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Arnaques

Sur Vinted, des articles Shein ou Temu vendus 10 fois plus chers: comment repérer cette arnaque?

L'application Vinted, sur iPhone

L'application Vinted, sur iPhone - BFMTV

Une nouvelle arnaque se développe sur la plateforme de seconde main Vinted. Elle consiste, pour les vendeurs, à proposer des articles achetés sur des plateformes chinoises 10 fois plus chers que leur valeur réelle.

De la fast fashion, mais vendue à prix d'or à des particuliers qui n'y voient que du feu. C'est la nouvelle arnaque en vogue sur la plateforme de seconde main Vinted.

Tandis qu'elle est devenue le premier vendeur de vêtements en France en 2024, les pratiques douteuses y sont de plus en plus nombreuses.

Des particuliers ont trouvé une belle manne financière: acheter sur Shein, Temu ou Aliexpress des articles à des prix imbattables et les revendre plus chers, beaucoup plus chers, afin de se faire une marge plus que confortable. Les vêtements à bas prix et fabriqués en Chine sont parfois revendus jusqu'à 10 fois leur prix.

28 euros sur Vinted, 3 euros sur Aliexpress

RMC Conso en a repéré plusieurs. Des bijoux achetés moins d’1 euro et mis en vente à 10 euros. Un “top noir à sequins”, vendu sur Vinted à 39,99 euros, et repéré sur Aliexpress à 6,19 euros, soit plus de six fois moins cher.

Top noir vendu sur Vinted à 39,99 euros
Top noir vendu sur Vinted à 39,99 euros © Capture d'écran
Le même top noir à sequins vendu sur Aliexpress à 6,19 euros
Le même top noir à sequins vendu sur Aliexpress à 6,19 euros © Capture d'écran

Un petit haut à pois, que la jeune femme a, selon la description, "acheté dans une petite boutique en vacances" et qu'elle revend 28 euros... Trouvé à trois euros sur Aliexpress. La photo de l'annonce montre d'ailleurs le même mannequin que la photo du site chinois, preuve s'il en faut de la provenance réelle du produit...

Haut à pois vendu 28 euros sur Vinted
Haut à pois vendu 28 euros sur Vinted © Capture d'écran
Le même haut à pois vendu sur Aliexpress à 3,09 euros
Le même haut à pois vendu sur Aliexpress à 3,09 euros © Capture d'écran

En surfant sur la plateforme de petites annonces, on trouve facilement des centaines de propositions comme celles-ci. Et les utilisateurs ne semblent pas tous sensibilisés à ce type d’arnaque, si l'on en croit les 222 "favoris" et 5 "intéressés" par un "top style Ibiza" qui provient pourtant sans aucun doute d'une plateforme chinoise.

Il faut dire que les tops d’été "style Ibiza", majoritairement des débardeurs à sequins, paillettes ou motifs colorés, sont devenus une grande tendance sur les réseaux sociaux et notamment TikTok à l’approche de la saison estivale… Certains en profitent donc.

"Boutique indépendante", "vintage"...

Évidemment, lorsqu'on leur pose la question, ces vendeurs peu scrupuleux restent flous sur l'origine des produits. Nous en avons contacté plusieurs, et les réponses se suivent et se ressemblent: “un magasin local”, “vintage”, “il n’a pas de marque mais doit provenir d’une boutique indépendante”, “je ne sais plus”... Quand on demande à avoir une photo de l’étiquette pour s’assurer de la provenance, plus de réponse. C’est le subterfuge utilisé pour camoufler l’origine réelle de l’article.

Certains vont même jusqu'à indiquer une marque qui n’existe pas. Les noms “Nero” ou “SunVintage” apparaissent sur deux annonces que nous avons repérées sur Vinted. Après recherche, nous n'avons trouvé aucune trace de l'existence de ces marques et avons en revanche pu constater que les deux tops en question avaient été commandés sur des sites de fast fashion en ligne, le premier sur Aliexpress et le deuxième sur Shein.

La pratique pose deux problèmes. Le premier est relatif à l'éthique environnementale: Vinted est censée promouvoir l'économie circulaire, la seconde main, le réemploi... Ici, les vendeurs au contraire entretiennent la surconsommation de vêtements neufs et alimentent le marché de la fast fashion. D'ailleurs, en 2024, les Français ont acheté un nombre record de 42 vêtements neufs, selon un rapport de l'éco-organisme Refashion publié mardi 17 juin.

Une pratique interdite par la plateforme

Le deuxième est d'ordre légal: on pourrait voir dans cette pratique une forme de tromperie. Certes les prix sont libres, et le fait d'acheter un vêtement dans l'unique but de le revendre immédiatement est une technique de vente légale qui s'appelle le dropshipping (elle mène toutefois à de nombreuses dérives). Mais sur Vinted, les conditions d'utilisation sont claires: les particuliers ne sont pas censés faire de la vente à but commercial.

La plateforme offre bien la possibilité aux vendeurs professionnels de s'inscrire, mais uniquement pour vendre de la seconde main. Contactée par nos confrères de Tech&Co, Vinted assure ne pas "tolérer ce type de pratique".

Mais ses services d'alerte sont-ils vraiment efficients? Suite à un signalement de notre part concernant une des annonces, la plateforme nous a répondu que "le contenu signalé n'enfreint pas les règles de notre communauté".

Nos conseils pour s'en prémunir

Acheteurs, soyez donc très attentifs lorsque vous commandez un article sur Vinted et vérifiez toujours l’origine de votre produit. N’hésitez pas à contacter les vendeurs pour demander des photos supplémentaires des étiquettes et poser des questions. Si les réponses sont floues, ou que l'on refuse de vous faire parvenir une photo de l'étiquette, fuyez.

Lorsqu'il s'agit d'un produit prétendument de marque haut de gamme, réclamez aussi un certificat d'authenticité, parce qu'il y a, parmi ces annonces douteuses, de réelles contrefaçons, qui sont elles complètement illégales.

Plusieurs outils existent pour vérifier la provenance d'un article. Vous pouvez télécharger un logiciel, une extension pour votre moteur de recherche. Par exemple "Shein Image & ID searcher" est gratuite et s'installe en quelques secondes: ensuite, lorsque vous faites un clic droit sur l'image d'une annonce, votre moteur de recherche vous propose l'option "Search on Shein".

Après avoir cliqué, vous obtiendrez les correspondances entre l'image de l'annonce et les vêtements vendus sur Shein, et pourrez constater si l'article provient du site chinois.

Autre technique efficace: la recherche par image inversée. À partir de votre ordinateur, il vous suffit de naviguer sur Google Chrome, faire un clic droit sur la photo de l’annonce et appuyer sur “chercher avec Google Lens”. Vous obtiendrez tous les sites internet sur lesquels la même photo existe: vous saurez ainsi si l'article est également en vente sur Aliexpress, Shein, Temu ou autre.

Julie Pham, Charlotte Méritan