"On commence à voir la déflation": pourquoi les prix baissent légèrement selon Thierry Cotillard

Les tickets de caisse vont-ils enfin s’alléger? Selon le baromètre Circana/LSA publié ce jeudi, les prix des produits de grande consommation sont en très légère baisse (-0,1% sur un an, -0.2% sur un mois). C'est la première fois depuis novembre 2021 que la tendance sur un an s'inverse. Alors que une partie de l’alimentation grimpe encore (flageolets en conserve +8,7%, huiles +8,1%, maïs doux en conserve +7,4%, jus de fruits +5,6%, légumes de salades +5,1%), c’est surtout l’hygiène-beauté qui diminue (soins pour homme -8,7%, gels douche -5,5%, toilette intime -4,6%).
Cette baisse, Thierry Cotillard, le patron d’Intermarché et Netto, la confirme. "On le voit sur des produits très importants, comme les lessives, explique-t-il dans Apolline Matin sur RMC et RMC Story. Et plus encore sur les marques de distributeurs. Notre lessive, aujourd’hui, est à -15% par rapport à il y a un an. Les frites surgelées, c’est -17%. Quand on passe à la caisse, on le sent. Et il n’y a pas que les marques de distributeurs. On a aussi fait le choix, et c’est la réalité parce qu’on est en compétition, de baisser les marges sur les marques nationales. C’est pour ça qu’aujourd’hui, on commence à voir la déflation, sur certains rayons et certains produits."
"Le panier diminue, la fréquence augmente"
Après deux ans et demi d’inflation, comment expliquer ce début de retournement? Selon le président du groupement Les Mousquetaires, il y a deux principales raisons: la baisse des achats par les consommateurs et la concurrence entre les acteurs de la grande distribution. "Avec la loi Descrozaille, les mégas-promos sont terminées. Les volumes baissant significativement, -7% sur les rayons d’hygiène-beauté, et avec une étude disant qu’un Français sur deux ne consomme plus ce qu’il consommait avant à cause des prix trop importants, on a décidé de baisser sur ces produits et d’être en déflation", indique Thierry Cotillard.
"C’est un choix d’enseigne, ajoute aussi le patron d’Intermarché et Netto. Aujourd’hui, le marché est en déconsommation en volume, -0,5%. Mais nous, on fait +5%. Pourquoi? Parce que depuis le début de l’année, on a 1.000 produits de marque distributeur en déflation. On a des marques nationales qui vont baisser. Les enseignes qui font des prix aujourd’hui ramassent beaucoup de nouveaux clients. Ce sont 700.000 nouveaux clients chez Intermarché et Netto. C’est la preuve que la compétition entre nous amène des clients."
Des clients qui ont changé leurs habitudes. "La dépense, dans le caddie du consommateur, baisse. Il est en train de prendre l’habitude de venir plus souvent, pour moins gaspiller, pour maîtriser la dépense. Le panier diminue, la fréquence augmente. C’est une tendance lourde qu’on a observée et qui perdure", note Thierry Cotillard.
Nouvelle baisse en 2025?
Peut-on désormais espérer que la déflation se poursuive? "Il ne faut pas s’attendre à un changement important jusqu’aux prochaines négociations, prévient le président des Mousquetaires. On achète les produits fin janvier et ce tarif-là, on va l’avoir pendant un an. La compétition entre enseignes va faire qu’on va peut-être baisser sur certains produits. Mais il faudra se donner rendez-vous en janvier 2025 pour voir si les tarifs des industriels sont à la baisse. Et s’ils sont à la baisse, le distributeur fait son boulot et répercute aux consommateurs. A ce moment-là, on pourra avoir une baisse plus importante."
Et Thierry Cotillard le jure, les supermarchés ne pouvaient pas jusque-là proposer des prix moins élevés. "Ce qu’on a pris, c’était un tsunami d’inflation, assure-t-il. On n’avait pas la possibilité parce que dans les Intermarché et les Netto, on a aussi eu des factures d’électricité qui ont doublé. Lorsque le tarif arrivait de l’industriel, qu’il avait pris +10% et que vous faites un résultat de +2%, vous ne pouviez pas baisser de 5% les produits. Sinon, on était en déficit."