Le skyr, star des rayons: sa réputation est-elle vraiment justifiée?
Du skyr (illustration) - Philippe TURPIN / Photononstop / Photononstop via AFP
Personne ne le connaissait il y a à peine 10 ans, il est aujourd'hui le produit le plus vendu du rayon ultra-frais. Le skyr, genre de yaourt islandais, a conquis les papilles des Français.
42% des foyers en consomment, alors qu'ils n'étaient que 17% en 2021, selon les données du cabinet NielsenIQ. La croissance de ce produit, de 18% sur un an en termes de chiffre d'affaires, est qualifiée d'"impressionnante" par le média spécialisé dans la grande distribution jebosseengrandedistribution.fr. C'est, selon ce dernier, "une exception dans l'alimentaire".
Et ce qui illustre le mieux le phénomène, c'est bien sûr l'omniprésence du skyr au sein du rayon yaourt: aux côtés des traditionnels fromages blancs, yaourts grecs, petits-suisses, on en trouve désormais de nombreuses références et toutes les marques s'y mettent.
10% de protéines, 0% de matières grasses
D'ailleurs, nos skyrs de supermarché n'ont plus grand-chose à voir avec le skyr traditionnel islandais, beaucoup plus dense, et derrière des noms aux consonances scandinaves on trouve en fait des géants laitiers français. Exemple, la marque Siggi's appartient à Lactalis, et fait d'ailleurs fabriquer son skyr en... Slovénie!
Parmi les autres marques de skyr les plus vendues: Yoplait de Sodiaal, d'ailleurs numéro un des ventes, Danone, mais aussi les marques de distributeurs. En plus des skyrs nature, des versions aux fruits, aux céréales ou spécial sportifs apparaissent.
Le carton du skyr s'explique facilement: il s'inscrit dans une tendance plus large qui est celle de la bonne santé, du bien-être et du sport. Le skyr contient en effet 10% de protéines (et la protéine est très à la mode), pour 0% de matière grasse. À l'origine plutôt dédié aux sportifs, il se popularise au sein d'un public soucieux de son alimentation.
Le skyr, c'est finalement la même chose qu'un yaourt (sa composition est fortement similaire: du lait et des ferments lactiques), mais deux fois plus protéiné, moins gras qu'un fromage blanc ou un yaourt grec, avec une texture relativement épaisse, onctueuse, au fort effet rassasiant... La crème de la crème du rayon laitage, en somme.
Attention malgré tout à ses versions aromatisées, qui sont elles bourrées de sucre et donc bien moins intéressantes sur le plan nutritionnel. Les versions spécial sportif sont quant à elles sucrées grâce à des édulcorants artificiels... Mieux vaut choisir une version nature qu'on aromatise soi-même avec un peu de miel, par exemple.
Un très cher yaourt
Si le skyr fait l'unanimité, n'est-il pas toutefois un peu trop cher? À comparer son prix au kilo à celui de ses cousins du rayon ultra-frais, cela semble évident. Comptez 5 à 10 euros le kilo de skyr contre en moyenne deux euros le kilo de yaourt.
L'argument des industriels pour justifier un tel prix: il faut beaucoup plus de lait pour faire 1 kilo de skyr que pour faire 1 kilo de yaourt. C'est la vérité, puisque du skyr n'est finalement ni plus ni moins qu'un yaourt plus égoutté.
La deuxième raison d'un prix aussi élevé est évidemment le marketing. D'ailleurs, les principaux mangeurs de skyr sont de jeunes urbains. Les marques savent qu'il s'agit d'un public peu regardant sur le prix.
Pourtant, à l'origine, le skyr était un produit de recyclage, en quelque sorte: une fois le lait entier utilisé pour faire de la crème et du beurre, le déchet restant, le lait écrémé, était transformé en skyr pour ne pas être gaspillé. Un produit anti-gaspi devenu grâce au marketing un produit de luxe...
Pour obtenir un skyr à un prix bien plus abordable, il suffit d'égoutter un yaourt toute une nuit à travers un linge. Si l'opération vous semble un peu trop fastidieuse, sachez qu'il existe un produit complètement similaire au skyr sur le plan nutritionnel, et très proche sur le plan gustatif: les petits-suisses 0%. Or ils coûtent deux fois moins chers. À bon entendeur...