Ketchup, extraterrestres ou monstre du Loch Ness: peut-on s'assurer contre tout et n'importe quoi?

Samedi 9 mars, la marque Heinz annonçait le lancement de son assurance ketchup par sa filiale des Émirats arabes unis. Une protection qui a pour vocation de couvrir les amateurs de la célèbre sauce contre tous les dommages potentiellement consécutifs à sa consommation: taches sur les vêtements, éclaboussures sur les murs et autres salissures rouges... L'information prête à sourire et si l'on regarde de plus près les conditions d'utilisation de cette police d'assurance, on comprend la portée humoristique de l'initiative:
"Ceci est une campagne promotionnelle qui célèbre l'amour de nos clients pour le ketchup... Nous ne sommes en aucun cas en train de lancer un programme d'assurance légale qui nous engagerait."
Un coup de communication donc, mais qui pourrait donner lieu à de véritables dédommagements tels que le pressing offert ou le nettoyage à domicile si l'on rentre dans la définition d'un des 57 incidents identifiés par la marque. Quant à une possible exportation en Europe, Heinz, contacté par RMC Conso, nous répond:
"Pour le moment, notre police d'assurance est uniquement disponible aux Émirats arabes unis. Mais nous savons que l'amour des gens pour Heinz est universel alors... Ne jamais dire jamais."
Tout assurer, c'est possible
Mais peut-on vraiment assurer tout et n'importe quoi? "En théorie oui, si le client peut payer", acquiesce Jean-Pierre Daniel, spécialiste dans le domaine et auteur de "L'assurance et ses secrets". Là où le risque existe et où la chose à assurer a une valeur marchande ou bien expose l'assuré à un possible coût, il peut y avoir une assurance.
Elle peut englober tellement de domaines que certaines protections complètement farfelues existent ou ont existé, à l'instar de l'assurance "trou-en-un", pour les golfeurs qui, selon la tradition, doivent offrir des boissons à tout leur club s'ils atteignent le trou en un seul coup: l'assurance prévoit une petite réserve d'argent si l'événement devait arriver.
Autre exemple à peine croyable: en 2007, les organisateurs d'un duathlon sur les berges du Loch Ness, en Écosse, avaient souscrit une assurance en cas d'attaque du célèbre monstre... Inutile de préciser que l'opération commerciale avait été 100% gagnante pour l'assureur.
Dans le même registre, un courtier britannique prétendait, dans les années 1990 et 2000, avoir vendu 30.000 contrats d'assurance dans le monde contre... les enlèvements par des extraterrestres, pour la modique somme de 100 euros par an. L'existence de cette assurance est liée à une information tragique puisque, parmi les souscripteurs, il y avait les membres de la secte Heaven's Gate, connue pour le suicide collectif de 39 adeptes en 1997.
Kidnapping et rançon
En dehors de ces cas anecdotiques, il existe aussi de très sérieuses assurances pour protéger le risque de kidnapping et de rançon.
"Elles sont souscrites par des entreprises qui envoient des salariés dans des zones à risque", nous explique Jean-Pierre Daniel.
Ces contrats permettent de bénéficier de l'aide d'experts en négociation ainsi que d'une somme réservée à l'éventuel paiement de la rançon.
Évidemment, ces assurances restent exceptionnelles. Mais les particuliers aussi peuvent protéger leurs biens les plus originaux.
"Cela peut être un objet de valeur, une oeuvre d'art, mais aussi des biens à signification sentimentale comme des collections, si on a fait expertiser leur prix", liste Jean-Pierre Daniel.
Assurer une partie de son corps
"On peut même assurer une partie de son corps, ajoute-t-il. Les footballeurs font assurer leurs jambes, c'est leur outil de travail".
Selon une information du Times, celles de David Beckham valent ainsi 149 millions d'euros. De nombreuses stars sont connues pour les rumeurs d'assurances dont font l'objet leur corps: les fesses de Jennifer Lopez seraient assurées pour 27 millions d'euros, les cordes vocales de Bruce Springsteen pour 8 millions d'euros... Difficile de savoir si ces chiffres sont réels ou fantasmés. En tout cas, Julia Roberts a démenti avoir assuré son sourire pour 30 millions d'euros, comme le racontait la légende.
Mais assurer son corps n'est pas un luxe réservé aux célébrités: les chirurgiens ou les pianistes peuvent, par exemple, assurer leurs mains. Derrière cette apparente originalité, il y a tout simplement une couverture contre une éventuelle perte d'activité.
Assurance contre le cyber-harcèlement
Une assurance encore méconnue et qui pourrait pourtant devenir très populaire dans les années à venir est l'assurance e-réputation: une protection contre le cyber-harcèlement.
Pour une dizaine d'euros de cotisation par mois, ces assurances protègent l'image de leurs souscripteurs et celle de leurs enfants sur Internet.
Leurs garanties prévoient, entre autres, la mise à disposition des moyens juridiques en cas d’usurpation d’identité, une assistance psychologique, ou encore la prise en charge des démarches de suppression de commentaires ou de photos dénigrantes via des sociétés spécialisées.
Un quart des familles françaises ayant déjà été confrontées au cyber-harcèlement selon l'étude Caisse d'Épargne-Association e-Enfance/3018 d'octobre 2023, les assureurs ont bien compris qu'il y avait là un nouveau risque à prendre en compte.