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Temu, Shein... Les produits vendus sur ces plateformes comportent de gros risques pour votre santé

Le gouvernement français dévoile mardi 29 avril des "mesures concrètes" pour répondre aux flux de colis en provenance de Chine, notamment des plateformes Shein ou Temu

Le gouvernement français dévoile mardi 29 avril des "mesures concrètes" pour répondre aux flux de colis en provenance de Chine, notamment des plateformes Shein ou Temu - JUSTIN SULLIVAN © 2019 AFP

L'afflux de colis à faible valeur venus de Chine représente un danger pour le consommateur. Expédiés par des plateformes comme Shein et Temu, ils contiennent très souvent des produits ne respectant pas les normes européennes.

En 2024, 4,6 milliards de colis d'une valeur inférieure à 150 euros sont entrés sur le marché européen, soit 145 par seconde. 91% venaient de Chine et pourraient présenter un risque pour vous. En plus d'être un fléau pour l'environnement à cause des émissions que génère leur transport, ces petits colis peuvent être défectueux et dangereux pour le consommateur.

La majorité de ces paquets provient en effet de deux sites Internet: Shein et Temu. Et ces deux plateformes sont régulièrement épinglées pour la mauvaise qualité des produits qu'elles vendent. Certains d'entre eux sont même si bas de gamme qu'ils ne respectent pas les normes de sécurité européennes. Et devraient donc être interdits.

81% de produits non conformes à la réglementation

Le Bureau européen des unions de consommateurs (BEUC), fédération regroupant 43 associations du continent (dont l'UFC-Que Choisir et la CLCV pour la France) a récemment publié une analyse de produits vendus sur Temu. Au total plus de 200 ont été testés. Des jouets pour enfants, des ustensiles de cuisine, des cosmétiques, des appareils électriques...

"Ce sont essentiellement des catégories de produits pour lesquelles les normes de sécurité sont élevées. Et qui présentaient donc un risque de non-conformité plus important", explique Sébastien Pant, porte-parole du BEUC, à RMC Conso.

Et les associations ayant mené ces tests n'ont pas été déçues: 81% des produits testés ne respectent pas la législation en vigueur. Et ne devraient pas être commercialisés en Europe.

Ainsi plusieurs jouets pour enfants en plastique contenaient des phtalates à hauteur de 240 fois la limite légale. Ces substances chimiques sont des perturbateurs endocriniens qui peuvent affecter le système hormonal.

Un radiateur présentant un "risque d'explosion"

D'autres jouets pour bébés étaient quant à eux dangereux en raison de petites pièces pouvant facilement être détachées. Et présentant de ce fait un risque d'étouffement pour un nourrisson qui l'ingérerait accidentellement. Le BEUC évoque par exemple une chenille colorée en bois, dont un œuil peut se retirer facilement. Ou des porte-bébés mal sécurisés dont l'enfant pourrait chuter.

Au rayon des cosmétiques, l'association de consommateurs a constaté que la liste d'ingrédients de plusieurs d'entre eux ne correspondait pas à la description sur le site. Par exemple, un produit était indiqué "sans silicone", mais en contenait bel et bien.

Ou encore, des radiateurs portables électriques dangereux. Dont un "si mal fabriqué qu'il présentait également un risque d'incendie et d'explosion", décrit le BEUC dans ce document publié en février 2025. Malgré ce danger manifeste, ce radiateur a été vendu plusieurs milliers de fois au Royaume-Uni, pays où son test a été réalisé.

Aucune traçabilité de ces produits

Mais comment ces produits font-ils pour se retrouver chez nous alors qu'ils ne respectent pas nos normes? Tout simplement parce qu'ils ne passent aucun des tests nécessaires pour être commercialisés en Europe. Il faut dire que le modèle de Temu repose précisément sur la mise en relation de fournisseurs basés en Chine directement avec le client. Sans aucun intermédiaire ou presque.

"Normalement, dans le commerce en ligne, tout passe par un importateur qui dispose d'entrepôts dans les pays de destination et vérifie la conformité des produits. Là avec ce système on outrepasse complètement les lois", regrette Sébastien Plant du BEUC.

La fédération des associations de consommateurs plaide donc pour que Temu améliore la traçabilité de ses produits. Mais en l'absence d'action concrète en ce sens de la part de la plateforme chinoise, c'est aux autorités douanières européennes de mener des contrôles de ces produits. Et d'empêcher l'entrée sur le territoire de ceux dangereux.

Autant dire un travail de titan vu le nombre de colis arrivant chaque jour. Pour financer ces contrôles appelés à se renforcer face à cet afflux, le gouvernement a annoncé ce mardi la mise en place de "frais de gestion" pour chacun de ces petits paquets à partir de 2026.

Des substances toxiques dans les vêtements Shein

Une mesure qui concernera donc Temu, mais aussi Shein. Le fonctionnement de cette plateforme est relativement similaire. La différence est qu'on y trouve quasi exclusivement des vêtements. Mais les mêmes problèmes se constatent.

De nombreux articles de prêt-à-porter vendus sur le site ont été épinglés car des substances toxiques y avaient été retrouvées. Du nickel ou du plomb dans des chaussures ou des t-shirts, des phtalates en des quantités largement supérieures aux limites légales dans des sacs ou des ceintures.

"Nous avons eu beaucoup de témoignages de gens qui ont senti une odeur pestilentielle en ouvrant leur paquet Shein", relate Yann Rivoallan, président de la Fédération française du prêt à porter féminin, contacté par RMC Conso.

Une odeur qui pourrait aussi être liée à l'épandage de pesticide dans les conteneurs qui transportent ces vêtements.

Cet expert du secteur de la mode concède tout de même que sur ce point, Shein s'est légèrement amélioré depuis trois ans. À l'époque une enquête de Greenpeace avait révélé que 15% des articles vendus contenaient des polluants toxiques. Pointée du doigt, la marque chinoise a donc fait le choix de mettre en place davantage de contrôles sur la dangerosité de ses produits.

315.000 nouveaux produits par an

Il faut dire qu'un an plus tôt en 2021 le site de commerce en ligne Wish, également pointé du doigt pour ses produits dangereux, avait été contraint par l'État de fermer. "Shein a voulu éviter un sort similaire", déduit Yann Rivoallan.

Mais le site chinois produit tellement de nouveaux articles que certains dans le lot échappent forcément aux contrôles. En 2022, elle avait commercialisé 315.000 nouveaux produits là où une marque déjà bien productiviste comme Zara en proposait 6.850.

Shein relève donc de l'ultra fast-fashion, ce segment de l'industrie vestimentaire qui se caractérise par le renouvellement extrêmement rapide des vêtements proposés à la vente. Et qui se traduit par un désastre sur le plan environnemental. La fabrication d'un jean par exemple, nécessitant en moyenne 8.000 litres d'eau.

Pour Yann Rivoallan, si face à ce fléau le consommateur peut essayer d'acheter de manière responsable, il incombe surtout à nos dirigeants d'agir.

"Dire au client qui voit des aubaines de prix si hallucinantes de ne pas acheter, c'est compliqué. Il est dans son droit. C'est davantage à l'État d'agir pour qu'une telle situation ne se présente pas".

Pour ce représentant de marques de prêt-à-porter, il faut prendre des mesures plus radicales que celles annoncées ce mardi. Et ce afin de protéger le consommateur.

Arthur Quentin