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Alimentation

"Nolow": le boom des vins et spiritueux sans alcool

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Les vins et spiritueux sans alcool ont la cote. Même si le marché reste timide, les marques se développent et innovent pour proposer une expérience gustative similaire, sans les effets néfastes de l'alcool. Enquête.

La tendance s'appelle "nolow". "No" pour "aucun" et "low" pour bas: des boissons qui adoptent tous les codes de l'alcool (l'usage, pour l'apéritif ou l'accompagnement d'un repas, le contenant, des bouteilles en verre similaires à celles des spiritueux et vins classiques) mais qui ne contiennent pas, ou quasiment pas d'alcool.

Il n'y a qu'à regarder l'offre, de plus en plus nombreuse, pour s'apercevoir que le phénomène de mode n'en est qu'à ses prémices: au salon Wine Paris 2024, le nombre d'exposants à faire du sans alcool a augmenté de 50% par rapport à l'année d'avant, selon la Revue du vin de France. Ils seront 60 au salon Wine Paris 2025, au mois de février.

Si, avec 65% des ventes, la bière domine encore largement ce marché à 10 milliards d'euros en 2022, les vins et spiritueux se font une place de plus en plus importante.

Sur l'épicerie en ligne Gueule de joie, leader français de la distribution de vins, bières et cocktails sans alcool, on compte une vingtaine de marques différentes à proposer des spiritueux sans alcool.

Parmi les innovations présentées au Salon international de l'alimentation, qui se tient cette année du 19 au 23 octobre, on retrouve également plusieurs de ces boissons "nolow": de la tequila, du spritz ou encore du vin sans alcool.

De plus en plus d'adeptes en France

Les marques constatent cet engouement:

"Les enquêtes d'opinion disent qu'un Français sur deux est prêt à diminuer sa consommation d'alcool voire arrêter complètement. Et on le voit dans nos chiffres: par rapport à 2020, on a multiplié nos ventes par quatre," affirme Clémence François, brand manager de la marque de vin sans alcool Moderato, contactée par RMC Conso.
"En 2024 on a écoulé entre 15.000 et 20.000 bouteilles. On a un objectif de 100.000 pour l'année prochaine. C'est vraiment depuis un an que je constate que la tendance décolle," abonde Guillaume Levilly, fondateur de la marque de spiritueux sans alcool Nolow Plurielles, auprès de RMC Conso.

Il faut dire que la demande est grandissante, dans un monde où la consommation d'alcool est en constante diminution. La consommation totale d'alcool a été divisée par plus de deux en l'espace de 60 ans. Aujourd'hui, la part des adultes qui déclarent ne pas consommer d'alcool chaque semaine est de 61%, contre 37% en 2000, selon Santé publique France.

"Nos clients ne sont pas forcément des personnes qui ne boivent pas d'alcool du tout, on a une majorité de gens qui souhaitent simplement réduire leur consommation et pouvoir varier leur consommation de boisson à l'apéritif, changer du classique mocktail (cocktail sans alcool) très sucré au jus de fruits," explique Guillaume Levilly.

Des procédés de fabrication innovants

Selon le baromètre 2024 de Sowine/Dynata, 28% des Français consomment des "nolow". Un chiffre qui pourrait augmenter à mesure que les marques innovent pour proposer des boissons aux qualités gustatives similaires à celles des vins et spiritueux alcoolisés, sans leurs effets néfastes pour la santé.

Pour la fabrication, plusieurs procédés existent. Chez Nolow Plurielles, "l'objectif n'est pas d'imiter l'alcool mais de proposer quelque chose de différent, des bases de cocktails sans alcool qui permettent une autre expérience gustative avec un travail sur l'amertume, le floral ou l'épicé," défend le fondateur de la marque.

De la même manière que pour les spiritueux classiques, il y a un travail d'infusion, de macération et de distillation pour obtenir un condensé d'arômes, mais garanti 100% sans éthanol. Les trois gammes, distribuées dans les bars et restaurants, sont à base de baies de genièvre, de gingembre ou d'orange amère.

La méthode est inversée chez le fabricant de vin sans alcool Moderato: ici, on part du vin classique, qu'on désalcoolise.

"On retire l'alcool du vin par distillation, en le chauffant à basse température pour évaporer l'alcool en douceur et garder les qualités organoleptiques du produit," détaille Clémence François.
"On ne travaille qu'avec des cépages français qu'on sélectionne minutieusement. Certains vins résistent mieux que d'autres à la désalcoolisation, comme le merlot, le cabernet, le sauvignon."

L'objectif est de satisfaire l'ensemble de la demande: d'un côté, une offre pour petits budgets, entre 7 et 10 euros la bouteille et commercialisée dans la grande distribution, chez Leclerc, Carrefour, Auchan ou Monoprix.

De l'autre, une cuvée "révolutionnaire", autour de 15 euros la bouteille, pour attirer une clientèle "premium", mise en vente chez les cavistes et les épiceries fines. Elle pourrait concurrencer le Prince Oscar, le vin sans alcool créé par le Château Clos de Boüard en 2021 sur demande des propriétaires qataris du PSG, fruit de deux ans de recherche, à 25 euros la bouteille.

Clémence François en est convaincue: "le vin sans alcool a aussi sa place sur les plus grandes tables".

Charlotte Méritan