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Pollution, pesticides, pratiques illégales... Comment choisir entre eau du robinet et eau en bouteille?

72% des Français sont satisfaits de la qualité globale de l'eau du robinet.

72% des Français sont satisfaits de la qualité globale de l'eau du robinet. - Fred Tanneau - AFP

L'eau a fait l'objet de nombreuses révélations durant les dernières années. Menées pour le bien des consommateurs, ces études peuvent chambouler les habitudes de consommation des Français. Eau potable du robinet ou eau embouteillée, laquelle choisir? RMC Conso fait le point avec deux spécialistes.

Un milieu en tension. Alors que les eaux en bouteilles font face à un scandale révélé par Le Monde et Radio France sur les techniques de purification illégales utilisées par certaines grandes marques, une partie des consommateurs se retrouve dans l’incompréhension.

Si près de 68% des Français consomment quotidiennement l’eau du robinet pour s’hydrater, 48% continuent tout de même de préférer l’eau en bouteille, d’après la 25e édition du baromètre annuel de Kantar pour le Centre d'information sur l'eau (Cieau).

Pour cause, l’eau du robinet et l’eau embouteillée ont été à tour de rôle pointées du doigt par plusieurs études. De quoi rendre le choix encore plus difficile pour les consommateurs. RMC Conso fait le point sur l'option la plus saine avec Sylvie Thibert, ingénieure en charge des risques sanitaires et responsable de la qualité de l'eau au Syndicat des Eaux d’Île-de-France (SEDIF) et Lisa Faulet, responsable scientifique et alimentation au sein de l’Association nationale de consommateurs et usagers (CLCV).

L’eau du robinet strictement réglementée

Une fois captée, l’eau potable est acheminée vers une usine de potabilisation pour être traitée. Le type de traitement dépend de la provenance de cette dernière, ainsi que de sa qualité initiale. Avant d’être distribuée, l'eau passe une série d’analyses qui permettent de vérifier sa conformité aux normes européennes.

"L’eau du robinet est encadrée par des recommandations de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Elles sont reprises par une réglementation européenne et déclinées dans le droit français", explique Sylvie Thibert. 

"L’eau potable du robinet est souvent perçue comme étant l’aliment le plus contrôlé ", ajoute-t-elle. Sa qualité fait l’objet d’un suivi très régulier. En tout, près de "54 paramètres différents font l'objet d'une surveillance et sont régulièrement contrôlés", explique l’UFC-Que choisir dans un article. 

Ces contrôles sont menés par les pôles Santé et Environnement des Agences régionales de santé (ARS). Mais les services responsables des usines de traitement pour la potabilisation et des réseaux de distribution appliquent également un suivi.

"Il y a un cadre qui est bien établi. En France, la très grande majorité des eaux distribuées respectent ces normes", insiste l’ingénieure spécialisée en qualités des eaux.

Polluants éternels et pesticides


Le 15 janvier dernier, l’Agence régionale de Santé Auvergne-Rhône-Alpes a indiqué avoir détecté la présence de polluants éternels, molécules chimiques très difficilement destructibles, dans son eau du robinet destinée à la consommation. Les taux retrouvés dépassaient le seuil de référence européen.

"Ces polluants présentent des milliers de familles différentes. Une nouvelle réglementation qui entrera en vigueur le 1er janvier 2026 au plus tard en encadrera seulement 20", regrette l’ingénieure. 

Une tribune de 21 chercheurs demandant une meilleure réglementation de ces derniers a été publiée en décembre dernier dans Le Monde. Mais l’état des connaissances actuelles "ne permet pas de connaître quels sont les risques encourus" en cas de consommation prolongée d’eau contaminée par ces polluants, selon la spécialiste.

Pour ce qui est des pesticides, un rapport publié par l'Agence nationale de sécurité sanitaire alimentaire nationale (Anses) en avril dernier, faisait état d’une présence de résidus de pesticides interdits depuis 2020 dans l’eau du robinet. En tout, près de 34% de la population serait exposée.

"Nous pensons que ce problème est lié à la problématique de persistance de pesticide dans les sols. Nous sommes également convaincus du fait que c’est une contamination qui concerne également les eaux en bouteilles qui viennent des nappes phréatiques, comme celles de la marque Cristaline", explique Lisa Faulet.

L’eau embouteillée, entre réglementation et présence de plastique

Malgré la récente enquête autour des techniques de purification interdites utilisées par les industriels, Sylvie Thibert assure que l’eau embouteillée est "tout aussi encadrée que l’eau du robinet". "Tout comme celle du robinet, elle est soumise au Code de la santé publique", précise-t-elle.

Bien avant l’enquête conjointe du Monde et de Radio France, les eaux en bouteilles avaient fait l’objet d’une autre accusation portée par des chercheurs américains. Leurs conclusions, publiées le 9 janvier dernier, dans la revue Proceedings of the National Academy of Sciences, ont mis en lumière la présence de fragments de plastiques dans les eaux vendues dans des bouteilles en plastique.

"Il n’y a pas encore d’étude sur le risque de la présence de ces particules dans les eaux embouteillées. Par ailleurs, il faut également rappeler que ces nano-particules sont présentes dans l’air, mais aussi dans certains aliments. Le risque sanitaire qu’elles représentent n’a pas encore été établi", avance l’ingénieure.

Arguments économiques et éco-responsables

En fin de compte, l’eau, qu’elle soit issue du robinet ou embouteillée, peut présenter des risques de présence de pesticides, de particules de plastique et de contamination aux polluants éternels. Le choix peut alors devenir difficile pour le consommateur. L’aspect éco-responsable de l’eau potable du robinet peut vous aider à trancher. 

"L’eau du robinet est locale, elle a par conséquent une meilleure empreinte environnementale que l’eau en bouteille qui voyage parfois sur des milliers de kilomètres", avance Sylvie Thibert. 

Cette dernière a également l’avantage de ne pas produire de déchet plastique. De son côté, l’Association nationale de consommateurs et usagers fait valoir l’argument économique: "L’eau du robinet est beaucoup moins chère", insiste Lisa Faulet.

En effet, à Paris, le coût du litre d’eau du robinet est d’environ 0.004 centime d’après Eau de Paris, contre 0,20 centimes pour de l’eau de source et 0.40 centimes pour de l’eau minérale.

Sabrine Mimouni