RMC Conso
Se déplacer

Assurance automobile: ne pas déclarer un sinistre pour éviter un malus, bonne ou mauvaise idée?

placeholder video
30% des Français ne déclarent pas toujours leurs sinistres à leur assurance, selon une étude de l’assureur Leocare. La principale raison est économique. Mais est-ce vraiment une bonne idée?

Camoufler soi-même une petite rayure, faire réparer un bris de glace par un ami garagiste... Dans un contexte de baisse du pouvoir d'achat, beaucoup de Français choisissent le système D quand il s'agit de leur automobile. Et ne déclarent pas leur sinistre à leur assurance.

L'objectif: éviter le malus et donc la hausse de sa cotisation d'assurance, sachant qu'en 2025, les primes ont augmenté, en moyenne, de 6%. Le budget assurance des automobilistes français est passé de 634 à 672 euros par an. Toute économie est donc bonne à prendre.

Mais est-ce légal de ne pas déclarer son sinistre? Et est-ce vraiment avantageux? RMC Conso fait le point.

Une pratique tolérée

Le code des assurances prévoit, dans son article L113-2, que l'assuré doit informer l'assureur de tout sinistre de nature à entraîner sa garantie. Si l'on s'en tient à cet article de loi, tout accrochage même minime et même sans tiers impliqué devrait entraîner une déclaration à partir du moment où on est assuré tous risques.

Pourtant, 30% des Français renoncent à déclarer des sinistres, selon une étude de l'assureur Leocare parue jeudi 3 avril. Parmi eux, 46% ne signalent pas un impact de gravillon sur un pare-brise et 59% ne déclarent pas un accrochage avec un trottoir.

Cela ne fait pas d'eux des hors-la-loi, selon Me Vanessa Fitoussi, avocate au barreau de Paris spécialisée en droit automobile, contactée par RMC Conso: "à partir du moment où on est prêt à payer les réparations de sa poche, on fait ce qu'on veut. En revanche, si une assurance adverse est impliquée et qu'elle sollicite votre assureur, vous serez obligé de faire une déclaration."

Si un tiers est impliqué, ou si l'accident a pour conséquence un dommage corporel (si vous êtes blessé), la déclaration à l'assurance est cette fois formellement obligatoire. Néanmoins, un sinistre qui n'implique que vous et n'a causé que de très légers dégâts esthétiques peut sans problème ne pas être déclaré.

Éviter le malus

Ne pas déclarer un sinistre minime présente plusieurs intérêts et le premier est évidemment d'éviter le malus appliqué sur le calcul des cotisations pour l'année suivante.

En effet, chaque fois que vous subissez un sinistre dont vous êtes responsable, votre cotisation est majorée de 25%. Si vous accumulez les accidents, la hausse est salée: en atteignant le coefficient maximum, votre cotisation est multipliée par 3,5.

"Ainsi, pour une prime de référence de 1.000 euros, le montant maximum de prime est de 3.500 euros," indique le site service-public.fr.

Néanmoins, si vous n'avez pas eu d'accident pendant plusieurs années, il y a des chances que les bonus accumulés réduisent le coût de cette majoration. Mais dans le cas où vous avez le coefficient de base, 1, appliqué la première année de votre contrat, une majoration de 25% fait passer une prime annuelle de 600 euros à 750 euros.

Si la réparation du sinistre est inférieure à 150 euros, la question de la déclaration se pose donc: il peut être économiquement plus intéressant de faire réparer soi-même plutôt que de passer par son assurance.

"L'assurance, moins elle paye, mieux elle se porte, donc elle ne vous en voudra pas de faire réparer vous-même ce type de sinistre minime," assure Me Fitoussi.

Il existe toutefois quelques cas où aucun malus n'est appliqué. Dans les cas suivants, la déclaration est donc forcément à votre bénéfice:

- Si vous avez le bonus maximum depuis au moins 3 ans. Il ne s'obtient qu'au bout de 13 ans sans sinistre responsable. Donc cela signifie 16 années de conduite irréprochable...

- Pour tout sinistre dont vous n'êtes pas responsable ou bien dont vous êtes responsable mais qui était imprévisible et inévitable: traversée d’un animal sauvage, gravillons sur la route, défaut des panneaux de signalisation, météo dégradée non prévue... Mais aussi le vol ou l'incendie.

-Sachez aussi que le bris de glace, un incident relativement commun, n'est pas pris en compte dans le malus. Vous pouvez donc le déclarer sans crainte.

Réparations inférieures à la franchise

Ne pas déclarer un sinistre peut être particulièrement tentant lorsque le montant des réparations est inférieur à la franchise. La franchise, c'est ce qu'il vous reste à payer une fois que l'assurance vous a indemnisé.

"Pour des dégâts mineurs, il est clair que la question se pose: si vous avez une franchise à 200 euros et que la réparation est à 150, vous n'avez aucun intérêt à déclarer votre sinistre," explique Noureddine Bekrar, cofondateur de Leocare, interrogé par RMC Conso.

En effet, dans pareil cas, l'assurance ne vous versera rien: autant faire réparer sans passer par elle. Cela ne vous coûtera pas plus cher et vous éviterez le malus.

L'assureur recommande donc de faire un devis avant sa déclaration de sinistre, lorsqu'on pense que les réparations seront moins onéreuses que le montant de sa franchise.

La franchise est souvent un levier utilisé pour faire baisser le prix de l'assurance: plus elle est élevée, moins vous payez de cotisations. Attention néanmoins à la prise de risque qu'elle entraîne: si vous avez une franchise à 1.500 euros, l'assurance ne vous indemnisera qu'à partir de 1.500 euros de dégâts. En dessous, vous paierez de votre poche.

Phobie administrative

Parmi les raisons également avancées par les automobilistes consultés pour l'étude de Leocare, il y a également... La phobie administrative. Et la peur de la paperasse à gérer lorsqu'on doit déclarer un sinistre. Attention, ce n'est pas une bonne raison!

Si vous êtes peu regardant et que les dégâts se révèlent plus importants que vous ne le pensiez, ce sera à vous de payer la totalité. Il y a un délai pour déclarer un sinistre, inscrit sur votre contrat: vérifiez bien. Il est généralement de cinq jours.

Enfin, n'oubliez pas qu'il y a une grande différence entre ne pas déclarer un sinistre par intérêt économique, une pratique à la limite de la loi mais tolérée, et... Surévaluer le montant des dommages auprès de son assurance, ce qui revient à une fraude à l'assurance, un délit relativement grave qui peut entraîner une résiliation de l'assurance et des poursuites judiciaires.

Charlotte Méritan