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Rappels de lots

Rappel massif de plus de 40 fromages contaminés à la listeria partout en France: ce que l'on sait

Des camemberts dans une usine, photographiés le 5 mai 2025.

Des camemberts dans une usine, photographiés le 5 mai 2025. - AFP - LOU BENOIST

Depuis ce samedi 9 août, de nombreux fromages vendus aussi bien chez Lidl, Carrefour, U, Auchan, ou Leclerc sont rappelés en raison d'une suspicion de contamination à la listéria. Tous proviennent d'une même usine située dans la Creuse. Celle-ci avait déjà été mise en cause en juin.

Brie, chèvre, camembert, coulommiers... La liste des types de fromages rappelés en ce moment pour une suspicion de contamination à la listéria est longue. Celle des distributeurs concernés par ces rappels l'est presque autant: Lidl, Carrefour, Auchan, Leclerc, U...

Toutes ces enseignes ont au moins un de leurs produits concerné par ce rappel massif, démarré ce samedi 9 août avec ceux de chez Lidl et U. En l'espace de quelques jours il a pris une ampleur considérable: plus de 40 références sont rappelées.

On trouve, pêle-mêle, la "bûche de fromage de chèvre" de la marque Chêne d'Argent vendue chez Lidl ; le camembert de la marqie Saveurs d'Antan vendue chez Auchan ; le coulommiers de la marque Le Berger vendue chez Carrefour... La liste complète des produits concernés est disponible sur le site Rappel Conso.

Tous les fromages issus d'une usine déjà mise en cause

Bien que tous de marques différentes, ces fromages ont en commun d'avoir été produits par une seule et même usine: la fromagerie Chaverand, située à la Maison-Feyne dans la Creuse.

Mais ce qui interroge et indigne l'ONG de défense des consommateurs Foodwatch, c'est que cette contamination remonterait à bien plus tôt. Elle indique dans un communiqué diffusé ce mardi 12 août que "la contamination bactériologique semblait présente depuis au moins avril 2025".

Foodwatch en veut pour preuve le fait que deux produits rappelés l'avaient déjà été il y a plusieurs mois, pour le même motif. C'est le cas du "Double Crème Simply" vendu par Carrefour, qui avait été rappelé une première fois le 13 juin avant de l'être à nouveau ce mardi. Mais aussi du "Doucrémeux" de la marque Chêne d'Argent, rappelé une première fois par Lidl le 16 juin dernier. Et une deuxième fois ce samedi 9 août.

Ces deux produits avaient été commercialisés à partir de début mai, ce qui laisse imaginer qu'ils ont été produits en avril. Et que la contamination initiale remonte à cette époque.

Pour Camille Dorioz, directeur de campagne de Foodwatch joint par RMC Conso, il y a eu des défaillances à tous les niveaux.

"La fromagerie Chaverand a été alertée une première fois il y a trois mois. On peut se demander ce qu'elle a fait pendant tout ce temps. Elle aurait dû supprimer le risque de contamination au sein de son usine. On peut aussi s'interroger sur le suivi que l'État a fait de cette entreprise durant toute cette période", s'indigne-t-il.

La fromagerie Chavegrand refuse de communiquer

Il regrette également le temps que met l'information de cette contamination à remonter au consommateur. Souvent entre la fin de commercialisation d'un produit et la publication du rappel sur Rappel Conso se passent plusieurs jours. "Ce temps est suffisant pour que l'acheteur ait déjà consommé le produit".

C'est le cas par exemple d'un brie de la marque Mariotte, commercialisé chez Auchan, Carrefour, Intermarché... Son rappel n'est publié que ce mardi 12 août alors qu'il a cessé d'être vendu dès le vendredi 8 août.

Rappelons que la listéria monocytogenes est une bactérie, agent responsable de la listériose. Elle se caractérise dans sa forme la plus courante par des symptômes comme des courbatures et de la fièvre, isolée ou accompagnée de maux de tête. Mais elle peut être plus grave dans des formes plus malignes. La listériose est ainsi la seconde cause de mortalité par intoxication alimentaire avec, en France, quelques dizaines de décès par an.

Face à l'ampleur de ce rappel, on peut se demander quelle peut bien être l'origine d'une telle contamination. Autant dire que la réponse est difficile à obtenir. RMC Conso a bien tenté de joindre la fromagerie Chavegrand pour obtenir plus d'information sur ce qui a pu la provoquer. Mais s'est heurté à un refus de communiquer.

La fromagerie aurait-elle dû s'interrompre?

Pour Camille Dorioz, le fait que le rappel prenne une telle ampleur montre qu'on n'est pas sur un petit problème isolé.

"Ce n'est pas juste un employé qui aurait oublié de se laver les mains et pu éventuellement contaminer quelques produits. Là, c'est soit un problème provenant d'une matière première utilisée. Ou alors c'est à l'intérieur même de l'usine: un tuyau ou une cuve a pu par exemple être mal nettoyé", imagine-t-il.

Selon lui, lorsqu'une entreprise est confrontée à une première alerte comme cela a été le cas en juin ici, elle devrait complètement s'interrompre pour identifier et régler efficacement le problème. Et être la plus transparente possible vis-à-vis de ses clients que sont les distributeurs, et les consommateurs bien sûr.

"Mais arrêter de produire est toujours dur, et souvent elles prennent le pari de continuer. Avant d'être rattrapées par l'ampleur du problème", explique-t-il, en prenant les exemples des pizzas Buitoni contaminées à la bactérie E.coli ou des chocolats Kinder aux salmonelles en 2022.

Dans ces deux cas, les conséquences sanitaires furent terribles avec plusieurs morts dans le cas Buitoni. Mais aussi celles économiques: l'usine Ferrero d'Arlon en Belgique avait été fermée plusieurs semaines mais a rouvert et conservé ses emplois. En revanche celle de Buitoni de Caudry dans le Nord a fermé définitivement. Faisant perdre leur emploi à plus de 100 salariés, "payant l'irresponsabilité de leur direction", estime Camille Dorioz de Foodwatch.

Arthur Quentin