Comment reconnaître un plat fait maison au restaurant?

Les terrasses des restaurants et des cafés de la rue de Buci à Paris le 2 juin 2020. - BERTRAND GUAY © 2019 AFP
Il est parfois difficile de démêler le vrai du faux lorsqu’on s'intéresse à l'origine de son repas dans un restaurant. Si la loi autorise depuis 2014 la mention "fait maison" en face d'un plat sur la carte d'un restaurant, elle est encore peu souvent appliquée. Selon nos confrères de France Bleu, seuls 3.000 établissements l'affichent. Laissant les consommateurs dans le flou.
Ce mardi, une proposition de loi du groupe Renaissance à l’Assemblée nationale visant à imposer aux restaurants la mention "non fait maison" sur leurs cartes et menus a été retirée. Une loi qui aurait obligé les plus de 175.000 restaurants de France à plus de transparence. Mais comment savoir si son plat est fait maison? RMC Conso a posé la question à des acteurs de la restauration.
· Une question de label
En termes de législation, le label "fait maison" est encadré par la loi. Ainsi, les plats éligibles à cette appellation doivent obligatoirement être préparés sur place, avec des produits bruts. Ces derniers peuvent être frais, sous-vide ou congelés, tant qu’ils sont crus et cuisinés dans l’établissement où ils seront servis.
"On peut penser que si un restaurateur n'affiche pas la mention sur ses produits, c'est simplement qu'il n'en propose pas", explique à RMC Conso Joël Mauvigney, président de la CGAD (Confédération générale de l'alimentation en détail).
Mais la législation est-elle efficace? Interrogé par RMC Conso, Théophile Hauser-Peretti, chef de la brasserie des Prés, à Paris, la juge encore trop permissive.
“Aujourd'hui, un restaurateur peut vous regarder dans les yeux et vous dire que sa tarte au citron est faite maison. Il suffit qu’il achète sa tarte au citron d’un côté, sa préparation meringuée de l’autre et qu'il assemble les deux avec un chalumeau", déplore le cuisinier.
· Observer la carte
Viandes, salades, hamburgers et plats végétariens. Il est courant que tous ces produits se retrouvent en même temps dans un seul menu. Pour Joël Mauvigney, une carte trop fournie constitue le premier élément à observer, si l'on veut manger du fait maison.
"Plus une carte sera longue, plus les chances d'y trouver des produits faits maison seront minces", explique-t-il.
Et si la présence de certains aliments (trop nombreux) peut induire une préparation industrielle, la mention de certains plats peut être un indice d'une cuisine faite maison. Selon Théophile Hauser-Peretti, les produits très originaux "comme les abats, le foie, les rognons, sont souvent le signe d'un état d'esprit global d'envie de cuisiner, car difficiles à obtenir pré-transformés". Ainsi, les produits les plus communs et demandés à la carte, disponibles en grandes quantités, seraient susceptibles d'être industriels.
· Poissons, sauces, pâtisseries...
Il existe tout de même certaines astuces pour observer le produit dans son assiette. Le chef Théophile Hauser-Peretti en liste quelques-unes. Les traditionnels jus de viande, qui garnissent les assiettes des bistros, sont bien souvent les premiers concernés.
"Quelques acteurs industriels se partagent le marché du jus de viande pré-transformés en restauration. Pour les reconnaître il faut observer la texture. Une fois votre plat servi, le jus aura tendance à se gélifier très vite", explique Théophile Hauser-Peretti.
Suivent les sauces émulsionnées comme les béarnaises, reconnaissables à des herbes ayant perdu leur couleur verte proche de la chlorophylle. Tout comme les mayonnaises, vinaigrettes et toutes les sauces à base d’œufs crus qui sont des 'points critiques' en restauration.
"En cas de manque d’hygiène et de date limite de consommation dépassée, il existe de nombreux risques pour le consommateur. Ainsi, des restaurateurs les achètent déjà préparées", relève le cuisiner.
Les poissons peuvent eux aussi ne pas être faits maison, explique le chef: "Le marché étant de plus en plus fluctuant pour des raisons écologiques, mais aussi économiques avec le prix de l’essence, il est compliqué d’acheter du poisson frais tous les jours. Le plus simple pour un restaurateur revient à acheter du surgelé, qui est issu d’une pêche peu raisonnée, produite en masse, dont les prix peuvent facilement être amortis”. Pour le reconnaître, il faut observer son irrégularité, souvent signe d'une découpe "maison".
Enfin, les desserts, "techniques à préparer et chronophages", sont peu souvent cuisinés en restaurant de bout en bout.
· Pas de recette miracle
En ayant connaissance de ces astuces, est-il possible de ne pas se faire avoir? Théophile Hauser-Peretti en est sûr, même avec un œil avisé, il est toujours possible de se faire berner.
“La liste des ingrédients pré-transformés peut être gigantesque, une technique infaillible pour les détecter n’existe pas mais les consommateurs peuvent développer des réflexes qui relèvent du bon sens. Tout en gardant à l'esprit que le fait maison et le goût ne riment pas constamment, il s’agit de deux appréciations totalement différentes. Tout ce qu’on peut espérer, c’est de se faire un peu moins avoir en étant observateur”, souffle-t-il.