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Actimel, HiPro, Danonino: pourquoi ces yaourts à boire sont dans le viseur des nutritionnistes

Le nouvel "Actimel+ Triple Action" lancé par Danone en septembre 2024 est particulièrement dans le viseur des créateurs du Nutri-Score

Le nouvel "Actimel+ Triple Action" lancé par Danone en septembre 2024 est particulièrement dans le viseur des créateurs du Nutri-Score - Equipe de Recherche en Epidémiologie Nutritionelle (EREN)

Une tribune signée par 36 nutritionnistes reproche à Danone d'avoir retiré le Nutri-Score de ses différentes gammes de yaourts à boire. Empêchant ainsi les consommateurs d'être éclairés sur la teneur en sucre de ces produits. L'entreprise reproche au Nutri-Score d'avoir modifié sa méthode de calcul.

Sur son site Internet, Danone insiste sur les bienfaits d'un de ses produits phares, l'Actimel. Il est présenté comme "un symbole de santé et de soutien au système immunitaire", "riche en vitamine D et source de vitamine B6". Mais d'après une tribune cosignée par 36 nutritionnistes, parmi lesquels le créateur du Nutri-Score Serge Hercberg, la multinationale laitière en fait trop.

"Est-il acceptable que des produits alimentaires se donnent une image santé sur la base de quelques allégations et, par contre, masquent la réalité de leur teneur très élevée en sucres?", interroge ce texte publié sur le blog consacré au Nutri-Score de l'Equipe de recherche en épidemiologie nutritionelle (EREN).

Cette équipe de recherche rattachée notamment à l'Inserm vise plus particulièrement les yaourts à boire et les boissons protéinées commercialisés par Danone à travers ses différentes marques (Actimel donc, mais aussi Danonino, Activia, HiPro et Alpro). Certains de ces produits ont effectivement des quantités de sucre relativement élevées.

L'Actimel, aussi sucré qu'un soda

L'Actimel Fraise, ou celui goût Fruits des bois, comportent par exemple 11,9 grammes de sucre pour 100 ml. Une teneur en sucre comparable à celles de sodas, ou de laits aromatisés: 100 ml de Coca-Cola comportent par exemple 10,6 grammes de sucre.

"Il est inacceptable que des produits autant sucrés soient présentés comme bons", s'insurge auprès de RMC Conso le Professeur Serge Hercberg, principal signataire de la tribune.

Ce dernier reproche en particulier à Danone sa décision, en septembre 2024, de retirer le Nutri-Score des emballages de ses yaourts à boire. L'étiquetage nutritionnel venait alors d'adopter une nouvelle méthode de calcul pour ce type de produits, les pénalisant davantage.

Le Nutri-Score de l'Actimel dégradé de B à D

Concrètement, avec le précédant Nutri-Score, les yaourts à boire étaient considérés comme des laitages, au même titre que les yaourts à la cuillère. L'Actimel était ainsi classé en B pour sa gamme parfumée aux fruits, et même en A pour celle "Sans sucres ajoutés". Avec le nouvel algorithme, qui estime que ces produits sont des boissons, la première tombe en D, l'autre en B. Serge Hercberg insiste néanmoins sur le fait que cette dégradation n'est pas synonyme d'interdiction.

"Même avec un Nutri-Score D ou E, un produit peut tout à fait être consommé. Cependant, il ne doit pas l'être en trop grande quantité, ni trop fréquemment. Avec la précédente méthode, l'Actimel classé B mais trop sucré pouvait être perçu comme un fruit ou un légume, à consommer immodérément", affirme-t-il à RMC Conso.

Danone dénonce la classification comme "boisson" de l'Actimel

Malgré tout, cette dégradation de la note est difficile à avaler du côté de chez Danone. L'entreprise conteste en particulier la classification de ses produits comme des boissons, qui implique qu'ils soient mis en comparaison avec des sodas, jus de fruits, ou de l'eau.

"La grande majorité de nos consommateurs se servent du yaourt à boire comme un dessert. Le premier substitut d'un Actimel, c'est donc un yaourt à la cuillère et non un verre de coca, comme le sous-entend le Professeur Hercberg. C'est cette interprétation qui nous pose problème, pas l'affichage nutritionnel en lui-même", défend un porte-parole de Danone auprès de RMC Conso.

Sur ce point, c'est parole contre parole. Serge Hercberg considère effectivement qu'un produit comme l'Actimel ou l'HiPro est davantage consommé comme un snack. "C'est davantage un produit que l'on emmène avec soi pour la journée et que l'on boit dans l'après-midi par exemple", affirme-t-il.

Danone en fait-il "trop" sur les bienfaits?

L'autre reproche qu'il formule contre Danone, c'est d'en faire en quelque sorte "trop" avec les bienfaits de leurs produits. De grossir le trait, et ce faisant de masquer les effets délétères du sucre. Pour illustrer leurs propos, les 36 nutritionnistes s'attardent en particulier dans la tribune sur un nouveau produit commercialisé depuis septembre 2024: l'Actimel+ Triple Action.

Sur l'emballage il est prétendu que ce yaourt à boire "soutient le système immunitaire" avec des vitamines D, a des "propriétés anti-oxydantes" grâce aux vitamines C et "contribue à réduire la fatigue via le magnésium". Et tous ces bienfaits seraient apportés par les ferments L. Casei, des bactéries brevetées par Danone et présentes en encore plus grande quantité dans cet Actimel.

L'UFC-Que Choisir, qui s'est également penchée sur ce produit en octobre, écrit que "si jamais un bénéfice existe, il n’est même pas certain qu’il soit dû au L. Casei". L'association de consommateurs affirme que les potentiels bienfaits de cet Actimel sont liés à la présence d'autres bactéries (L. bulgaricus et S. thermophilus), "présentes dans n'importe quel yaourt". En clair, un yaourt nature vous apportera autant, mais sera moins sucré.

Arthur Quentin