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Origines, produits concernés, risques: tout savoir sur les "polluants éternels" qui contaminent notre quotidien

Les polluants éternels sont aussi présents dans l'eau du robinet.

Les polluants éternels sont aussi présents dans l'eau du robinet. - Anne-Chrisitine Poujoulat - AFP

De plus en plus présents dans les eaux, comme l'a démontré une récente étude de l'Agence régionale de santé d'Auvergne Rhône-Alpes, mais aussi dans de nombreux objets du quotidien, les "polluants éternels" représentent un risque environnemental et sanitaire majeur.

Des polluants quasi-impossibles à déloger. Les PFAS, acronymes anglais de “per- and polyfluoroalkyl substances”, sont des molécules chimiques très difficilement destructibles et capables de survivre pendant des siècles sur la même surface. Leur présence dans l’environnement a une origine uniquement anthropique, c’est-à-dire causée par l'activité industrielle humaine. Qu'est-ce qu'un polluant éternel? Est-ce une sustance dangereuse pour la santé? Dans quels produits de consommation les retrouve-t-on? RMC Conso fait le point.

• Qu’est-ce qu’un polluant éternel?

Classés comme toxiques, bioaccumulables et persistants, les ‘polluants éternels’ se déclinent en des milliers, voire des millions de composés chimiques. "Ils ne se dégradent pas dans l’environnement et constituent l’une des plus graves contaminations auxquelles le monde est aujourd’hui confronté”, expliquent nos confrères du Monde dans une enquête publiée sur le sujet en février 2023.

L’Inspection générale de l’environnement et du développement durable (IGEDD), a également éudié ces molécules. Dans un rapport publié en avril 2023, elle explique que “les PFAS, ou substances poly ou perfluoroalkylées, comptent plusieurs milliers de molécules différentes, toutes de synthèse, dont plusieurs centaines font l’objet de multiples usages allant des émulsifiants pour la lutte contre les feux d’hydrocarbure au traitement de surface des métaux ou aux fluides hydrauliques”.

En effet, dotés de propriétés antiadhésives, résistants aux fortes chaleurs et imperméabilisants, ces polluants sont massivement utilisés dans l'industrie depuis les années 1950.

• Comment se contamine-t-on aux PFAS?

La principale voie de contamination humaine et animale “est la consommation d’eau et d’aliments contaminés”, indique l’IGEDD dans son rapport. Mais ce n’est pas tout, puisqu’il est également possible d’inhaler ces molécules en les respirant.

“En France, des PFAS […] sont présents dans le sang de la totalité de la population, adultes et enfants, comme l’a montré le programme de biosurveillance Esteban en 2020″, rapporte Le Monde dans son enquête.

Une étude du niveau d'imprégnation de la population française a été menée en 2019 par Santé Publique France. Ses résultats ont montré que 7 types de PFAS étaient régulièrement quantifiés chez les adultes et 6 chez les enfants. Le PFOA et le PFOS, deux sous-familles des PFAS, ont été détectés à 100% chez les enfants et les adultes. En Europe, près de 17.000 sites sont contaminés, selon la carte du Monde.

• Quels risques pour la santé?

L’inspection générale de l’environnement et du développement durable estime que les connaissances sur les risques sanitaires engendrés par l’exposition aux PFAS sont encore “insuffisantes”.

Mais ces polluants sont soupçonnés de provoquer diverses pathologies chez les personnes longuement exposées. “Problèmes cardio-vasculaires, augmentation du taux de cholestérol, perturbation de la fertilité et de la spermatogenèse, diminution de la réponse immunitaire aux vaccins”, énumère l’enquête du Monde.

L'exposition à ces polluants peut donc avoir des conséquences sur la fertilité mais aussi sur le développement d'un fœtus, selon une étude menée par des chercheurs américains dont les résultats ont été publiés lundi 8 janvier dernier, dans la revue scientifique Lancet Planetary Health.

• Où retrouve-t-on ces molécules?

Les polluants éternels sont partout autour de nous. Dans l’eau que nous buvons, dans les aliments que nous consommons, mais aussi dans les objets du quotidien. Antiadhésifs, imperméabilisants, résistants aux fortes chaleurs, les PFAS sont largement utilisés dans divers domaines industriels et produits de consommation courante. L’Agence régionale de santé d'Auvergne a établi une liste des surfaces sur lesquelles on peut en retrouver:

• Composants pour emballages alimentaires en papier et en carton.

• Mousse anti-incendie.

• Produits utilisés pour la photographie, la lithographie.

• Fart utilisé sous les skis pour améliorer la glisse.

• Isolant pour fils électriques.

• Câbles électroniques.

• Produits ménagers, agents ou imperméabilisants ou antitaches dans l’industrie du textile (vêtements de pluie, moquettes et tissus d’ameublement).

• Ustensiles de cuisine anti-adhésion.

• Embouts buccaux de cigarette électronique.

• Semelles de fers à repasser.

• Lubrifiants et cires pour sols et voitures.

• Agents antibuée, antistatiques ou réfléchissants pour vernis et peintures.

• Peut-on s'en débarasser?

Pour le moment, la population n'a aucun moyen concret de se protéger de ces polluants délétères pour la santé humaine. En effet, les techniques pour dégrader ces substances requièrent des traitements puissants, comme l'incinération à très haute température ou l'irradiation par ultrasons.

En ce qui concerne la réglementation, selon l’IGEDD, "la France ne réglemente aucun PFAS dans le contrôle des eaux brutes et des eaux destinées à la consommation humaine." Face aux dangers de ces molécules, une prise de conscience politique et une régulation globale sont pourtant indispensables pour agir.

Encouragée par les pays nordiques, l'Agence européenne des produits chimiques pourrait porter une première proposition d'interdiction à l'échelle européenne en 2025.

Sabrine Mimouni