Métro, train... peut-on contester une amende injustifiée même après l'avoir payée?

Une rame de la RATP (photo d'illustration). - Miguel Medina-AFP
En passant les portillons du métro avec la plante qu'elle venait d'acheter, Salomé ne se doutait pas de la mésaventure qui allait lui arriver. Avant-même d'arriver sur le quai, elle croise des contrôleurs de la RATP.
A priori tout va bien. Cette journaliste de 24 ans pour BFM Tech & Co pense être en règle et présente son Passe Navigo. Sauf que l'agente tique en voyant sa Strelitzia, aussi appelée "Oiseau de paradis", haute d'un peu plus d'un mètre. D'après elle, transporter une telle plante serait une infraction car il s'agirait d'un encombrant.
Ni une ni deux, cette agente sort un terminal de paiement et presse Salomé de payer la bagatelle de... 150 euros. Malgré sa sidération face à la situation et surtout ce montant, elle accepte de payer l'amende. La contrôleuse s'était effectivement montrée insistante, et Salomé sur le coup ne s'est pas doutée qu'elle pourrait contester.
Une amende non contestable si elle a été payée?
Dans cette situation, il y avait pourtant largement de quoi. Comme l'indique la liste des infractions de la RATP, il existe un motif "Objet dangereux ou incommodant dans une voiture". C'est bien celui retenu sur le ticket de verbalisation de Salomé, dont elle a posté une photo sur X.
Dans le cas présent, d'une part la notion "d'objet incommodant" pour une plante certes plutôt haute mais pas imposante est très discutable. Mais surtout, Salomé n'était même pas rentrée dans le métro: elle était dans le couloir. Manifestement, la RATP a eu tort de lui infliger cette amende et la jeune femme aurait pu ne pas payer pour pouvoir contester son procès verbal.
Dans le droit français, il est stipulé qu'une amende est contestable uniquement si vous ne l’avez pas encore payée. Selon l’article 529-3 du code de procédure pénale, on estime alors que "l'action publique est éteinte" s'il y a eu un règlement de la contravention. Une règle qui, d'après cet article, vaut aussi bien pour les contraventions infligées par la police, que pour celles des agents de services de transports ferroviaires ou de transports publics de personnes.
Toujours possible de contester auprès de la RATP
De quoi exaspérer au plus haut point Salomé qui n'aurait donc plus aucun moyen de recours... Mais qu'elle se rassure: d'après la Fédération nationale des associations d'usagers de transports (Fnaut), l'extinction de l'action publique n'est pas irrémédiable.
"Cela signifie que l'on ne pourra plus contester auprès de la Justice. Mais même après avoir payé on peut toujours contester auprès de la RATP, de la SNCF, ou une autre régie de transport", explique à RMC Conso Nina Soto, directrice de la communication et juriste pour la Fnaut.
L'association de défense des usagers recommande même justement de payer l'amende dans tous les cas. Car si on ne le fait pas, le montant sera majoré de frais de dossier notamment. Si l'on ne parvenait pas à se faire rembourser au bout du compte, on serait alors doublement perdant.
Sur son site, la Fnaut décrit avec plusieurs graphiques les différentes procédures de contestation d'une amende forfaitaire, que ce soit pour une infraction tarifaire ou comportementale. Selon qu'elle ait été infligée et payée immédiatement dans les transports urbains ; infligée mais non réglée ; ou infligée dans les transports ferroviaires (SNCF ou autres).
Contacter le médiateur en cas de refus du service client
Il est donc dans un premier temps recommandé de contacter le service client de la régie de transports ayant infligé l'amende. La RATP à Paris donc. Mais encore Tisséo à Toulouse, Ilévia à Lille ou STAR à Rennes: d'autres villes dotées de métro et appliquant des contraventions du même ordre pour le même type d'infraction.
Cette entreprise peut alors faire son mea culpa et vous donner une réponse favorable: vous serez remboursé. Mais en cas de réponse négative, ou pas de réponse sous 30 jours, vous disposez encore d'un recours. Vous pouvez contacter le médiateur de la RATP ou de la SNCF si votre litige a eu lieu avec une de ces deux compagnies. Ou le Médiateur tourisme et voyage (MTV) s'il a eu lieu avec un autre transporteur.
Là vous aurez un interlocuteur indépendant, désigné par des associations agrées de défense de consommateurs. Il ne fera donc pas preuve d'autant de zèle que certains contrôleurs qui reçoivent même des primes pour les amendes qu'ils infligent... Si vous êtes de bonne foi, et que le motif de votre contestation est légitime (comme dans le cas de Salomé), ce médiateur rendra certainement un avis favorable.
Si vous recevez un avis négatif ou en partie négatif et que vous n'en démordez pas, vous pouvez aller jusque contacter le Défenseur des droits. Voire un tribunal de police.
Heureusement, Salomé n'a pas eu à en arriver là. Ce mardi 6 mai, face au tollé suscité par sa mésaventure, la RATP a accepté de lui rembourser le montant de l'amende. Et lui a même offert, en compensation, une nouvelle plante.