkylés (une famille regroupant plus de 4.700 molécules), sont dotés de propriétés anti-adhésives et imperméables et sont massivement présents dans la vie courante: poêles en Teflon, emballages alimentaires, textiles imperméables, automobiles, etc.
Des communes sommées d'agir
La consommation de ces eaux n'est pas interdite, mais l'ARS a - pour la première fois - demandé des mesures correctives à la cinquantaine de communes concernées. La plupart d'entre elles sont situées dans la vallée de la chimie au sud de Lyon.
Sous peine d'être mises en demeure, ces collectivités ont dû présenter au plus vite "les mesures de leur choix pour revenir sous le seuil" de 100 nanogrammes par litre, et auront trois ans pour les mettre en place, a expliqué à la presse Aymeric Bogey, directeur de la santé publique de l'agence.
La "limite de qualité, même si elle est dépassée, ne veut pas dire qu'il y a un risque immédiat pour la population", a-t-il tenu à souligner: "en l'état des connaissances actuelles, on ne sait pas à partir de quel niveau de PFAS il y a un risque avéré", mais "on ne peut pas attendre" pour agir. L'agence a ciblé des ressources en eau "potentiellement à risque" et repéré huit situations clairement au-delà de la limite qualité, dont deux sur des puits privés, a précisé Christel Lamat, responsable régionale des eaux.
Des mesures déjà efficaces
La ville de Rumilly, en Haute-Savoie, où se trouve une usine Tefal, a été contrainte de renoncer à deux captages contaminés en 2022, après la découverte dans ses nappes phréatiques de PFOA, une substance interdite depuis 2020 en raison de son caractère cancérigène. Celle de Valence a mis en service une station de traitement des PFAS en novembre.
Selon Aymeric Bogey, les deux principales solutions à disposition des collectivités sont le traitement par charbon actif ou "se connecter à d'autres réseaux pour diluer la ressource ou se priver du captage problématique".
De potentiels effets sur la fertilité
Quasi-indestructibles, les polluants éternels s'accumulent avec le temps dans l'air, le sol, les eaux des rivières, la nourriture et jusqu'au corps humain, d'où leur surnom de polluants "éternels". En cas d'exposition sur une longue période, ils peuvent avoir des effets sur la fertilité ou favoriser certains cancers, selon de premières études.
Après la diffusion de plusieurs enquêtes journalistiques en 2022, les autorités régionales avaient lancé des contrôles, notamment au niveau de l'ARS, qui a mis en ligne le résultat de cette campagne ce lundi.
Ces derniers mois, plusieurs collectivités et particuliers ont lancé des plaintes collectives pour "mise en danger de la vie d'autrui" en s'inquiétant de "concentrations alarmantes" de PFAS liés à des sites industriels dans la vallée de la chimie.