50 euros de prime pour réparer un lave-linge: après un bilan décevant, le bonus réparation réhaussé en 2024

Le bonus réparation a été mis en place en décembre 2022 pour encourager les consommateurs à réparer leurs appareils électriques et électroniques plutôt que de les remplacer. Il s'agit en fait d'une prime à la réparation, directement déduite de la facture. Pourtant, en 2023, peu de consommateurs y ont eu recours. Pourquoi? RMC Conso fait le bilan.
63 millions d'euros de budget étaient alloués à cette mesure, mais seulement 6% de cette somme ont été dépensés, pour environ 165.000 réparations. Selon l'association HOP (Halte à l'obsolescence programmée), neuf réparations sur dix se sont faites sans bonus réparation. Trois principales raisons expliquent ce bilan décevant.
Manque de communication
La première est une méconnaissance du public : toujours selon l'étude de HOP, 70% des Français n'ont jamais entendu parler du bonus réparation. Malgré un relais médiatique important, l'absence de communication au sein des plus grosses enseignes d'électroménager est à déplorer, selon l'association.
Le bonus réparation est pourtant ouvert à tous sans conditions. Compris auparavant entre 10 et 45 euros, ses montants ont été réhaussés en 2024. Il permet désormais d'obtenir une réduction sur sa facture de réparation, qui va de 15 à 60 euros selon l'appareil réparé.
Pour faire simple, les gros appareils d'électroménager permettent de bénéficier d'un bonus d'une cinquantaine d'euros, quand les petits appareils offrent un bonus de 15 ou 20 euros. Un chiffre qui reste fixe, il n'est pas corrélé au montant de la facture finale. C'est le réparateur directement qui avance le bonus, en le soustrayant au prix réclamé au client, et qui se fait rembourser par la suite.
Doutes sur l'intérêt économique de la réparation
La réparation vaut-elle vraiment mieux que le remplacement? Sur le plan écologique, l'intérêt est clair: lutter contre la surproduction, limiter ce type de déchets dangereux et rarement recyclés...
Mais d'un point de vue économique, la réponse est non pour 53% des Français, selon le think tank Terra Nova. D'ailleurs, dans le sondage réalisé par HOP pour son étude, seul un utilisateur du bonus réparation sur quatre avait été incité à en bénéficier par souci d'économies, alors que près de la moitié y voyait un beau geste à faire pour la planète.
Pourtant, plusieurs études dont celle réalisée par l'ADEME (Agence pour la transition écologique) en 2019, un rapport du think tank Terra Nova d'octobre 2023, et un bilan réalisé par l'association CLCV (Consommation logement cadre de vie) début 2024, mettent en avant que réparer fait plus de bien au porte-monnaie que remplacer.
Intéressant pour les gros appareils
Le problème, c'est que les consommateurs ne se contentent pas de regarder le gain financier. Plusieurs facteurs entrent en jeu: la durabilité de la réparation, le temps requis pour réparer... L'ADEME a calculé que les Français étaient prêts à réparer plutôt qu'à remplacer à condition que le coût de la réparation ne dépasse pas un tiers du prix du produit neuf.
Or si l'on prend l'exemple d'une machine à laver, dont le prix moyen de réparation s'élève à 180 euros selon travaux.com, soit 130 euros une fois le bonus réparation déduit, on atteint tout juste un tiers du prix moyen d'un lave-linge neuf (environ 400 euros).
A l'inverse, pour un micro-onde dont le prix moyen de réparation est évalué à 230 euros toujours selon travaux.com, avec un bonus réparation de 20 euros, réparer ne vaut plus le coup: on trouve des micro-ondes neufs à un prix inférieur au coût de réparation.
L'étude de CLCV corrobore d'ailleurs ces exemples: réparer a un intérêt économique clair pour les gros appareils, mais plus réduit pour les petits.
Sans compter que le coût des réparations a globalement augmenté, de 10 à 15% en 2023, toujours selon CLCV. Peut-être à cause d'un effet d'aubaine engendré par la création du bonus réparation.
Manque de réparateurs agréés
Une troisième raison, et non des moindres, qui peut expliquer la réticence des Français à utiliser ce bonus est le nombre trop restreint de réparateurs agréés. On ne peut effectivement bénéficier du bonus réparation que si l'on fait réparer son matériel chez un réparateur doté du label Qualirépar, dont la liste est accessible sur le site officiel.
Si l'on cherche un réparateur dans une commune hyper-rurale, comme par exemple Caubous, en Haute-Garonne, pour la réparation d'un lave-linge, l'annuaire nous annonce qu'"il n'y a pour le moment pas de réparateur labellisé pour ce type d'équipement à moins de 40km". Le plus proche se trouve à plus d'une heure de route.
Mais les campagnes ne sont pas les seules concernées par ce manque de main d'oeuvre: à Paris, il y a un réparateur pour 25.000 habitants.
200 euros l'agrément
Sur plus de 24.000 professionnels recensés, seuls 4.700 sont agréés. Pourquoi? Peut-être parce que l'agrément a un coût: 200 euros à renouveler au bout de trois ans. Un effort a été fait de ce côté-là, puisqu'il fallait débourser 447 euros pour en bénéficier en 2023.
La nécessité d'avancer le bonus est un autre frein pour les réparateurs, même si le gouvernement s'est engagé à le reverser dans les 15 jours qui suivent la réparation (contre 30 avant).
Ces nouveautés pour 2024 ont pour but d'augmenter de manière significative le nombre de réparateurs agréés, laissant espérer une amélioration du maillage territorial et donc une augmentation du nombre de consommateurs qui bénéficieront du bonus réparation cette année.